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Alex... C'est bien lui... J'en suis sûr...

Ses longs cheveux bouclés et ébouriffés, ce regard a la fois rustre et tendre, la manière dont mon cœur s'emballe alors que nos regards ne se quittent plus, perdus dans le temps. Les larmes me montent aux yeux, je ne sais plus quoi dire tellement l'émotion me brouille la pensée, j'ai juste envie de lui sauter dans les bras. Mais il me stoppe dans mon élan en posant son index sur ses lèvres masquées. Il jette un coup d'œil vers les autres, mais ils sont trop occupés à s'extasier autour du bébé, pour ne serait-ce que faire attention à nous. Il me chuchote alors discrètement à l'oreille.

- Ne dis rien à personne et retrouve moi ici quand tout le monde sera endormis

Il ne me laisse même pas le temps de réaction et tire deux fois sur la corde qui le relie a l'hélicoptère, et il se fait aussitôt remonter. Une insupportable douleur m'assèche la gorge alors qu'il me quitte encore. Ca me rappelle de mauvais souvenir, quand il venait passer la nuit et disparaissait à l'aube, sans aucune garantie de son retour. J'ai envie de pleurer, de lui hurler de revenir, mais aucun son ne sort de ma bouche. C'est un supplice de voir cet hélicoptère s'éloigner et disparaitre de mon champ de vision. Je me console en me disant que pour une fois, il a dit qu'il reviendrait. Mais pourquoi ? Pourquoi ne pas rester une bonne fois ? N'était-il pas heureux de me voir ? Et pourquoi ne veut-il pas que j'en parle aux filles ?

Tant de questions qui me tourmentent et me tourmenterons encore le reste de la journée. Une bien longue journée au cours de laquelle j'aurais compté les minutes qui me séparent de mon escapade nocturne. Mais est ce qu'il viendra vraiment ? Et puis d'ailleurs, qu'est ce qu'il faisait ici dans un premier temps ? S'il nous a rapporté l'enfant, c'est qu'il était avec Stephen. Il travaillerait avec Stephen ? Non, je serais plus logique qu'il travaille pour lui ? S'il travaille pour lui, c'est qu'il ne fait rien de très légale ni moral. Est-ce pour cette raison qu'il a toujours refusé de me dire en quoi consistaient ses « missions » ? Oh Alex... Qu'est-ce que tu as fait ?

Finalement, la nuit glaciale se décide à tomber. Les enfants sont couchés, les filles dans leurs chambres respectives, mais je décide de prendre mon mal en patience, une heure de plus, pour être sur que tout le monde soit bien endormi. Pendant ce temps, les questions se bousculent dans ma tête ; la joie, l'angoisse et appréhension me font trembler d'impatience, je n'arrive même pas à tenir sur place. Je finis donc par enfiler mon manteau par-dessus mon pyjama, avant de sortir de ma chambre le plus silencieusement possible. Toute la maison est plongée dans le noir, à cette heure, même les domestiques doivent avoir finis leur travaille.

Je descends les escaliers en essayant de ne pas courir et me dirige vers la porte d'entrée. En ouvrant la porte, un vent glacial me frappe le visage et je me retrouve les pantoufles dans le givre, mais je n'ose pas faire demi-tour pour changer de chaussures. J'avance donc dans la neige craquante sous les pieds, le vent dans les cheveux, les mains et le corps engouffrés dans le manteau, direction l'arrière-cour. Je me sens comme ces adolescentes dans les films, s'échappant discrètement par la fenêtre pour aller retrouver leur amoureux par une nuit enneigée. Cette pensée me fait lâcher un petit sourire.

Quoi qu'il en soit, j'arrive au lieu de rendez-vous, mais il n'y a personne à l'horizon, pas même un chat. Suis-je arrivée trop tôt ? Ou bien il ne viendra juste pas ? Mais alors que je commençais à perdre espoir, quelqu'un me siffle un peu plus loin. Le sifflement vient de là-bas, dans l'obscurité, vers la buanderie. J'hésite un instant, mais décide d'aller voir, par curiosité. Je m'approche lentement et reste sur mes gardes, par méfiance. Mais à peine ai-je atteint la porte, qu'une main me tire brusquement a l'intérieur avant de refermer la porte derrière moi. Il se retourne ensuite vers moi et ne se fait pas prier avant d'écraser ses lèvres froides contre les miennes.

Cette odeur de noisette, la douceur de ses lèvres pulpeuses, cette chaire de poule qui me vient quand il me touche. Malgré l'obscurité de la pièce, mon corps reconnait vite à qui il a affaire. J'enroule mes bras autour de son cou alors qu'il me soulève par les fesses et me pose sur une machine pour savourer notre étreinte. J'ai l'impression que mon cœur va exploser de joie, je n'arrive pas à me détacher de lui et me sent comme la première fois, comme avant. Finalement, après un long moment à se délecter fougueusement de savoureux baisers, on se sépare à bout de souffle. Il prend mes mains et les posent sur son visage avant de prendre une grande inspiration a l'intérieur.

- Ton odeur m'a manqué, ta peau m'a manqué... Tu m'as manqué...

Nos regards restent plongés l'un dans l'autre pendant un moment. Puis il fronce soudainement les sourcils.

- Qu'est-ce que tu fais là?

Je me fige un instant, ne sachant pas comment répondre. Mais la tonne de questions qui me tourmentait depuis, a simplement fait surface, avec une pointe de frustration.

- Toi qu'est-ce que tu fais là? Tu travailles pour Stephen c'est ça? C'est comme ça que tu comptais nous faire sortir de ce village?

- Mais je vois que tu as trouvé un moyen plus efficace...

Il soulève ma main gauche pour montrer ironiquement ma bague de mariage, mais je retire rapidement ma main et le ton de cette discussion monte vite.

- Oui, je l'ai épousé pour quitter cet endroit

- Est-ce que tu sais au moins avec qui tu t'es pressé de te marier?

- Ah! J'ai été avec toi pendant tellement d'années et ce n'est que maintenant que j'apprends ce que tu fais dans la vie. Lui au moins il a fini par être honnête avec moi!

- Je suis prêt à parier qu'il n'a pas été totalement honnête avec toi

- Tu vas continuer à parler de lui pour ne pas admettre tes erreurs !?

- PARCE QUE TOUT EST DE SA FAUTE !

Je sursaute sur place face à la hausse de sa voix. Depuis que l'on se connait, malgré toutes ces disputes, c'est la première fois qu'il me crie dessus. Une part de moi se sent offensé, mais je le connais assez pour savoir qu'il ne se mettrait pas dans cet état sans raison valable. Qu'est-ce que Stephen vient faire là-dedans ? Voyant que je le fixe avec un mélange de peur et d'incompréhension, il prend une grande inspiration pour se calmer et baisse la tête avant de s'expliquer.

- Peu de temps avant que je ne commence ce travail, j'ai surpris une conversation entre ton cher mari et Carlos. Les propos de cette conversation ne laissaient aucuns doutes... Carlos n'est en fait qu'un larbin, le vrai boss c'est Stephen... Il commande Carlos et toute sa bande... IL est le vrai responsable de ce carnage ! Il a ordonné le bain de sang dans notre village, simplement pour conquérir nos terres et nous obliger à être dociles...

- Tu mens...

Je ne peux pas croire ce que j'entends... Ca ne peut pas être vrai... Il n'aurait jamais fait ça... Pourquoi il ferait ca... Pourquoi il me ferait ca... C'est vrai que c'est un mafieux mais... C'est impossible...

J'ai l'impression que mon cœur pèse dans ma poitrine, les vertiges et la nausée m'embrouillent encore plus l'esprit. Je pousse Alex pour me relever, en essayant de ne pas vomir. Je n'arrive simplement pas à digérer ce que je viens d'entendre.

- May...

- Tu mens !

De grosses larmes quittent mes yeux alors que j'ai l'impression que la pièce autour de moi tourne sans cesse. Une incompréhensible colère monte en moi, une colère que je ne sais même pas vers qui rediriger.

- Et même si c'est vrai, ça n'a pas de sens ! Tu veux me dire que tu travailles pour l'homme qui aurait causé la mort de nos parents !?

- En réalité, je suis sous couverture, je travaille pour INTERPOL. J'ai infiltré l'organisation de Stephen pour fournir des informations à la police, pour qu'ils le coincent, mais c'est plus compliqué que prévu et ça prend beaucoup de temps... Cet homme est vraiment puissant... May, tu vas bien ?

Le paysage tourne de plus en plus vite autour de moi, je n'arrive presque plus à tenir sur mes jambes, la nausée m'empêche de bien respirer, et un mal de crane pénible raisonne comme des cloches dans ma tête. Très vite, ma vue se floute avant de s'obscurcir subitement. Je ne sens plus mon corps...

HostageOù les histoires vivent. Découvrez maintenant