1. Le Parisien

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De l'obscurité jaillit soudain la lumière. Une lumière aveuglante et désagréable, le genre de lumière qui vous donne la migraine pour toute la journée.

J'ouvre les yeux et émerge doucement d'un lourd sommeil. Cela faisait si longtemps que je n'avais pas aussi bien dormi, mes nuits étant régulièrement secouées par des cauchemars, réveils intempestifs et insomnies. Puis je comprends alors : il fait jour et il n'est pas normal que je me réveille, un matin de cours en plein hiver, à cause de la lumière du soleil qui m'atterrit en plein dans les yeux. Ladite lumière, crue, perce à travers les rideaux fins, dessinant des motifs lumineux sur les murs de ma chambre. Je fais un bon dans mon lit et un grognement se fait entendre. Merde ! J'avais oublié ce gars rencontré au bar hier qui est resté dormir après une longue soirée .

Je jette un coup d'œil autour de moi, la chambre est en désordre, des vêtements éparpillés un peu partout, le souvenir d'une soirée arrosée gravée dans ma mémoire - la seule de la soirée à être restée sobre - je me maudis d'avoir écouté Jenni. Le gars en question est affalé sur le lit à côté de moi, une couverture en boule à ses pieds, respirant lourdement. Sa veste en cuir est jetée négligemment sur une chaise, et ses vans sales traînent au milieu de la pièce, j'avais toujours eu en horreur la vue d'un tel désordre.

...

La veille, tous les étudiants de mon école de photographie avaient reçu le bulletin de validation du premier semestre, avec des amis, nous avions donc décidé de fêter ça en allant au bar puis en boîte de nuit, au diable les cours du lendemain. L'école était un peu excentrée et se trouvait à 10 minutes en voiture du centre-ville. Nous étions donc partis dans le centre avec ma vieille Fiat Punto sous un froid glacial, sans chauffage, pour nous réjouir de cette réussite. Un seul de mes amis n'avait malheureusement pas obtenu la validation à cause d'absences trop nombreuses et de travaux non-rendus. Mais il était tout de même venu pour noyer son chagrin en notre compagnie. C'était surtout une excuse pour passer du temps avec nous.

La route jusqu'au centre-ville avait été une aventure en soi. Tandis que Benjamin sur la place passager prenait un malin plaisir d'actionner les essuie-glaces, me dérégler les rétroviseurs ou encore actionner la ventilation dysfonctionnelle à fond les ballons, le vent sifflait à travers les joints usés des vitres, et nous étions tous emmitouflés dans nos manteaux, tentant de nous réchauffer avec des rires et des anecdotes sur nos formateurs. La vieille Punto, fidèle mais capricieuse, protestait à chaque virage, les pneus crissant sur l'asphalte gelé. Arrivée sur place, toute la tribu sortit à la hâte de mon bolide rouge.

- Allez-y sans moi, je vous rejoins, criai-je en vain alors que Fred venait de claquer la dernière portière et s'était déjà retourné pour rejoindre les autres.

Benjamin, avec son éternel bonnet rouge vissé sur la tête et son écharpe tricotée par sa grand-mère, était celui qui n'avait pas obtenu la validation pour son semestre. Il menait toujours le groupe avec son énergie débordante et il était déjà en train de discuter avec un groupe d'étudiants à l'entrée du bar, les éclats de rire se faisant entendre jusqu'à mes oreilles.

Je poussai un soupir et composai, de tête, le numéro de téléphone de ma meilleure amie. C'était un talent que j'avais de retenir les numéros de téléphone et plaques d'immatriculation sans chercher à les mémoriser. Parfois utile, mais plutôt rarement.

- Allô ? lança une petite voix endormie à l'autre bout du fil.

- Salut Jenn, ça te dirait de sortir ce soir ?

Sans états d'âmeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant