Défie-moi de t'aimer

CHAPITRE 30

Meredith

Comment a-t-il pu me cacher un truc pareil ? Je le déteste ! Je me hais de lui avoir ouvert mon cœur. Il fallait s'y attendre, ma vie n'est qu'une succession d'échec depuis que mon père est parti. J'ai naïvement pensé qu'Ezra avait conjuré le sort qui ne faisait que s'acharner, mais finalement, il y a contribué.

Ça fait exactement deux semaines et trois jours que je ne suis pas sortie de mon lit, ou du moins de celui mon ex qui m'a gracieusement laissé sa chambre pendant qu'il loge chez ses parents.

Jason m'a appelé plusieurs fois et sans aucune réponse de ma part, j'imagine que je dois être sans emploi à l'heure qu'il est. Pourtant, ça me laisse indifférente.

Je serais sûrement morte de faim actuellement si Eli et Érine ne se prenaient pas pour un roomservice. Ils nous ont très vite pardonné notre mensonge en rentrant à Detroit, voyant à quel point chacun de nous était brisé. Je ne doute pas de la souffrance d'Ezra, toutefois je me fiche de savoir ce qu'il ressent. Il m'a trahi, m'a anéanti et prouvé que l'amour ne vaut pas la peine d'être vécu.

Je sombre, je suis apeurée par la noirceur qui grandit en moi, craignant qu'elle ne laisse une trace indélébile. J'ai l'impression de devenir chaque jour un peu plus comme cette femme que je déteste, et cela m'effraie. Elle m'a planté un couteau dans le dos !

Comment peut-on voler sa propre fille et orchestrer sa disparition ? Je suis en train de remettre toute ma vie en cause, toute mon enfance. M'a-t-elle déjà aimée ?

Mon portable vibre pour la énième fois de la journée. Comme chaque jour, Ezra appelle et laisse un message vocal pour s'excuser. Seulement, je ne les écoute plus. Ce disque rayé m'est insupportable à l'oreille. Il aurait dû y songer avant.

Plus les jours passent, plus je me craquelle intérieurement. Il paraît que le temps pense les blessures, pourtant, j'ai l'impression que l'effet inverse se produit. Chaque minute qui défile accentue ma souffrance comme si la douleur était devenue une seconde peau.

Malgré moi, je crois que j'ai aimé cet homme d'un amour inexplicable, je l'aime encore et ça me consume de ne rien pouvoir faire pour arrêter ça.

Quelqu'un toque à la porte de la chambre et n'attend pas que je l'invite pour entrer.

– Coucou beauté, tiens, déclare Érine en posant un plateau avec des œufs, un muffin et de quoi faire des réserves de plusieurs jours sur mon lit. J'ai tout fait maison, sauf le pain.

Je la remercie.

Cette fille, je l'aime sincèrement ! Eli et Érine sont les seules exceptions à ma règle. Leur amour m'est devenu indispensable, je sais au plus profond de moi qu'ils ne me trahiront jamais.

Mon amie s'assoit à mes côtés et passe sa main dans mon dos.

– C'est encore trop tôt pour envisager une discussion avec Ez ?

Je hoche la tête, sans un mot. J'ignore si je serais prête un jour. Je suis incapable de le regarder dans les yeux depuis ses révélations. C'est trop compliqué.

– Il a laissé quelque chose pour toi devant la chambre.

Je me redresse d'un bond.

– Aujourd'hui ? Il est passé ?

– Oui. Il voulait te remettre son cadeau en main propre, mais je lui ai dit que ce n'était pas une bonne idée, alors il vient de partir.

Savoir qu'il était là, tout prêt, à quelques mètres me retourne le cœur.

Mes pas sont lents. Je me déplace presque sur la pointe des pieds, la gorge nouée pour atteindre l'objet qui m'attend derrière la porte. Lorsque mes yeux se posent dessus, je le reconnais instantanément, ce qui ne manque pas de faire couler quelques larmes sur mes joues rougies.