LA SOIRÉE DES ROCKEFELLER

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La soirée organisée en mémoire du père de Lauren, Robert Rockefeller, était attendue avec une certaine solennité par l'élite de la ville. Les invitations avaient été envoyées des semaines à l'avance, et tout le gratin se préparait à rendre hommage à un homme qui, malgré ses magouilles, avait été une figure incontournable de la haute société ainsi que dans la politique . Pour Lauren, cette soirée représentait bien plus qu'un simple hommage ; c'était une confrontation avec son passé, sa famille, et les fantômes qui la hantaient.
Le grand hall de l'hôtel particulier des Rockefeller était somptueusement décoré pour l'occasion. Des chandeliers étincelants illuminaient la salle, où une foule élégamment vêtue se rassemblait peu à peu. La mère de Lauren, impassible comme à son habitude, supervisait tout d'un œil critique malgré leur divorce qui n'as pas pu être prononcé . Elle s'assurait que chaque détail soit parfait, comme si cette soirée pouvait réparer les fractures invisibles qui déchiraient sa famille.
Lauren arriva en retard, vêtue d'une robe noire qui soulignait son élégance naturelle, mais ses yeux trahissaient une fatigue profonde. Depuis la mort de son père, elle avait plongé encore plus profondément dans son travail et dans ses propres démons. L'idée de cette soirée l'avait angoissée, mais elle avait choisi de faire face, même si elle se sentait plus vulnérable que jamais.
Elle n'avait pas bu depuis des jours, se promettant de rester sobre pour cette soirée en hommage à son père. Mais en entrant dans la salle et en voyant les regards pleins de pitié ou de curiosité des invités, une sensation de suffocation l'envahit. Elle se dirigea immédiatement vers le bar, attrapa un verre de champagne et le vida d'un trait.
Alors que la soirée avançait, Lauren remarqua l'arrivée de Nayman et Mentissa. Ils étaient là, ensemble, rayonnants dans leur complicité. Pour Nayman, c'était une soirée délicate, mais il avait décidé de venir par respect pour la mémoire de Robert , et aussi pour soutenir Lauren, malgré leur séparation tumultueuse.
Lauren les observa de loin, son cœur se serrant. Chaque sourire échangé entre eux, chaque regard complice, était comme une aiguille qui se plantait un peu plus dans son cœur. Elle se servit un autre verre de champagne, puis un troisième. La tension en elle ne faisait que grandir, amplifiée par l'alcool qui commençait à embrumer son esprit.
Alors que les invités se regroupaient pour écouter le discours de la mère de Lauren, cette dernière s'avança sur l'estrade, impeccable et froide, comme toujours. Elle parla de son défunt mari avec des mots soigneusement choisis, rendant hommage à l'homme qu'il avait été en public, tout en effleurant à peine les réalités plus sombres de leur vie privée.
C'est à ce moment-là que Lauren, titubant légèrement, fit irruption sur la scène. Le regard désapprobateur de sa mère ne fit que l'encourager davantage. Elle arracha le micro des mains de sa mère, son visage rougi par l'alcool et l'émotion.
« Je crois qu'il est temps de dire la vérité, non ? » commença-t-elle, la voix vacillante mais forte. « Mon père... Mon père n'était pas un homme parfait. Loin de là. Mais cette soirée... Tout ceci n'est qu'une façade, un mensonge. »
Un silence pesant s'installa dans la salle. Les invités, mal à l'aise, échangeaient des regards gênés tandis que Lauren poursuivait, son discours devenant de plus en plus incohérent et teinté de rancœur. « Et vous tous, ici... Vous savez ce qu'il a fait. Vous savez tous ! Mais personne n'a jamais rien dit, n'est-ce pas ? Mon frère Benjamin a supporté ses colères sans rien dire »
Nayman, debout au fond de la salle, serra les poings. Il savait que Lauren traversait une période difficile, mais la voir se donner ainsi en spectacle, se déchirant elle-même en public, était insoutenable. Mentissa posa une main rassurante sur son bras, l'encourageant à ne pas intervenir, mais Nayman ne put se contenir plus longtemps. Il traversa la salle et monta sur scène, attrapant délicatement Lauren par le bras.
« Lauren, ça suffit. » Sa voix était douce mais ferme, un mélange d'inquiétude et de colère. « Ce n'est pas le moment, ni l'endroit. Viens, tu as besoin de te reposer. »
Lauren se tourna vers lui, les yeux embués. « Et qui es-tu pour me dire ce que je dois faire, Nayman ? Tu es avec elle maintenant ! Tu m'as abandonnée ! »
La salle entière retint son souffle, choquée par cette scène. Nayman tenta de garder son calme, bien conscient des regards fixés sur eux. « Lauren, ce n'est pas la peine de faire ça ici. On en parlera plus tard, mais pour l'instant, il faut que tu te calmes. »
Mais Lauren, sous l'emprise de l'alcool et de la douleur, ne l'écoutait plus. Elle se dégagea de son emprise, chancelante. « Tu crois que je ne vois pas clair dans ton jeu ? Toi et Mentissa... Vous n'attendiez que ça, n'est-ce pas ? Que je perde pied, que je m'effondre ! »
Nayman soupira, conscient qu'il n'y avait rien à faire dans l'état où elle se trouvait. Il se tourna vers la mère de Lauren, qui, jusque-là, était restée figée par l'embarras. Mais devant le spectacle que donnait sa fille, elle décida d'intervenir.
« Lauren, assez ! » La voix de sa mère claqua dans l'air, froide et tranchante. Elle descendit de l'estrade et attrapa Lauren par le bras avec une fermeté qui trahissait son irritation. « Tu as assez bu, et tu as assez parlé. Viens avec moi. Tu fais honte à toute la famille »
Lauren, surprise par la dureté du ton de sa mère, hésita un instant avant de la suivre, presque malgré elle. Mais avant de quitter la salle, elle jeta un dernier regard vers Nayman et Mentissa, un regard plein de tristesse et de rancœur.
La mère de Lauren l'entraîna hors de la salle, la serrant fermement pour éviter qu'elle ne fasse un autre esclandre. Une fois à l'écart des regards, elle se tourna vers sa fille, la colère éclatant dans ses yeux.
« Tu es un désastre, Lauren. Comment oses-tu te comporter ainsi devant tous ces gens ? Devant sa mémoire ? »
Lauren, encore sous l'emprise de l'alcool, mais sentant la froideur de sa mère, répondit avec amertume. « Tout ce que je fais, je le fais seule, maman. Tu ne m'as jamais vraiment soutenue, pas même maintenant alors que je suis effondrée . »
Sa mère la toisa avec une froideur implacable. « Parce que tu es faible, Lauren. Ton père aurait honte de toi ce soir. Tu es une Rockefeller bon sang, comporte toi comme telle »
Ces mots, venimeux et cruels, frappèrent Lauren en plein cœur. Elle sentit sa gorge se serrer, mais aucune larme ne vint. Elle se dégagea de l'emprise de sa mère, se redressant tant bien que mal.
« Je n'ai pas besoin de toi, » souffla-t-elle avant de s'éloigner, laissant sa mère seule, la mâchoire crispée de colère.
Lauren sortit de l'hôtel, titubant dans la fraîcheur de la nuit, son esprit embrouillé par l'alcool et la douleur. Elle savait qu'elle avait touché le fond ce soir-là, qu'elle s'était humiliée devant tout le monde, mais au fond d'elle, une voix lui disait que ce moment était peut-être le début de quelque chose de nouveau. Peut-être que, dans cet éclat de colère et de désespoir, elle avait enfin commencé à se libérer des chaînes qui l'avaient si longtemps emprisonnée.

FOLLE DE DÉSIR TOME 3 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant