Ailes en flammes

Le retour

Le ciel était d'un bleu éclatant au-dessus de Barcelone, une chaleur douce flottant dans l'air de la fin d'après-midi. La partie privée de l'aéroport de la ville se tenait en retrait, isolée du reste des voyageurs. Là, loin de l'agitation des touristes et des affaires quotidiennes, un jet privé venait d'atterrir en douceur. Le bruit feutré de ses moteurs s'estompa tandis que l'escalier se déployait lentement, touchant le sol impeccablement lustré.

Devant l'appareil, trois SUV noirs, imposants et intimidants, attendaient en formation. Les carrosseries brillaient sous le soleil espagnol, dégageant une aura de pouvoir et de danger silencieux. Quatre gardes du corps, droits et vigilants, veillaient à proximité, leurs visages impassibles masquant toute émotion.

La porte du jet s'ouvrit finalement, et une silhouette féminine apparut au sommet des marches. Alyana Gambano, la plus jeune de la fratrie, celle dont on avait à peine murmuré le nom ces dernières années, fit enfin son retour à Barcelone après huit longues années. Elle était partie à seize ans, fuyant les ombres de sa famille, cherchant à bâtir sa propre destinée loin du poids de l'héritage des Gambano.

Aujourd'hui, elle revenait, mais elle n'était plus la même.

Son corps élancé descendit lentement les marches de l'escalier, les talons de ses sandales de luxe frappant légèrement le métal sous ses pieds. Sa robe Louis Vuitton, noire et moulante, dévoilait ses jambes longues et fines, sa peau hâlée par les années passées sous le soleil parisien. Ses cheveux bruns, légèrement ondulés, encadraient son visage délicat. Ses yeux, d'un bleu-vert perçant, trahissaient une profondeur nouvelle, une mélancolie qui ne correspondait plus à la fille pétillante qu'elle avait été.

Le premier garde du corps, un homme massif au regard alerte, lui tendit la main pour l'aider à descendre. Mais Alyana, d'un geste élégant et nonchalant, ignora sa main tendue. Elle n'avait plus besoin d'assistance, et ce simple geste montrait à quel point elle avait changé. Ce n'était plus l'adolescente insouciante qui quittait Barcelone pour Majorque, pleine de rêves et d'espoir. Aujourd'hui, elle était une femme marquée par le temps et les secrets. Une femme qui avait appris à se défendre seule à Paris.

Le garde du corps, sans un mot, recula légèrement, tout en restant aux aguets. Le deuxième homme se précipita pour ouvrir la porte du SUV central. Alyana monta à l'intérieur sans prononcer un mot. L'habitacle était sombre, un contraste avec la lumière éclatante de l'extérieur, mais elle s'y installa comme si cet endroit lui appartenait. Le luxe discret du véhicule l'entourait, les cuirs et bois précieux dégageant une odeur familière, celle de l'opulence dans laquelle elle avait grandi.

Alors que le SUV démarra en douceur, Alyana s'adossa contre la banquette, son regard se perdant à travers les vitres teintées. Barcelone défilait devant elle, sa ville. La ville où elle avait grandi, où chaque rue et chaque quartier lui étaient autrefois familiers. Les souvenirs se bousculaient dans son esprit. Elle se revit, à seize ans, riant avec ses amis dans les ruelles étroites, courant vers la plage, les cheveux dans le vent. Elle était aimée de tous. Son rire clair, sa joie de vivre contagieuse. Elle avait été la petite princesse de Barcelone, adorée par sa famille, par ses proches, par la ville tout entière.

Mais tout cela était loin désormais.

Alyana Gambano n'était plus la même. La lumière qu'elle portait autrefois s'était éteinte quelque part entre Majorque, Paris et aujourd'hui. Les années passées seule, dans un appartement parisien, à étudier pour devenir architecte, l'avaient transformée. Elle avait fui sa famille, mais pas seulement. Elle avait fui quelque chose de plus profond, un secret, une douleur qui la rongeait depuis toujours. Personne ne savait vraiment pourquoi elle était partie, personne ne savait la vraie raison de son départ. Et personne ne comprenait pourquoi elle revenait maintenant.

Le regard toujours perdu dans la ville qui s'étendait devant elle, Alyana se demandait elle-même si elle avait fait le bon choix. Barcelone la reconnaîtrait-elle ? Et elle, reconnaîtrait-elle encore la vie qu'elle avait laissée derrière ?

Les SUV se frayaient un chemin à travers la circulation dense de la ville, les klaxons des voitures devenant un bruit de fond lointain.

Alyana Gambano était de retour, mais plus personne ne pourrait la reconnaître. Pas même elle-même.

Est-ce que ce changement était pour le mieux ? Seul le temps le dirait.