Les Fragments de Nous

Chapitre 22 Gabriel 2024 - Montréal

Je m'enfonce un peu plus dans le canapé, le téléphone à la main, défilant sans conviction à travers les profils sur l'application de rencontres. Chaque femme que je fais défiler me semble un peu plus fade que la précédente. Aucune d'elles n'arrive à me faire oublier celle qui hante mes pensées.

Mara.

Je soupire, fermant les yeux un instant, essayant de faire taire cette petite voix en moi qui murmure son nom encore et encore. C'est absurde de continuer ainsi. Je ne peux pas passer ma vie à l'attendre, à espérer qu'elle change, qu'elle choisisse enfin de me voir autrement que comme le mec sympa sur lequel elle peut toujours compter.

Je rouvre les yeux et continue de naviguer sur l'application. Une photo attire mon attention. Julia, 29 ans, des yeux verts pétillants et un sourire chaleureux. Elle dégage une impression de simplicité, de sincérité. Quelqu'un de normal, quelqu'un qui pourrait m'aider à tourner la page. Je commence à lui envoyer un message, et rapidement, nous engageons une conversation. Elle est drôle, intelligente, et surtout, elle ne me fait pas penser à Mara. C'est une bouffée d'air frais. Peut-être que c'est ce dont j'ai besoin.

Après quelques échanges légers, Julia propose que nous allions boire un verre ce soir. Je souris, sentant une pointe d'excitation à l'idée de rencontrer quelqu'un de nouveau, de pouvoir enfin sortir de ce cycle infernal où je suis coincé avec Mara. Je commence à taper ma réponse, prêt à accepter l'invitation.

Mais avant que je puisse appuyer sur « Envoyer », on frappe à la porte. Je fronce les sourcils, surpris. Qui pourrait bien venir me voir à cette heure-ci ?

Une vague d'appréhension m'envahit. Et si c'était... Non, ça ne peut pas être elle. Pas encore.

Je me lève, le téléphone toujours en main, et me dirige lentement vers la porte. Mon cœur bat plus vite à chaque pas, comme si une part de moi savait déjà ce que j'allais trouver de l'autre côté.

Lorsque j'ouvre la porte, c'est comme si tout s'effondrait autour de moi. Mara se tient là, les yeux rougis par les larmes, son visage marqué par une tristesse profonde. Elle est en pleurs, son corps secoué par des sanglots, et à cet instant, tout ce que j'avais tenté de construire pour m'éloigner d'elle s'effondre.

- Gabriel... murmure-t-elle, sa voix tremblante. Je ne savais pas où aller... Je suis désolée...

Mon cœur se serre, et je sens mon estomac se nouer. Elle est encore là, à ma porte, vulnérable, désespérée, et je suis incapable de la repousser, incapable de lui dire non.

- Mara... Qu'est-ce qui se passe ? demandai-je, malgré moi, incapable de détourner les yeux de son visage ravagé par le chagrin.

Elle se jette dans mes bras, ses larmes mouillant ma chemise. Mon instinct est de la serrer contre moi, de la protéger, même si je sais que je devrais m'éloigner. C'est toujours la même histoire. Elle sait exactement comment jouer sur mes sentiments, et je tombe dans le piège à chaque fois.

- Je n'en peux plus, Gabriel, sanglote-t-elle. Je ne sais plus quoi faire... J'ai tout gâché... Je ne sais plus où j'en suis...

Je la pousse doucement à l'intérieur, refermant la porte derrière elle. Son désespoir est palpable, et je ne peux pas m'empêcher de vouloir la sauver, de vouloir être celui qui la ramènera à la lumière. Mais je sais que c'est un piège, un cycle infernal dont je ne suis jamais vraiment sorti.

Je l'installe sur le canapé, essayant de reprendre le contrôle de mes pensées. Mon téléphone vibre dans ma main, un rappel du message de Julia, mais je l'ignore, le posant sur la table. Toute mon attention est sur Mara, sur cette femme qui continue de détenir mon cœur en otage.