Chapitre 1

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PDV AMARA

La journée avait été longue. Les cours s'étaient enchaînés les uns après les autres, et je n'avais qu'une hâte : fuir ce lieu de torture. Je ne sais pas qui avait décidé qu'on apprenait mieux huit heures par jour sur une chaise... Mais si j'avais pu, je l'aurai bien retrouvé pour lui faire la peau. Je remontais péniblement l'allée du lycée, avec la vague impression de devoir gravir l'Everest. Après mon ascension, j'arrivai enfin au portail, les poumons en feu.

Je regardai ma jolie montre argentée : moins cinq. J'attrapai alors mon fidèle casque noir et le greffai sur ma tête. J'allais devoir poireauter encore un petit peu avant de sortir, alors autant rendre ça plus agréable. La petite mélodie de la connexion à mon téléphone retentit pour m'indiquer que l'appareil était prêt à l'emploi. La première musique raisonna dans mes oreilles directement après, m'isolant instantanément de la foule qui commençait à s'agglutiner autour de moi. C'est fou comme la réduction de bruit était quelque chose de révolutionnaire. Cela faisait tellement de bien de pouvoir se sentir seule autour de tout ce monde : cela me permettait de décompresser. J'avais un peu de mal à la fin de la journée à continuer à sociabiliser. Ma jauge d'irritabilité était généralement à son paroxysme, et il ne valait mieux pas se trouver dans les alentours à ce moment-là. Je pouvais être très vite désagréable.

Deux musiques après, le portail s'ouvrit enfin. Je m'élançai, le regard vide, pour rejoindre ma voiture. Je n'habitais pas loin, mais j'avais du amener quelques affaires pour un cours de pratique, alors j'étais venue en conduisant. Je faisais tourner la clé de ma jolie et bien aimée 206 entre mes doigts, pendant que je laissai mes jambes me porter jusqu'à elle. J'imaginai déjà mon corps s'affaler sur mon lit douillet avec son épaisseur de deux matelas.

C'est alors que je le sentis, ce poids sur mes épaules. Presque immédiatement, comme un réflexe, je relevai les yeux. Je cherchai du regard ce qui semblait me troubler autant, tout en tentant de me persuader que j'hallucinai. Et là, je dénichai enfin ce qui me mettait mal à l'aise. Mon ventre se noua, et ma bouche en tomba presque sur le sol.

Je n'en croyais pas mes yeux. Un grand blond d'un mètre quatre-vingt-cinq décoiffé dansait d'un pied sur l'autre en regardant ses mains. Elles tenaient fermement un gros bouquet de fleurs. Son regard trouva le mien tandis que je détaillai comme il avait changé en deux ans. Il aperçut visiblement ma surprise, puisqu'il afficha un grand sourire sur sa face. J'aurai presque pu croire qu'il m'avait manqué, mais quand il fit cette moue de crétin, je me souvins de tout le mal qu'il m'avait fait. Il n'avait peut-être pas tant changé que ça.

Le rouge s'empara de mes joues quand je sentis que tous les regards étaient posés sur moi. Il s'approcha, d'un pas assuré et avec un stupide sourire Colgate. Mon ventre ne s'était toujours pas desserré, broyant au passage tous mes organes. Un flot de mauvais souvenirs me revenait à chaque mètre qu'il réduisait entre nous. Je touchai machinalement ma poche de pantalon à la recherche de mon petit flacon de fleurs de Bach contre le stress. Mais il n'y était pas. Je sentis la panique me gagner, il avait éveillé en un regard une peur qui me serrait la gorge et m'empêchait de respirer correctement.

J'entendis des chuchotements s'élever tout autour de moi. Il ne manquait plus que ça. Je jetai ce qui devait être un bref coup d'œil vers cette assemblée, quand je remarquai un garçon qui me dévisageait avec attention. Mon cœur bondit dans ma poitrine. Aaron Vanacker. Cela faisait des mois que je faisais une sorte de fixette sur ce type. Ma meilleure amie Zoé me le répétait souvent : « Amara t'abuse, c'est presque si tu ne baves pas en le regardant... Va le voir au moins ! » Mais je n'osai pas, et je ne savais pas si un jour j'y parviendrai. Il y avait quelque chose de tellement intriguant en lui. Il était, d'après les dires que je pouvais glaner ça et là, très différent de ce que l'on pouvait s'imaginer. C'est vrai qu'il était très beau et que c'était plaisant à regarder. Mais il avait aussi un esprit vif et éclairé. Il avait toujours un livre dans son sac, et c'était un féru d'histoire et de cinéma. Pour une fois qu'un garçon avait quelque chose dans la tête. Mon regard se tourna vers Arthur qui n'était plus très loin de moi. Lui, c'est vrai qu'il n'était pas connu pour son intelligence hors norme.

AmaraOù les histoires vivent. Découvrez maintenant