Le top départ est lancé.Les nageurs s'élancent dans le bassin, sous les applaudissements du public et les hurlements qui résonnent dans l'Arena. Galvanisée par la compétition et par l'opportunité qui m'a été offerte de devenir bénévole lors des jeux de Paris, je me précipite vers la première ligne des gradins, où se trouvent deux autres filles. Cela fait déjà une semaine qu'Olivia, Sophie et moi, travaillons ici pour épauler les officiels, sportifs, coachs, techniciens, et toutes les autres personnes mobilisées pour l'organisation des jeux. Cet été, j'avais le choix entre descendre passer deux mois sur la Côte d'Azur avec mes frères, ou venir en aide à mon père qui préside le comité d'organisation des jeux. Marius et Jack ont choisi l'océan et le surf, j'ai opté pour le bénévolat. Après tout : ces jeux sont historiques. Je n'aurais peut-être pas d'autres opportunités dans ma vie.
— Apolline ! Viens !
Debout contre la barrière, Sophie et Olivia me font signe. Je m'approche rapidement pour ne rien manquer de la course.
— ALLEZ LÉON !
Elles hurlent leurs encouragements au jeune athlète français qui s'est élancé dans le bassin, quelques secondes après que je lui ai tendu ma bouteille d'eau. J'avais déjà entendu parler de lui, par mon père qui ne tarit pas d'éloge à son sujet, et par les journaux qui le présentent depuis des semaines comme l'étoile montante de la natation, mais je n'avais encore jamais eu l'occasion de le rencontrer. Cette fois, c'est chose faite. Notre échange n'a duré qu'un court instant, mais lorsque ses yeux bleus ont rencontré les miens, que ses doigts m'ont effleuré, qu'il a bu au goulot de la bouteille que je lui tendais, avant de reprendre ses exercices pour se réchauffer et de se reconcentrer, j'ai eu l'impression que quelque chose se passer entre nous.
Un je-ne-sais-quoi.
Évidemment, tout cela est sûrement dans ma tête. Je suis du genre à me faire des plans sur la comète et trop vite m'emballer. Objectivement, Léon Marchand n'a fait que boire une gorgée à la bouteille que je lui tendais. Il m'a sûrement déjà oublié.
— ALLEZ LÉON !
C'est même certain, puisqu'il est en train de nager dans le bassin olympique, à la conquête de l'or qu'il convoite.
Qui est ce garçon, au juste ? A-t-il autant de talent que d'ambition ? Va-t-il vraiment conquérir l'or ? Il paraît qu'il s'est inscrit à la fois sur le 400m 4 nages, mais aussi sur le 200m papillon, le 200m brasse et d'autres encore... Il sort d'où ce type ? Je trouve cela osé de se présenter à autant de compétitions. Il ne peut quand même pas être bon partout, si ? Monsieur doit avoir la grosse tête, tout cela parce qu'il est entraîné par Bob Bowman.
— ALLEZ LÉON ! hurle Sophie.
— Purée ! Mais il est devant tout le monde, là ! s'écrie Olivia.
— Regarde ! Il met presque 15m dans la vue du japonais.
Je me reconcentre et fixe mon regard sur le bassin, puis sur les écrans. C'est vrai qu'il nage bien. C'est même prodigieux ce qu'il est en train d'accomplir. Léon nage, telle une fusée, pourfendant l'eau comme les voiliers face aux vagues. Qui est ce garçon ? Un ovni ? Sur les écrans, les compteurs s'affolent. « Va-t-il battre le record de Michael Phelps ? ». Purée, il pourrait y arriver en plus ! Les autres ont un train de retard derrière lui.
Il nage, nage, nage...
— PURÉÉ ! PURÉÉ ! REGARDEEEEEEE !
Sophie serre mon bras, elle exulte, saute partout, son drapeau français à la main qu'elle balance de chaque côté. Olivia hurle à m'exploser les tympans. Moi, je ne parviens pas à lâcher les yeux de mon écran. Le stress est à son paroxysme.
— Il ne reste plus que 50 m !!! hurle Sophie.
— C'est incroyable, chuchoté-je.
Mon chuchotement est noyé par ses cris.
— Allez Léon, allez Léon.
— « Léon Marchand est en phase de battre le record établi par Michael Phelps », indique le commentateur. « Le Toulousain de 22 ans devance de six secondes le Japonais Tomoyuki Matsushita et l'Américain Carson Foster et ... »
— IL A GAGNÉ !!!
— MÉDAILLE D'OR ! ON A LA MÉDAILLE D'OR !
L'Arena explose dans un torrent d'applaudissements et de hurlements. Léon vient de battre le record établi par Michael Phelps avec 4 minutes et de 2 secondes d'avance et de gagner la compétition. C'est absolument incroyable ce qu'il vient de réaliser, et on dirait qu'il n'est même pas fatigué. Dans la piscine, le poing levé, il retire ses lunettes et salue la foule un grand sourire aux lèvres.
Et moi aussi, je souris.
Je ne sais pas vraiment qui est ce type sorti de nulle part, mais je ne peux m'empêcher de penser que c'est grâce à ma gorgée d'eau qu'il a gagnée.
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Le rêve olympique : Léon Marchand & la bénévole
RomanceApolline est bénévole sur les jeux olympiques de Paris quand elle fait la connaissance de Léon Marchand, juste avant qu'il ne concoure pour le 400m 4 nages. De compétition en compétition, la jeune bénévole et le nageur le plus prometteur de sa génér...