1.2 La Haute

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Aucun mur ne retient cet endroit, seul un haut plafond agrémenté de moulures délicates protège la salle des intempéries. Une odeur de pluie, cette fragrance qu'on appelle le petrichor, flotte dans l'air, comme si le château, perché presque dans les nuages, pouvait s'imprégner de l'humidité ambiante même sans pluie

Des chandeliers en cristal pendent du plafond, projetant des lumières scintillantes qui dansent sur les murs ornés de motifs dorés. Les pylônes en pierre, gracieusement sculptés avec des figures légendaires, forment des ombres élégantes sur l'allée. Une longue table garnie de mets raffinés attire les invités. Des serveurs en livrée s'affairent à distribuer des boissons entre les groupes en pleine discussion. Des gardes en armure surveillent les portes, tandis qu'au-dessus d'eux, des drapeaux majestueux flottent, portant l'emblème De l'Empire d'Handore : un nuage obscur d'où jaillissent des éclairs destructeurs.

Il y a une centaine de personnes habillées dans l'excès. Une dame orne une dizaine de colliers, elle peut à peine bouger sa tête. Une autre porte des échasses à la place de talons, créant une silhouette presque comique. Mon oncle, vêtu d'un costume blanc, discute avec mon père. Je reste à quelques mètres pour ne pas les déranger ou entendre des informations qui ne me concernent pas. Pourtant, je sais que mon père m'avait demandé de me faire remarquer, de jouer le jeu pour attirer l'attention sur nous. Mais dans cette foule, l'idée même de me distinguer me terrifie.

Freus est resté dans le pavillon. Il se prépare à dérober le parchemin d'Egalion. Dans celui-ci, il y a des éléments qui indiquent un emplacement. La légende de ce parchemin raconte qu'un puissant artefact créé par la Déesse déchue y serait caché. Comme je n'appartiens pas au clan, j'ai eu ces informations grâce à une petite enquête qui m'a poussée à écouter aux portes.

Une troupe de troubadours arrive en trombe dans la salle. Les invités les écoutent jouer et rient de leur spectacle, leurs rires résonnant comme des éclats de musique. L'empereur Lodrum aime préparer des fêtes et montrer ses richesses. C'est la première fois que j'assiste à un banquet. Les styles sont fantasmagorique. La mode de la Haute me dépasse. Même le groupe de musiciens paraît normal à côté d'eux. Ils ressemblent à une troupe de cirques avec tous ces maquillages, femmes et hommes compris. Ceux portant des habits plus sobres ont l'air sérieux, importants.

La musique qui s'élève ici est loin de ressembler à celle d'Antyk ; les instruments à vent dominent, créant une harmonie aérienne qui me transporte.

— Nélya, reste à côté de moi. Il y a beaucoup de mages membres de la Haute. Certains s'immiscent dans les pensées.

Sitôt, Trane bloque l'accès à mon esprit. Je ressens alors un léger pincement dans mon crâne. Malgré leur loufoque apparence, derrière leur masque se cachent des âmes menaçantes.

— Allons saluer le roi et l'empereur.

Nous traversons la salle et nous faufilons entre les personnes. Là, je distingue parmi la foule une couronne argentée, luisant sous les chandelles. C'est l'empereur, il discute avec un homme chauve et à la peau fripée.

— Il parle avec Filipus Spectrum, m'informe mon père.

D'un coup, ce vieil homme nous regarde. Il nous a entendus ? À cette distance ? Je n'avais jamais vu quelqu'un d'aussi terrifiant. Une mauvaise énergie émane de lui, écrasant celle de Lodrum. Nous appliquons une révérence, et l'empereur nous demande de nous relever.

— La famille Alliser sort de son terroir ! s'exclame Lodrum avec un grand sourire.

Lodrum est rondouillet, avare et cruel. Il aime le paraître. Cela se ressent dans la décoration extravagante, avec des tentures de velours rouge et or, l'accoutrement des invités et la garniture des entremets soigneusement disposés.

Sanvisage ~ Le PourfendeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant