Math
-J'ai fait aussi vite que j'ai pu ! Ton frère m'a racontée, mon dieu, tu me fais peur Math !
De la voir aussi paniquée et emmitouflée dans sa doudoune me ferait presque sourire.
-J'ai dit à Zak de te faire libérer illico macias ! Il est en train de parler à l'inspecteur Emery à l'heure qu'il est. Après ça, il a intérêt à te libérer !
Je me rassois sur mon lit-banc, dépitée mais rassurée que le chéri policier de ma meilleure amie soit venu pour appuyer ma déposition.
-Non mais franchement, comment ce type a pu te forcer à transporter de la drogue et ensuite te faire porter le chapeau, non mais quel culot ! Si je le trouve en face de moi, je la lui fais bouffer, moi, sa came...
J'écoute Diane rouspéter, un sourire en coin. Un an auparavant, nous étions toutes les deux en garde à vue pour avoir graffé le bâtiment d'Halston. C'était sa première confrontation avec la police quand moi, j'en étais à ma troisième ou quatrième, je ne sais plus. Elle paniquait et bafouillait face à Zak, alors chargé de nous interroger, ou alors était-ce dû au fait qu'elle était en plein crush ? Je ne saurai dire avec certitude. Ce qui est certain, c'est que depuis qu'elle en a fait son homme, elle a rudement pris confiance en elle.
Je me remémore lorsqu'elle m'a annoncé sa maladie* il y a 10 ans de cela. Pour une raison qui m'échappe encore, c'est à ce moment-là que j'ai retrouvé goût à la vie alors que je sombrais un peu plus dans l'enfer.
...
Septembre 2014
Cela va faire une semaine que je suis effondrée dans mon lit. Je ne peux pas croire qu'elle soit partie. Je ne peux pas admettre que je ne la reverrai plus. Ma maman... ma petite maman...
Les larmes affluent mes joues tandis que je cède à de nouveaux sanglots. Je ne parviens pas à me défaire de l'image de mon père qui m'a annoncé son décès. La voix chevrotante, les yeux rougis par le chagrin: "ta maman est morte. Je suis désolé."
Ses mots résonnent encore en moi comme une torture et me crève le ventre à n'en plus pouvoir respirer. Elle ne peut pas être morte. Non, elle était invincible. Elle, si forte et si courageuse, personne n'aurait pu l'atteindre, pas même ce putain de terroriste qui l'a prise pour cible, elle et ses collègues gendarmes.
Mon père a passé des jours et des nuits à tenter de nous relever mon frère et moi. Si son fils s'est réfugié dans la drogue, moi, je me meurs. Ma mère était mon héroïne, mon modèle. C'est elle qui m'a appris tout ce que je sais aujourd'hui, elle qui a fait de moi la femme qui n'a peur de rien, la femme altruiste et persévérante que je suis. J'ai toujours voulu prendre exemple sur elle et lui ressembler. Maintenant qu'elle n'est plus là, j'ai l'impression qu'on m'a arraché une partie de moi.
Je n'ai pas pu sortir de mon lit de la journée et tandis que je m'enlise un peu plus dans la douleur, j'entends des coups frapper à ma fenêtre. Comme ils se font de plus en plus insistants, je me fais violence pour lever la tête. Et c'est là que je la vois. Diane, ma meilleure amie. Je ne l'ai pas vue depuis le décès de Maman. Papa m'a dit qu'elle cherchait à me voir mais je n'en ai pas eu la force.
-Math, ouvre-moi!
Comment a-t-elle fait pour grimper jusque-là? Il pleut des cordes et si je ne me décide pas à lui ouvrir, elle finira trempée jusqu'aux os. Le corps engourdi, le cœur encore lourd, je me redresse et essuie mes larmes avant de la faire entrer. Je vois alors qu'elle a placé l'échelle depuis la terrasse jusqu'à chez moi. Pourquoi n'a-t-elle pas sonné?
Diane escalade ma fenêtre et entre, toute essoufflée.
-Il fallait que je te vois...
Je referme la fenêtre et me rassois sur mon lit.
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Les Délurées - Tome 2
HumorPlongez dans les aventures rocambolesques des Délurées, un groupe de féministes prêtes à tout pour réclamer justice et faire tomber les phallocrates les plus récalcitrants de leur chère ville rennaise. Dans ce deuxième tome, Mathilde Millet, la fer...