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Le lendemain, farouk était fidèle au poste. Il m'accueillit avec un doux sourire puis m'escorta au jardin. Il demeurait près de la porte, comme s'il la gardait et ne se déplaçait que si je me trouvais en dehors de sa vue.

"Depuis combien de temps êtes vous combattant dans les forces armées de Farès ?"

"Huit ans, princesse"

"Vous pouvez m'appelez Laila ou Léa"

"Je n'en ferais rien, nous ne sommes pas du même rang princesse"

"Je suis la fille cachée d'un émir - je suis une simple roturière "

"Vous avez été reconnue. Vous êtes princesse et je dois respecter votre statut social, et le fait que vous soyez une invitée du palais"

"Par invitée du palais... Vous entendez retenue contre mon gré, n'est ce pas faroukh?"

"J'ai confiance au jugement de mon souverain. S'il vous retient ici, c'est qu'il a une bonne raison"

"Je suis une simple étudiante, je n'ai commis ni crime ni offense "

"Votre famille..."

"On ne peut me reprocher les crimes d'une famille que je ne connais pas - a l'exception de mon géniteur - et qui n'a jamais voulu faire ma connaissance. Ma mère a vécu au palais jusqu'à mes douze ans, personne ne s'est jamais inquiète de nous et même, plusieurs d'entre eux intrigaient contre nous ..."

"Le cheikh sait ce qu'il fait. Et puis vous être bien traitée ici"

"Une cage dorée reste une cage"

"J'en conviens"

"Parlez moi de vous alors"

"Il n'y a rien a dire, princesse, j'ai grandi dans une famille soudée, j'ai eu envie de m'impliquer dans la défense de mon pays, ma famille m'a soutenu, quoi qu'ils auraient préféré un travail moins risqué pour moi"

"J'imagine oui"

"Je suis rentré dans l'armée a dix huit ans, l'âge de la majorité, et j'ai pu grimper les échelons assez vite après des faits d'armes pendant..."

"La guerre qui a opposé ma famille à votre cheikh"

Il acquiesce silencieusement  et nous continuons d'avancer vers le haut mur du fond.

"C'était le rempart autrefois" dit il d'une voix plate.

"Pardon?"

"Le jardin de la défunte reine... C'était le rempart et la tour de ronde du palais. Le pays s'est tellement pacifié qu'il n'était plus nécessaire de militariser le palais, alors le cheikh - le père du cheikh actuel - a offert cette section du palais à la reine pour son agrément. Elle a transformé le canal qui servait à abreuver les troupes en un réseau aquatique complexe qui permet d'irriguer les jardins et d'alimenter les fontaines d'agrément. On dit d'elle que c'était une sainte femme"

"Vraiment? Je ne me rappelle pas d'elle"

"Elle est morte jeune, elle était très malade... De son vivant, elle alimentait les bonnes oeuvres, surtout à l'égard des filles. C'était un précurseur sur l'éducation à la santé, la solidarité autour de la précarité menstruelle... Elle a permis à notre pays de faire un vrai bond en avant en quelques années... Malheureusement, Allah l'a rappelé à ses côtés bien vite..."

"On dit que ce sont les meilleurs qui partent en premier"

"C'est souvent vrai" le garde s'éloigna de quelques pas et quelques secondes après, Farès apparut dans les jardins.

Les deux hommes se saluèrent d'un geste de la tête et Farès vint se poster à mes côtés.

"Votre balade est agréable Laila"

Je lui jette un regard mais ne répond pas.

''j'aurai pensé que vous vous seriez plu dans les jardins de la reine"

"Ils sont très agréables. Mais je n'ai rien à y faire à vrai dire ... J'aimerai mieux être libre"

"Je ne vous rendrais pas votre liberté, mais si tel est votre souhait, je peux organiser une excursion hors les murs du palais. Ça vous plairait?"

Je lui jette un coup d'oeil anxieux. Est il vraiment sérieux? Ou se moque t il de moi?

"Vous feriez ça?"

"A vrai dire, ça me serait plutôt utile. A condition que vous vous teniez correctement..."

Qu'est ce qu'il veut dire par là...? Utile? Je m'empresse de jurer de rester sage, en croisant les doigts derrière mon dos, avec l'idée que peut être je parviendrais à m'échapper sans trop de difficultés...

"A la bonne heure. Le souk est reputé et très apprécié des touristes. Il y un verrier d'art, un parfumeur exquis, des tas de boutiques alimentaires où on trouve des fruits mûrs a souhait, de délicates pâtisseries, des vaniers, des Tanneurs.... " Le visage du souverain s'anime alors qu'il me vente les mérites de son pays "vraiment Laila, vous allez apprécier, j'en suis sûr..."

Avec douceur, il m'amène vers la porte.

"Rentrez donc vous mettre à l'ombre, j'ai peur que vous tombiez malade, il serait dommage de rater ça n'est ce pas?"

Mon coeur est amer, mais je ne proteste pas, apeurée qu'il revienne en arrière sur sa décision de me laisser quitter le palais, même pour quelques heures.

"Avez vous besoin de quelque chose? Magazine ? Livre? "

"Rien de tout ça non, j'ai mon téléphone, mon ordinateur et ma liseuse"

"Bien, si je peux satisfaire vos besoins, je le ferai avec plaisir. Pensez y. Bonne journée Laila"

Alors que le chekh se retire sur ces derniers mots, encore une fois, je suis envahi par un énorme sentiment de solitude.

Série: L'otage. Tome 5. Les Yeux De LailaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant