7.2 Serpidote

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     PDV Korzan

          Nous avons passé la journée à glisser sur les dunes de sables. C'était la première fois que j'en faisais. Et j'ai adoré. Nous avons tellement ri que j'en avais mal aux côtes. Malgré la chaleur, la vitesse de la descente nous rafraîchissait. À l'inverse, grimper au sommet, sous cette lourde chaleur, nous épuisait.

À présent rentrer, nous sommes étalés dans le hall. Assis au bord de la rivière souterraine, je respire un air doux et frais.

Nélya me raconte ses quatre cents coups avec ses amis d'enfance, Sehva et Yaldoh. J'écoute et ris de ses anecdotes. Celle que j'apprécie le plus et celle où ils faisaient de la luge. Ils allaient tellement vite qu'ils n'arrivaient pas à freiner. Alors, ils ont foncé dans le bâtiment qui se trouvait en face de la dune. C'était un magasin, les rayons sont tombés en domino après le choc de l'altercation. Le propriétaire les a chassés avec un balai et ils sont partis en courant tout en riant.

- Korzan. As-tu des souvenirs de ton enfance ?

Sa question me coupe de court.

Mon enfance ? Ai-je vécu cette étape de la vie ou le seul problème est de savoir quelle sera le prochain jeu ? Ai-je déjà été ignorant, insouciant de ce qui m'entourait ? Dans cette prison, la vérité m'a heurté tôt. Le devoir et l'obéissance ont été innés. Dès mon plus jeune âge, j'étais en connaissance de ma situation et des troubles qui m'entouraient. Je vivais telle une machine aux ordres du roi Lodrum. Devon m'avait inculqué l'art du combat et la magie. Peut-être est-ce ma définition de l'enfance ?

Nélya prend ma main et la serre dans la sienne. Elle pose sa tête contre mon épaule. Son contact ne me dérange pas. J'ai appris à me défaire de cette peur du toucher. Mes cicatrices de tortures ne reviennent pas à la charge et ne la repoussent pas.

De la mousse chatouille ma peau, des cristaux dorés se développent dans la roche. L'eau ruisselle et passe entre mes jambes avant de dériver vers la ville.

- As-tu un souvenir heureux ? reformule-t-elle faiblement.

- Je crois, soufflé-je après un silence.

*

... Il y a 10 ans

La route cabossée fait rebondir la carriole. Les soldats se sont arrêtés deux fois pour débloquer les roues coincées dans la chaussée, ou alors la boue.

Le soleil frappe les barreaux de ma prison de verre. Une chaleur étouffante s'engouffre dans cette bulle qui me retient. Mes vêtements sont trempés de sueur, mes menottes grincent et déchirent ma peau moite. Quand est-ce qu'on arrive ?

Nous passons dans une forêt tropicale, le temps devient humide. Pire qu'avant. Mes oreilles bourdonnent. Ma gorge est sèche. Je vais mourir de déshydratation, pensé-je.

Soudain, la carriole se stoppe. L'arrêt est si brusque que je me cogne contre la paroi de ma cage. Devant nous, au milieu de cet arbre immense, accroché entre des épaisses lianes, un bâtiment vit. Ces murs terreux grouillent des plantes. Ils semblent bouger à mesure que nous nous approchons. Le feuillage des palmiers recouvre tel un nuage la bâtisse. Cela rend l'endroit obscure.

Malheureusement pour moi, le soleil tourne et vient à ma rencontre. Les soldats sont accueillis par un homme que je n'arrive pas à percevoir dans la foule, ensuite, ils sont amené à l'intérieur. Ils me laissent seul sous cette chaleur.

Je vais mourir ici. Cuit comme un rôti. Je balance mes chaînes pour attirer l'attention des gardes près de la porte. Ils ne bougent pas. Je frappe et tape pour essayer de faire un trou dans la coque. Aucun filet d'air ne passe. Je n'arrive pas à la casser. Je respire de plus en plus mal.

Sanvisage ~ Le PourfendeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant