18

167 21 20
                                    

Cet épisode met en scène une discussion qui fait référence aux évènements décrits deux chapitres plus tôt. Le compte-rendu peut être choquant.

Les jours qui suivent répètent un même schéma.

Chaque matin, Farès m'attend pour prendre le petit déjeuner dans le salon. Il "travaille" ensuite: entraînement avec les soldats, réunions avec son conseil, réunions avec des diplomates, entretiens divers.

Je sais quelle est ma place, mais pour l'instant, personne ne m'a encore confié la charge de l'administration du palais. Peut être l'a t-il confié à quelqu'un d'autre ou me croit-il incapable? Je passe la journée confinée dans ma chambre, assise sur mon fauteuil à fixer l'extérieur depuis la fenêtre.

Personne ne semble songer à moi le midi.

Le soir, on apporte souvent un dîner pour deux mais Farès ne me rejoint que très rarement, il rentre même de plus en plus tard. La plupart du temps, je m'endors même sans l'avoir vu de la journée. Parfois, je me réveille la nuit. Il est toujours au même endroit: assis, dans ce fauteuil que j'occupe le jour, fixant mon lit.

Et le schéma se répète à nouveau.

C'est comme être coincé dans un jour sans fin.

***

"Amira?" Je ne réagis pas à l'appel de mon titre par fatima, elle doit faire un petit bruit de gorge pour attirer mon attention.

"Pardon fatima, que puis je faire pour vous?"

"Ce n'est rien Amira, votre titre de cheikha est encore récent, c'est bien normal. Vous avez de la visite. Cela dit, la personne qui vous rend visite est un homme et je crains qu'il ne soit pas correct que vous soyez seule en sa présence..."

"Et bien renvoyez le" dis je, en haussant les épaules.

"C'est Farouk, Amira"

Mon ventre se serre et mon cerveau tourne a toute vitesse. Ai-je vraiment envie de voir Farouk?

"Dis lui que je vais le recevoir dans le jardin de la reine. Je souhaite que deux gardes se postent à la porte du jardin"

"Bien Amira"

Je pose un voile vert jade sur mes cheveux, assorti à ma robe d'un ton plus soutenu et je m'installe au bord de la plus grande fontaine. Elle est assez loin pour que les gardes n'entendent pas, et assez près pour qu'ils puissent m'avoir à l'oeil. Les bruits et les rumeurs se répandent très vite dans un palais. J'en ai déjà fait les frais.

"Amira"

Je lui jette un coup d'oeil sans lui répondre.

"Je suis venu vous présenter mes excuses"

"Je n'en veux pas, Farouk. Est ce bien votre nom au moins?"

Il baisse la tête, contrit.

Je me tourne de nouveau vers la fontaine, et y passe une main légère. C'est rafraîchissant. Je devrais venir plus souvent, plutôt que rester cloitrer dans ma chambre à maudit Farès et mon père, de m'avoir mis dans une telle position.

"J'ai imaginé ce plan sans vous connaître"

Je m'immobilise, et il y voit une invitation à développer.

"Farès et moi avons grandit ensemble, mon père était le plus proche conseiller de feu son père et nous avons trois ans d'écart. Je l'ai admiré quand il a fait son service et j'ai emboîté le pas à mon tour à ma majorité. C'est mon meilleur ami et mon modèle et..."

J'ai un rire sans joie qui l'interrompt dans son discours un bref instant puis il reprend

"J'ai été surpris des accusations d'enlèvement par la presse internationale. Je suis venu lui demander ce qu'il se passait  et il m'a expliqué ses raisons"

Je lui jette un regard froid qui ne l'arrête pas cette fois

"Il m'a dit que vous ne consentiez pas à cette union, et que vous étiez profondément malheureuse de la situation. J'ai pensé qu'avoir un ami à qui parler serait la solution "

"Et vous vous êtes dit que vous faire passer pour ce que vous n'étiez pas était une idée en or?"

"J'aurai pu clarifier qui j'étais, mais je voulais qu'on apprenne à se connaître sans que vous ayez un a priori sur moi à cause de mon lien avec Farès."

"Et donc, a quel moment faire semblant d'être fouetté à mort a germé dans vos esprits?"

"Farès vous avez prépare une surprise. En entrant dans votre chambre il a entendu la sonnerie de votre téléphone. Votre amie kimy y détaillait votre plan de sauter par dessus la muraille au risque de vous tuer... Après votre hospitalisation, il fallait trouver un moyen de vous forcer à vous tenir tranquille, sans toutefois faire de vous une prisonnière "

J'ai un sanglot qui m'échappe

"Réalisez vous ce que j'ai enduré, en pensant que chaque coup que vous pretendiez recevoir était ma faute, parce que vous aviez eu la bonté de m'aider? Alors que pendant tout ce temps vous vous moquiez de moi et de mes sentiments? De ma peur? De ma culpabilité ? De l'horreur que je ressentais en vous rendant visite la bas? J'ai sacrifié ma liberté pour espérer sauver quelqu'un qui se moquait ouvertement de moi!"

"Pardon Amira... Je n'ai pas vu la portée de mes actes et..."

"Savez vous combien de fois j'ai été hospitalisée depuis mon enlèvement ? Combien de fois j'ai pleuré? Je me suis évanouie? Combien j'ai eu d'insomnies? "Je crie de plus en plus fort et les gardes semblent mal à l'aise et sur le point d'intervenir.

"Je suis certain que Farès"

"Farès m'a ramené sous le choc et évanouie dans sa chambre pour abuser de moi le soir du mariage!"

"Vous mentez!"

"Je mens ? De nous deux, je ne suis pas celle qu'on peut qualifier de menteuse! Farès m'a ramené dans sa chambre, il m'a déshabillée et m'a fait des choses, des choses que..."

"Farès est une bonne personne..."

"Il m'a forcé, en m'enlevant et en me soumettant au chantage, à l'épouser, et une fois cela fait, il a usé de mon corps sans mon consentement. Comment appelez-vous le fait de pénétrer quelqu'un par la force, la surprise, la pression ou la menace? Un viol! J'étais encore sous le choc de la révélation de cet affreux traquenard et évanouie! Comment aurais je pu consentir ou me défendre!?"

Farès fait un pas en arrière, en me fixant et en serrant les poings.

"Vous ne me croyez pas Farouk? Votre idole a demandé aux servantes de nos appartements de placer les draps maculés du sang de ma virginité et de sa semence au coffre du palais, avec les bijoux d'apparat. Allez donc vérifier"

Série: L'otage. Tome 5. Les Yeux De LailaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant