Rokia, sentant l'angoisse monter, se demande ce qui va se passer dans les prochains jours. Elle se sent vraiment malchanceuse : elle vient à peine de commencer les cours et ne pourra pas se cacher à la maison, même si elle le souhaitait.
— Tu n'as pas l'air bien, remarque Thierno, inquiet en la regardant. Tu sais, il se peut que tu aies été piquée par inadvertance. Ça m'est arrivé aussi. Bon... Je n'ai pas eu cette couleur aussi... euh... singulière, mais ça pourrait être ça, finit-il en essayant de sourire.
Ses amis essaient de la rassurer du mieux qu'ils peuvent, mais rien n'y fait. Rokia, sentant un poids lui comprimer la poitrine, décide alors d'ouvrir son cœur et de leur expliquer la situation.
Elle est convaincue qu'il doit savoir ; après tout, Thierno sera le premier à comprendre son inquiétude. Elle lui raconte tout en détail, laissant Thierno bouche bée. Celui-ci, sous le choc, en parle à son frère jumeau et à leur père, qui, stupéfait, s'empresse de réagir.
— ROKIA ! COMMENT VAS-TU ? s'écrie-t-il en arrivant en courant.
N'en dis pas plus, Thierno m'a tout raconté. Tu n'as pas à t'en vouloir, tu ne pouvais pas savoir, tente-t-il de la rassurer d'une voix tremblante. Mais pourquoi ne nous en as-tu pas parlé ? ajoute-t-il, peiné.
Le père, inquiet, pose une main chaleureuse sur l'épaule de sa fille, sentant sa propre inquiétude s'intensifier. Rokia, dévalorisée et frissonnante de peur, ne sait plus où se mettre. Elle se devait de lui expliquer la cause, se dit-elle intérieurement, mais maintenant qu'il est déjà au courant, elle se sent d'autant plus accablée.
La fin de cette soirée est empreinte de remises en question silencieuses. Sadio, son père, la mine assombrie, paraît plongé dans ses pensées. Il pose sa main sur le front de Rokia, essayant de comprendre comment une pierre, si anodine en apparence, pourrait provoquer autant de dégâts.
— A bɛ se ka kɛ cogo di ?
— Comment est-ce possible ? dis-t-il, visiblement décontenancé.
Le père se lève alors et examine la gemme du mieux qu'il peut, scrutant chaque détail à l'œil nu, mais sans réussir à trouver d'explication convaincante.
Peu après, la mère de Rokia rentre à la maison. En tant que médecin, elle décide de procéder à une analyse plus approfondie.
— N ka faantan ! Yala aw bɛ ka ɲɛ wa ? I tun ka kan ka cikan ci n ma tilelafana dun waati la, n dusu kasira i ko la
Ma pauvre ! Tu vas bien ? Tu aurais dû m'envoyer un message pendant la pause déjeuner, je me sens mal pour toi dit-elle en étant inquiète, en la voyant.
Elle s'approche et examine de près le visage marqué de sa fille. Elle pose un doigt hésitant sur la tache.
— Ta tâche ressemble à un mélasma ou une macule, mais ce n'est pas tout à fait ça, analyse-t-elle. Ton père m'a dit que c'est à cause de cette gemme. C'est exactement la même tâche que celle de ce jeune homme que j'ai reçu dans mon cabinet... murmure-t-elle, incrédule.
Mère et fille se regardent avec gravité, établissant un lien avec ce jeune homme, qui avait une tache de même dimension, mais d'une autre couleur. La mère, perplexe, secoue légèrement la tête, comme pour chasser un mauvais pressentiment.
Le lendemain arrive rapidement. Les parents et les frères de Rokia sont déjà partis ; elle est la dernière à quitter la maison ce jour-là. Elle jette un coup d'œil anxieux dans le miroir de la salle de bain, espérant que cette fichue tache verte ait disparu. Mais, à son désarroi, elle est toujours là. Elle n'a pas le choix : il est temps de partir, malgré tout.
À la fin des cours, Rokia rentre chez elle, après une journée passée à dissimuler son visage avec tous les moyens possibles.
En entrant, elle tombe sur une affiche de disparition accrochée à un panneau. Par curiosité, elle s'approche pour l'examiner de plus près et voit le portrait d'un jeune homme... avec une tache violette ! Rokia a l'impression d'halluciner, se penche encore plus près, comme pour confirmer l'impossible. Elle doit en parler à sa mère ; l'urgence la gagne.
— Qu'est-ce qui se passe, Rokia ? s'inquiète son frère Thierno, en la voyant dans cet état d'agitation.
— Le jeune homme... le jeune... ! Elle ne parvient pas à reprendre son souffle.
— Respire ! s'empresse-t-il de dire.
— Il a disparu !
— Mais de qui parles-tu ? réponds, Thierno en cherchant de comprendre
— De celui... de celui...
— PARLE, ROKIA ! insiste-t-il, désemparé.
— Du jeune dont maman parlait, celui qui avait la tâche. Il a disparu !
Après un moment d'hésitation, Thierno, abasourdi, commence à croire sa sœur. Il ne se sent pas en position de la juger. Il l'encourage à se reposer, mais avant qu'elle n'ait eu le temps de se calmer, leur père rentre du travail. Son fils lui raconte toute l'histoire.
—Je viens de rentrer, et j'ai effectivement vu cette affiche. J'ai tout de suite pensé à toi, Rokia ! C'est incroyable ce qui se passe ! dit-il d'un ton grave
Le père de famille monte dans la chambre de sa fille pour vérifier comment elle se porte, mais il n'est pas au bout de ses surprises.
— Rokia, i bɛ taa min ?
— Rokia, tu vas où ? demande-t-il, en la voyant prête à sortir.
Sans un mot, la jeune fille descend l'escalier à toute vitesse, se dirigeant droit vers l'étang. Sa méduse est en train de rendre l'âme, et elle prend au sérieux les mots du papier mystérieusement trouvé dans le bocal : il est temps de régénérer la créature. Elle ne peut pas la laisser mourir.
Malgré la grosse marque verdâtre sur son visage, Rokia se précipite vers l'étang, laissant son père et son frère dans la confusion.
— Je reviens ! assure-t-elle rapidement.
Le père et le fils la regardent s'éloigner avec inquiétude.
— Ce n'est pas vrai... j'avais oublié à quel point c'était lourd ! soupire Rokia, en peinant à transporter le bocal.
Elle marche avec difficulté, mais la détermination dans son regard est visible. Elle murmure des mots réconfortants à la méduse, comme pour l'encourager à tenir bon.
Petit à petit, elles s'approchent enfin de l'étang. Rokia, la voix basse, continue à lui parler, lui racontant ce qu'elle a vécu la dernière fois avec ses frères.
— Voilà, ma beauté, murmure-t-elle en atteignant l'eau.
Elle verse l'eau de l'étang dans le bocal, sentant la méduse reprendre un peu de vigueur.
Mais soudain, un grondement sourd ébranle le sol.
— QU'EST-CE QUI SE PASSE ? hurle-t-elle, terrifiée.
Le sol tremble. Une algue d'un bleu étrange sort de l'étang et se dirige vers elle. Avant qu'elle ne puisse réagir, l'algue s'enroule autour d'elle. Le bocal glisse de ses mains et se brise.
— POURQUOI CETTE FOUTUE ALGUE NE ME LÂCHE-T-ELLE PAS !
Les gens autour de l'étang commencent à crier. Quelques courageux tentent de l'aider, mais l'algue semble dotée d'une force mystérieuse, bien plus puissante que leurs bras. Rokia les regarde, désespérée, ses larmes coulant malgré elle.
Ils essaient de la retenir, mais la force de l'eau et de l'algue les surpasse. Peu à peu, ils lâchent prise, leurs forces les trahissant. Rokia, sentant le monde s'effacer autour d'elle, est aspirée, impuissante, par l'étrange créature aquatique.
VOUS LISEZ
Opales des Abysses
FantasyRokia, une jeune fille curieuse, assiste à la foire annuelle des jeux de son quartier. Alors qu'elle participe à différents jeux, elle finit par remporter un prix inattendu : une méduse dorée, un animal aquatique étincelant et mystérieux, enfermé da...