Chapitre :18

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BONNE LECTURE 📖

Les jours s'égrainaient, et la fin du semestre approchait à grands pas. J'avais un sentiment partagé entre l'impatience de retrouver ma famille à Mbour et l'inquiétude grandissante pour mon père. Je savais que dans une semaine, je serais enfin en vacances, ce qui me permettrait de rentrer chez moi et de le voir. Cette pensée me donnait du courage, même si la lourdeur de ses nouvelles continuait de m'accompagner chaque jour.

Ma tante voyait bien mon inquiétude, et même si je faisais de mon mieux pour ne rien montrer, elle tentait toujours de me réconforter. Sa présence chaleureuse m'apportait un soutien dont j'avais cruellement besoin. Elle comprenait ce que je ressentais, étant elle-même très proche de mon père. Souvent, après une longue journée de cours, elle venait s'asseoir à côté de moi, cherchant à apaiser mes pensées en parlant de tout et de rien.

« Amina, ne te laisse pas envahir par l'inquiétude. Tu as toujours été forte, et ton père l'est aussi. Il va se remettre, j'en suis sûre. »

Ces mots avaient le pouvoir de me réconforter, mais malgré tout, ils ne pouvaient totalement dissiper l'angoisse qui grandissait en moi.
En classe, je continuais à faire de mon mieux, malgré l'atmosphère pesante qui régnait autour de moi. Mes notes restaient excellentes, et cela ne passait pas inaperçu. Je savais que mes réussites attiraient des regards, des jugements silencieux, et des tensions que je n'avais pas demandées. Mais plutôt que de laisser ces réactions me perturber, j'essayais de me concentrer sur l'essentiel : mes études et ma famille.

Un soir, alors que je descendais la Corniche pour m'aérer l'esprit, je reçus un message de Mouhamed. Il voulait qu'on se retrouve le lendemain. Notre dernier rendez-vous remontait à plusieurs semaines, et j'étais heureuse à l'idée de passer un moment avec lui, loin de mes préoccupations quotidiennes.

Le lendemain, nous nous donnâmes rendez-vous dans un petit café que nous aimions fréquenter. Mais cette fois, plutôt que de rester enfermé, Mouhamed me proposa de marcher un peu après avoir bu notre thé. Nous longions la Corniche en silence, profitant du bruit des vagues et de la douceur de la brise nocturne.

Mouhamed, qui d'habitude avait toujours un sourire aux lèvres, semblait plus grave ce soir-là. Je sentais qu'il avait quelque chose sur le cœur, et ce silence entre nous me mettait mal à l'aise. Après quelques minutes, il s'arrêta et se tourna vers moi.

« Amina, je suis fier de toi et de tout ce que tu accomplis. Mais... j'ai l'impression que tu me gardes à distance. »

Ses mots tombèrent comme une pierre dans l'eau, créant des remous dans mon esprit. Je le regardai, interloquée. Comment lui expliquer que ce n'était pas volontaire ? Que les événements des dernières semaines – la maladie de mon père, la pression à l'école, et même la jalousie de mes camarades – m'avaient rendue plus fermée, plus silencieuse ?

« Ce n'est pas que je t'écarte, Mouhamed, » dis-je doucement. « C'est juste que beaucoup de choses se passent en ce moment, et je ne sais pas toujours comment les gérer. »

Il hocha la tête, mais je pouvais voir qu'il restait inquiet.

« Si tu ne me parles pas, je ne peux pas t'aider. Je suis là pour toi, Amina. Et je veux que tu me fasses confiance. »

Ses paroles résonnèrent en moi. Je réalisai à quel point j'avais porté le poids de mes soucis seule. En essayant de protéger tout le monde – Mouhamed, ma famille, même moi-même – j'avais fini par m'enfermer dans un silence qui le blessait sans que je m'en rende compte.

« Mon père est malade, Mouhamed, » avouai-je finalement, les mots sortant comme un souffle que je retenais depuis trop longtemps. « Il ne voulait pas que je m'inquiète, mais je sais que son état est sérieux. Et j'ai peur... »

Mouhamed me regarda avec une intensité nouvelle, puis il me prit doucement la main. « Je suis vraiment désolé de l'apprendre, Amina. Mais tu n'as pas à traverser ça toute seule. »

Nous continuâmes à marcher, mais cette fois, son silence était empreint de compréhension et de soutien. Ce moment me permit de prendre du recul, de réaliser que je devais accepter d'être vulnérable. Je n'étais pas obligée de tout affronter seule.

Le lendemain, je me sentis plus légère, comme si un fardeau venait de s'évanouir. À l'école, même si la pression restait présente, je savais que mes vacances approchaient et que bientôt je pourrais rejoindre ma famille. L'idée de revoir mon père me réconfortait, et je m'accrochais à l'espoir que son état s'améliore avant mon arrivée à Mbour.

La semaine passa à une vitesse étonnante, entre les derniers devoirs à rendre et les projets à finaliser. Les discussions avec Idriss, mon partenaire de travail, restaient un moment de répit dans mes journées. Avec lui, je pouvais parler librement de mes inquiétudes professionnelles, sans craindre d'être jugée. Il était l'un des rares à réellement comprendre l'ambition qui m'habitait sans se sentir menacé par elle.

Mais malgré tout, un sentiment étrange persistait. Je savais que mon retour à Mbour serait teinté d'incertitudes, tant concernant mon père que ma propre capacité à trouver un équilibre entre mon avenir à Dakar et ma famille.

Alors que je me préparais à quitter Dakar pour ces vacances bien méritées, je reçus un autre message de Ndeye Daba. Cette fois, ce n'était pas une question concernant Malick, mais un simple mot d'encouragement. « Prends soin de toi, Amina. Et si tu as besoin de parler, je suis là. »

Je réalisai que, malgré nos différences, elle aussi faisait partie des personnes sur qui je pouvais compter, même dans les moments les plus sombres. Peut-être que ce retour à Mbour ne serait pas uniquement une source d'angoisse, mais aussi l'occasion de reconnecter avec ce qui comptait vraiment.

Sous le ciel étoilé de Dakar, je pris un dernier moment pour réfléchir à tout ce qui m'attendait. Les vagues en contrebas me rappelaient que, comme la mer, la vie est faite de cycles : des moments de tempête et des périodes de calme. Il me restait à espérer que la prochaine phase serait plus douce.

Entre Amour& Ambition Où les histoires vivent. Découvrez maintenant