Trois

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« Bon, Mr Attal ? Vous voulez me parler de quoi ? » demanda Jordan qui commençait à s'impatienter. « Si c'est encore votre histoire d'homosexualité... »

« Non, au contraire » répondit Gabriel en baissant la tête pour ne pas avoir à confronter le regard du président du RN. « Je tenais à m'excuser auprès de vous,  je n'aurais pas du laisser mes émotions extérieurs s'exprimer au travail. Je me sens un peu dépassé en ce moment... »

En temps normal, Jordan se serait moqué de lui, mais là, c'était tout le contraire, il le comprenait parfaitement.

« Oui, je comprends... c'est un peu compliqué pour moi aussi en ce moment... » avoua t-il, les mots sortant tout seul de sa bouche.

Gabriel releva vivement la tête, étonné par cette réponse aussi sincère. Jordan, lui, regardait ses pieds, il sentait ses joues s'empourprer de rouge et ne voulait surtout pas croisé le regard de l'homme en face de lui.

Alors, le premier ministre décida de se laisser en retrait et de continuer sur ce nouveau sujet qui venait d'apparaître sur la table.

« Ah bon ? Vous avez gagné les élections, qu'est-ce qui peut vous tracasser ? » demanda t-il le plus tendrement possible.

Jordan souffla un coup puis plongea son regard dans celui de son ennemi politique.

« C'est compliqué... je vais peut-être quitter mon poste prochainement... » expliqua lentement Jordan.

Gabriel ne savait que dire, toujours surpris que le président du RN se confit aussi facilement à lui. Lui qui était de nature imposante et impénétrable semblait tout d'un coup faible et fragile.

« Mais peut importe ! » reprit-il. « Vous aviez quelque chose d'autre à me dire ou c'est bon ? »

Gabriel repris un peu ses esprits « Non, c'est bon, c'était simplement pour m'excuser. Maintenant, je vais repartir. »

Il se leva, serra la main à l'autre homme et quitta la pièce en le remerciant de l'avoir écouté. Il se sentait beaucoup plus apaisé qu'en venant.

Il était bientôt dix-huit heure, Jordan attendait, assis sur une chaise devant le bureau de Marine. Son genou sautillait à chaque vague de stress qu'il ressentait.

Il l'avait évité à midi. Il avait tellement peur de la croiser qu'il dû sauter le repas, mais il était si stressé qu'il n'avait même pas faim, même après cette longue journée de travail.

Le seul moment où il s'est senti à peu près bien aujourd'hui, c'était lors de sa discussion avec Gabriel Attal. Certes, il tenait son « secret » que depuis un jour, mais ça lui a fait du bien d'en parler rapidement à quelqu'un même si cette personne était un ennemi politique.

Il avait besoin de savoir que quelqu'un d'autre que lui n'était pas officiellement au courant de ce changement de poste.

C'est donc, le cœur serré, qu'il s'avança pour frapper à la porte de Marine.

« Entré ! » s'écria la voix qu'il connaissait si bien.

Il repris son souffle avant d'ouvrir la porte doucement. Il tenta de ne paraître ni trop anxieux, ni trop sur de lui. Il ne devait surtout pas paraître au courant, elle pourrait penser qu'il ait fouillé dans son bureau, ce qu'il avait accidentellement fait. Mais si elle en déduisait ça, leur relation de confiance pourrait s'abîmer.

Il découvrit avec stupéfaction que six autres membres du parti assistaient aussi à la réunion. Son stress monta excessivement vite, il ne s'était pas du tout préparé à ça. Il salua rapidement tout le monde, tout ce monde qu'il connaissait bien, tout ce monde qui savaient déjà la nouvelle et qui ne lui avait rien dit.

« De quoi vouliez vous me parler ? » demanda t-il, un grain d'inquiétude dans la voix.

« Jordan... » commença Marine. « Avec les autres, on a pris une décision difficile... »

Ça y est, c'était vrai. Il espérait toujours avoir mal lu ou mal compris, mais non. Sa peur grandissait de plus bel sur son visage, en voyant son expression, Marine continua.

« Ça ne va pas être facile à entendre, mais nous avons décidé de te restreindre de tes fonctions... »

Le jeune homme avait la bouche grande ouverte, il était incapable de prononcer quoi que ce soit, surtout avec tous ces regards plantés sur lui. Marine se leva et s'approcha doucement.

« Jordan, tu n'es plus président du Rassemblement National. » répéta t-elle, comme si la phrase d'avant n'était déjà pas assez claire.

« Pourquoi ? » répondit-il, un peu plus sèchement qu'il l'aurait voulu.

« Nous avons gagné les européennes, tu as eu ce que tu voulais... » déclara t-elle.

« Et qui prends ma place ? » coupa t-il froidement.

« C'est moi... » répondit tristement Marine.

« Donc enfaite j'étais là que pour les élections !? » s'emballa Jordan. « Vous aviez besoin d'un visage jeune et nouveau pour la campagne, et je suis tombé pile au bon moment, c'est ça ? »

« Mais non... » déclara t-elle, essayant de calmé l'atmosphère.

« J'ai très bien compris ! », Jordan était debout à présent. « C'est pas moi qui est eu ce que je voulais, c'est vous ! Maintenant que vous avez gagné les élections, vous pouvez me rejeter et... »

Il en perdait ses mots, sa bouche était sèche et des gouttes de sueurs perlaient sur son front. À part Marine qui faisait « non » de la tête, personne de bougeait. Il sentit peu à peu ses yeux s'embuer de larmes.

Jordan cherchait une once de compassion, ou même de pitié, dans les yeux de ses collègues mais ils semblaient tous agacés et exaspérés.

Sans chercher plus loin, il fit demi-tour et quitta la pièce à grands pas, en prenant soin de claquer la porte derrière lui.

Il rejoignit sa voiture et rentra au plus vite chez lui, n'arrivant plus à contenir ses émotions. En arrivant, il jeta sa veste sur une chaise et  s'allongea sur son lit.

Étonnamment, il avait facilement réussi à trouver le sommeil, il était tellement fatigué suite à son insomnie d'hier que ses yeux s'étaient fermés tout seul.

Il n'avait même pas eu le temps de songer à la journée du lendemain qui n'allait pas être de tout repos, surtout qu'elle se finissait par un débat contre le premier ministre.

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Quand la politique s'efface... (bardella x attal)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant