Chapitre 12:Ukyo

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Ma première pensée à mon réveil se dirigea irrémédiablement vers le blond. Je peinais encore à croire ce qui s'était passé la veille. Je sens mon cœur s'accélérer rien que d'y penser. Jamais je n'aurai pu imaginer que des sentiments aussi pur puisse naître dans cette chambre. Je me rappelle de ses mots, de la façon dont il m'a regardé, sans détour, avec cette détermination qui le caractérise. Et puis... ce baiser. Si doux, si tendre, mais chargé d'une force que je n'avais jamais ressentie auparavant. Une part de moi avait eu peur que ce ne soit qu'un rêve, mais à cet instant, tout semble trop réel, trop sincère pour n'être qu'une illusion.
Mes doigts effleurent mes lèvres presque machinalement, là où les siennes avaient été. Un mélange de bonheur et de peur me traverse. Hier, j'ai laissé tomber toutes mes barrières. J'ai ouvert mon cœur à Ryusui, et même si ça m'a terrifié, une partie de moi se sent soulagée, comme si j'avais porté un poids trop lourd pendant trop longtemps. Mais maintenant que je lui ai avoué ce que je ressens, la réalité de notre situation me revient. Je l'aime, c'est certain. Mais à quel prix ?

J'ai toujours su que ma santé était précaire, que mes jours étaient comptés. Et c'est bien là le problème. Je ne peux m'empêcher de penser que je vais lui faire du mal. Que, tôt ou tard, je vais devoir le laisser seul avec cette douleur. Ryusui mérite de vivre pleinement, de parcourir le monde et de suivre ses rêves. Mais en acceptant mon amour, est-ce que je ne suis pas en train de l'enchaîner à une souffrance inévitable ?
Je secoue la tête pour chasser ces pensées sombres. Hier, il m'a dit qu'il était prêt à tout, qu'il ne fuyait jamais les défis, même celui de m'aimer. Ses paroles résonnent encore en moi, et pour la première fois, je me permets d'y croire. Peut-être qu'il a raison. Peut-être qu'il vaut mieux vivre cet amour, même si sa durée est incertaine, plutôt que de le fuir par peur de l'avenir.

Mes pensées sont interrompues par un léger coup frappé à la porte. Mon cœur fait un bond dans ma poitrine. C'est sûrement lui. Ma main se serre un instant autour de la couverture, une nervosité soudaine me gagnant, mais je me ressaisis vite.

- Entre.

La porte s'ouvre doucement, et je le vois. Ryusui. Il est là, avec ce sourire confiant qui lui est si naturel, et pourtant, je remarque une tendresse dans ses yeux qui m'émeut plus que je ne veux bien l'admettre. Il s'approche de moi, et je ne peux m'empêcher de sourire à mon tour. Le voir me fait du bien, comme si toute la peur que j'avais pu ressentir en me réveillant se dissipait immédiatement.

-Bonjour, Ukyo, dit-il avec une douceur que je ne lui connaissais pas vraiment.
-Bonjour, Ryusui.

Je tends instinctivement la main vers lui, et lorsqu'il attrape mes doigts, une vague de chaleur m'envahit. Hier encore, je n'aurais jamais osé faire un tel geste. Mais maintenant, il semble naturel de le faire, comme si nos mains avaient toujours été destinées à se rejoindre.
Il s'assoit près de moi, et je sens immédiatement la tranquillité qu'il m'apporte. Pourtant, un léger malaise persiste. Je ne sais pas pourquoi, mais je suis toujours hanté par cette peur sourde, celle de lui imposer une douleur que je ne souhaite à personne. Et lui, comme s'il lisait dans mes pensées, me fixe avec intensité.

- Tu as bien dormi ? Me demande-t-il d'un ton léger, presque taquin.

Je ris doucement. J'aime cette manière qu'il a de rendre les choses plus simples, de dédramatiser chaque situation.

-J'ai dormi, mais... je n'ai pas cessé de penser à toi.

Mes joues chauffent légèrement en disant ces mots, une gêne familière qui revient. Mais il sourit, un sourire qui fait battre mon cœur plus vite.

-Moi aussi. J'avais hâte de te revoir.

Je baisse les yeux, un peu troublé par cette franchise désarmante. Comment peut-il être aussi direct, aussi sûr de lui alors que je suis encore en train de me battre avec mes propres craintes ? Je me redresse lentement, l'esprit encore embrumé par mon récent éveil, et vient encadrer son visage avec mes mains.

-Ryusui...quoi qu'il arrive je veux que tu continue à vivre.

Il me fixe, ses yeux emplis d'une intensité que je peine à soutenir. Je sais que ces mots vont le blesser, mais c'est la vérité. Je ne peux pas lui promettre un futur incertain. Tout ce que je peux lui offrir, c'est ce présent, fragile et beau.
Il attrape doucement mes poignets et les abaisse, sans jamais rompre le contact de son regard. Il semble chercher ses mots, mais quand il parle enfin, sa voix est calme, posée.

-Ukyo, arrête. Ne parle pas comme ça, s'il te plaît. Je comprends tes peurs, vraiment. Mais je refuse de te laisser te condamner à un destin que tu n'as même pas encore affronté.

Je sens une boule se former dans ma gorge. Il est tellement convaincu, tellement sûr de lui. Comment peut-il être si fort face à ce qui nous attend ? Je détourne les yeux, mais il lâche un de mes poignets pour prendre mon menton et me forcer doucement à le regarder.

-Écoute-moi, Ukyo, reprend-il avec plus de douceur, je t'aime. Peu importe combien de temps nous avons. Ce qui compte, c'est ce qu'on vit maintenant. Tu comprends ? Je ne veux pas d'une vie sans toi, même si ça doit me faire souffrir plus tard. Je préfère mille fois vivre ces moments avec toi que de me priver de ce bonheur par peur de ce qui pourrait arriver. N'oublie jamais que je suis l'homme le plus avide du monde! Achève-t-il avec un grand sourire.

Je ne peux m'empêcher de glousser, les yeux brillants. Et cette fois, c'est moi qui rompt la distance. Je me penche vers lui pour l'embrasser. Ce baiser, bien plus qu'un simple échange, est une promesse silencieuse. Une promesse de vivre pleinement ce que nous avons, sans se laisser ronger par les "et si" et les peurs du lendemain. Ryusui m'attire contre lui, ses bras entourant doucement ma taille. Je peux sentir son cœur battre rapidement, preuve que malgré son assurance apparente, il ressent la même intensité que moi.
Quand nos lèvres se séparent, je reste un instant appuyé contre son front, les yeux fermés, profitant de ce moment de paix. Sa présence me rassure, m'ancre dans le présent, loin des tourments que j'ai l'habitude d'affronter seul. Il caresse doucement mon dos, comme s'il comprenait que j'avais besoin de ce contact pour rester dans l'instant.
He ris doucement, encore un peu secoué par tout ce qui s'est passé depuis hier. Il a cette capacité à rendre tout plus simple, à balayer mes angoisses d'un revers de main avec un naturel désarmant.

- Comment fais-tu pour être aussi sûr de toi ? Je murmure, encore ému.

Il penche légèrement la tête sur le côté, son regard amusé mais rempli de sincérité.

- Je ne suis pas sûr du tout, Ukyo. Mais je suis sûr de toi, sûr de ce qu'on partage. Et ça me suffit. Et puis la vie ne serait pas amusante sans ces incertitudes !

Ces mots, si simples mais porteurs d'une vérité profonde, me frappent en plein cœur. Ryusui, avec son optimisme et son énergie débordante, est prêt à tout pour vivre pleinement. Et moi, avec mes doutes et mes peurs, je réalise que je veux suivre son exemple. Aujourd'hui, j'ai bien l'impression que c'est tout ce qu'il me reste à faire. Tout ce qui me rattache à la vie.

L'étreinte du fil et de la mer.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant