Les Délurées - Tome 2

Chapitre 13

Math

Assise sur une banquette de lit, face aux barreaux de la cage dans laquelle je suis maintenant en garde à vue, je ressasse notre entrevue avec Emery. Il n'aura pas eu à me tirer les verres du nez. J'ai tout avoué. Sauf la partie où j'ai « craqué » pour Hamel. J'ai mentionné une simple dispute qui m'a poussé à partir et à rentrer par mes propres moyens. Après ma déposition, Emery n'a pas eu le choix et doit maintenant me garder ici jusqu'à la décision du procureur : celle de m'envoyer devant le tribunal correctionnel ou de m'accorder un sursis contre mon témoignage qui permettra d'envoyer Hamel en prison.

Ma volonté de prise de risque aura eu raison de moi. Ma mère aurait honte de moi. J'ai honte de moi. Noyée dans mes pensées noires, je n'entends pas tout de suite la voix d'Alex retentir depuis le couloir qui mène à ma « chambre ».

-Espèce de mal propre, quand l'IGPN apprendra ça, vous pourrez dire adieu à votre poste !

Mon cœur s'emballe lorsque je vois sa silhouette s'approcher d'un pas furibond, un des gardiens sur ses talons, l'air agacé. Le type, qui répond au nom de Georges pour l'avoir entendu de la bouche d'Emery, s'empresse d'ouvrir la porte de ma cellule de gestes peu assurés puis je me jette alors dans les bras de mon avocate et acolyte.

Ma tête calée dans son cou, Alex me serre contre elle, comme si elle voulait me délester un peu du poids qui m'écrase la poitrine. La voir venir à ma rescousse m'emplit d'espoir. A peine l'avais-je appelée qu'elle se mettait déjà en route pour venir me retrouver dans ce trou à rat. Après tout, elle est ce qui se rapproche le plus de ma mère. Elle nous a toutes adoptées et ne nous laissera jamais tomber, peu importe les circonstances.

-Tu vas me sortir de là, pas vrai ?

-Meuh voui ma biche, et au plus vite.

Je finis par me détacher d'elle puis nous nous asseyons sur mon lit.

-Allez, dis-moi tout !

Je prends une longue inspiration avant de m'exécuter. Je lui raconte alors tout : l'arrestation de mon frère, les menaces de son chef, ma mission pour rembourser sa dette puis mon arrestation.

Alex m'écoute, sans m'interrompre, sans me juger avant de finalement conclure tout en faisant les cent pas devant moi:

-Quel idiot... il s'est cru malin mais il a fait exactement ce qu'il fallait : en te traitant comme il l'a fait et en te dénonçant, il t'a incité à te retourner contre lui. Et puis il t'a fait chanter et manipulée jusqu'à ce que tu commettes un crime. Avec ça, la justice ne pourra pas te blâmer.

A ses mots, mon ventre se desserre largement. Alex ne me donnerait pas de faux espoirs. J'ai confiance en son jugement et en son professionnalisme. Si elle estime que j'ai toutes mes chances, alors je la crois.

-Tiens le coup, Math. Ce n'est plus qu'une question d'heures.

Je hoche la tête puis je me décide à lui poser la question qui me taraudait.

-Et l'agresseur de Tinder, alors ?

-Pfou, il n'aura pas fait long feu, même pas cinq minutes après avoir retrouvé Yna au bar, il plongeait son poison dans son verre. On a tout filmé et Dumier est tout de suite intervenu. Ils ont fait tester le verre, qui était positif. Il est en comparution à l'heure qu'il est.

A ces nouvelles, une vague de fierté m'envahit. Elles auront réussi, l'agresseur de Tinder n'est plus.

-ça va aller ?

Je hoche la tête en lui esquissant un sourire puis elle me sert une nouvelle fois dans ses bras.

On entend alors la porte s'ouvrir et je suis surprise de voir Diane entrer à son tour dans ma cellule.

-Une par une les visites, maugréé Georges.

Alex me lance un dernier sourire avant de faire un bisou express à Diane qui s'avance vers moi, toute essoufflée et les joues rosis par le froid, ou l'effort, je ne sais pas trop.