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— Non
La réponse de Remy, aussi sèche qu'une gifle, résonne dans l'air comme un coup de tonnerre. Son ton, sur ce seul mot, semble empreint d'une froideur que je n'avais jamais perçue auparavant. Un frisson désagréable me parcourt l'échine, comme si cette simple syllabe avait le pouvoir de glacer le sang dans mes veines.
— Comment ça « non » ?
— Non on ne fera pas ça, répond Remy.
Ses yeux, d'un bleu si clair qu'ils en paraissent presque translucides, me fixent — chose rare — avec une neutralité déconcertante. Ils sont comme deux éclats de glace, dépourvus de toute chaleur, de toute émotion. J'ai l'impression de parler à une statue, à une créature façonnée dans le marbre, éternellement figée dans une expression de calme imperturbable, mais dont les traits anguleux représentent la dureté d'un homme sûr de lui.
Je le regarde avec des yeux ronds, je dois avoir mal compris. Peut-être que je n'ai pas bien saisi le ton de sa voix. Mais non, son expression reste la même, inébranlable, impassible. Il est sérieux. Je sens un poids lourd se former dans mon estomac, une boule indéterminée qui grandit à chaque seconde. Je baisse les yeux vers la feuille que je lui tends et qu'il n'a même pas attrapée pour regarder, cette page que j'ai remplie avec tant de soin, avec tant d'espoir. C'est comme si tous mes efforts se dissolvaient en un instant, réduits à néant par un simple mot. Le moodboard de ventilateurs vintage-chic élaboré la veille pour faire comprendre à Remy que j'essayais d' implanter ses idées aux miennes ne sert plus à rien s'il n'y jette même pas un oeil.
Le plan était simple : lui faire croire que je m'intéressais à ses idées pour qu'il s'intéresse aux miennes et faciliter la venue d'un compromis. Je voulais créer un dialogue, une ouverture. Peut-être que ce n'était pas la manière la plus honnête d'aborder la situation, mais c'était une tentative désespérée de sauver ce projet. Mais là, face à son rejet abrupt, tout mon stratagème me semble soudain ridicule.
— Tu ne regardes même pas ce que j'ai fait ?
Ma voix est plus forte cette fois, teintée d'une pointe de défi. Je lui tends de nouveau la feuille, presque sous son nez, comme si je pouvais le forcer à voir le travail que j'ai accompli. Mais il ne bouge pas, ne cille même pas. Ses yeux se détournent légèrement, se fixant à nouveau sur un point invisible quelque part au-delà de moi.
— Ça ne m'intéresse pas, je sais déjà pourquoi tu as fait ça, réplique-t-il d'un ton plat, presque ennuyé.
Son désintérêt me frappe comme un coup de poing dans l'estomac. Comment peut-il être si désinvolte, si indifférent ? Mes pensées tourbillonnent dans ma tête, un chaos de frustration et de douleur que je ne ressens même pas sur le moment. Comment ose-t-il balayer ainsi tout mon travail d'un revers de main, sans même prendre le temps de le considérer ? Quelque chose monte monte en moi, à mon insu, je ne le comprends pas encore mais un feu me brûle de l'intérieur, et menace de tout consumer sur son passage.
Je l'interroge du regard. mes sourcils se froncent, mes lèvres se pressent en une fine ligne. Je n'ai pas besoin de parler pour exprimer mon incompréhension, mon désarroi. C'est comme si mes pensées, mes émotions se déversaient silencieusement à travers mes yeux, cherchant à briser la barrière de son insensibilité et de la mienne. Mais Remy, comme toujours, reste imperturbable.
— Tu as fait ça pour me devancer et faire les choses à ta manière, dit-il en soupirant légèrement, comme s'il énonçait une évidence. Je sais sans le regarder que tu as associé nos deux idées pour trouver un compromis. Mais mes idées t'intéressent autant que tes idées m'intéressent. C'est bien tenté mais on réfléchira ensemble.
Ses paroles, bien qu'étonnamment perceptives, me déconcertent. Comment peut-il voir si clair à travers mes intentions, deviner mes pensées avec une telle précision ? Je me sens soudain exposée, vulnérable, comme si mes stratagèmes, mes manœuvres avaient été mis à nu, réduits en poussière. Mon esprit s'embrouille, incapable de comprendre comment il a pu voir à travers moi avec une telle facilité.
— Mais comment tu peux savoir ?
Je pose cette question d'une voix plus douce, tremblante malgré moi. Une question qui semble autant s'adresser à moi-même qu'à lui. Mes mains se resserrent nerveusement autour de la feuille que je tiens, mes doigts sont crispés sur le papier comme si je pouvais y trouver un soutien, un réconfort. Mais il ne me répond pas immédiatement. Il hausse les épaules avec nonchalance, un geste si simple, si dénué d'effort, qu'il en devient presque cruel. Ses yeux bleus continuent de fixer un point dans le vide derrière moi, comme si ce que je disais n'avait aucune importance, comme si j'étais invisible.
Dans un élan de frustration désespérée, je roule la feuille en boule, mes gestes fébriles trahissant l'intensité de mon émotion silencieuse en moi. Chaque froissement du papier résonne dans l'air comme un cri étouffé, le cri de la frustration, et du désespoir qui sont là, en moi, mais qui me semblent inatteignables. Et avant même que je ne puisse réfléchir, avant que je ne puisse me retenir, je lui jette la boule de papier en plein visage. Le papier touche sa peau, mais il ne réagit pas, il s'y attendait.
— Je savais que ça ne servirait à rien, je hurle, ma voix éclatant dans la pièce comme un coup de tonnerre.
La fureur dans ma voix me surprend presque autant que lui. C'est comme si toutes les frustrations accumulées, tous les ressentiments que j'ai refoulés au cours de ces dernières semaines explosaient en un instant. Mais lui, Remy, reste de marbre. Ses traits ne se contractent pas, il ne bouge même pas d'un pouce, absorbant ma colère avec une impassibilité déconcertante. Comme s'il savait...
Je sens une vague de larmes monter sans savoir quelle est l'émotion qui les provoque, alors je les repousse farouchement. Je refuse de pleurer devant lui, de montrer cette faiblesse. La colère, je le comprends maintenant qu'il est trop tard, cette furie brûlante, est la seule chose qui me maintient debout à cet instant, la seule chose qui me permet de ne pas m'effondrer sous le poids de cette humiliation. Je sais déjà que mon emportement est ridicule, que ça ne sert à rien. Et je me déteste à cet instant, comme à tous les instants où je repense à ces crises absurdes.
Je tourne les talons sans un mot de plus, le cœur battant à tout rompre, comme si je fuyais un danger imminent : moi-même. Mon corps se meut presque automatiquement, chaque pas me rapprochant de la sortie avec une détermination farouche. Et puis, je sors en claquant la porte derrière moi, un geste lourd de sens, une tentative désespérée de déloger ces choses qui s'agitent en moi.
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Salutations choupissons ! 🦔
Un salaud ou pas le Remy ? Et Liv, elle n'aurait pas un peu abusé ? Dites-moi tout, je veux savoir tout ce que vous pensez. ✨
La suite est prête, elle n'attend que samedi prochain 13h30, vos votes et retours sur ce chapitre pour pointer le bout de son nez !
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Sans états d'âme
RomanceOlivia a quitté la France pour faire ses études aux Etats-Unis. Lorsqu'elle se voit dans l'obligation de travailler avec le seul mec solitaire, inexpressif et impénétrable de sa promo, elle remet en question tout de son plus lourd fardeau. Elle qui...