Les Fragments de Nous

Chapitre 17 Gabriel 2024 - Montréal

Je me réveille en sentant le poids léger de Mara contre moi. Elle dort encore, ses traits enfin apaisés après la tempête émotionnelle d'hier soir. Je la regarde, un mélange de tristesse et de tendresse dans le cœur. Elle est si belle, même dans sa vulnérabilité, et je sais qu'elle mérite bien plus que ce que Thorn lui inflige.

Je me lève doucement, essayant de ne pas la réveiller, et me dirige vers la cuisine pour préparer du café. Alors que l'odeur riche et réconfortante emplit l'air, mes pensées dérivent vers la soirée passée. Voir Mara dans cet état, si désespérée et perdue, m'a brisé le cœur. J'ai dû intervenir, la ramener chez moi pour la protéger, mais je ne peux pas m'empêcher de ressentir une pointe de jalousie envers Thorn. Pourquoi a-t-il encore ce pouvoir sur elle ?

Cinq ans. Cela fait cinq longues années que je suis là pour elle, la soutenant à chaque crise, chaque chute. Pendant cinq ans, j'ai regardé Mara se détruire lentement sous l'emprise de Thorn, et à chaque fois, c'est moi qu'elle vient voir pour panser ses blessures. Mon cœur saigne à chaque larme qu'elle verse, et pourtant, je ne peux m'empêcher de ressentir une certaine tristesse, une frustration sourde. Je suis toujours celui avec qui elle vide ses pensées, celui qu'elle utilise pour se venger de Thorn, mais jamais celui qu'elle aime vraiment.

Je suis sorti de mes pensées par le bruit léger des pas de Mara. Elle apparaît dans l'embrasure de la porte, ses yeux encore gonflés de sommeil et de larmes. Elle me sourit faiblement, et je lui tends une tasse de café chaud.

- Merci, Gabriel, murmure-t-elle, ses doigts effleurant les miens en prenant la tasse.

Nous nous asseyons à table, le silence entre nous est confortable mais chargé. Je sais qu'elle a besoin de parler, de vider son sac, mais je veux qu'elle prenne son temps.

- Comment te sens-tu ce matin ? lui demandai-je doucement.

Elle prend une gorgée de café, ses yeux se perdant dans le liquide noir.

- Je me sens... vidée, avoue-t-elle finalement. Je sais que je dois me libérer de Thorn, mais c'est si difficile. Il a ce pouvoir sur moi, cette emprise que je ne peux pas expliquer.

Je hoche la tête, comprenant mieux que quiconque. Thorn est un maître de la manipulation, et il sait exactement comment toucher les cordes sensibles de Mara.

- Tu n'es pas seule, Mara. Nous sommes tous là pour toi. Mais tu dois vouloir cette liberté pour toi-même. Personne ne peut le faire à ta place.

Elle me regarde, ses yeux remplis de larmes non versées.

- Je sais, Gabriel. Et je veux changer, je veux vraiment. Mais parfois, je me sens tellement faible...

Je prends sa main, serrant doucement.

- Tu n'es pas faible, Mara. Tu es incroyablement forte. Tu as juste besoin de croire en cette force, de la trouver en toi.

Elle inspire profondément, cherchant à se ressaisir.

- Je vais essayer. Pour moi, pour toi, pour nous tous.

Je lui souris, espérant que mes paroles l'encourageront. Nous passons un moment en silence, appréciant simplement la compagnie l'un de l'autre. Puis, une idée me traverse l'esprit.

- Que dirais-tu de passer la journée dehors ? Prendre l'air, marcher un peu ? Ça pourrait te faire du bien.

Elle hoche la tête, semblant apprécier l'idée.

- Oui, ça me ferait du bien. Merci, Gabriel.

Nous nous préparons rapidement, et bientôt, nous sommes dehors, marchant dans les rues animées de Montréal. L'air frais et la lumière du jour semblent redonner vie à Mara, et je sens une lueur d'espoir grandir en moi. Peut-être qu'avec du temps et du soutien, elle pourra enfin se libérer de l'emprise de Thorn.