1. Mauvaise pioche

130 19 26
                                    

20h30.Columbia, Missouri.

Amora


Putain, c'est vraiment un enfoiré.

La voix de ma sœur emplissait le silence du salon toujours aussi froid.

— Duquel tu parles, cette fois ? rétorquai-je d'un ton neutre en prenant une poignée de chips et de les enfourner dans ma bouche , comme si c'était la seule chose qui me tenait encore en vie, ici, dans cette putain de maison.

Je pris une gorgée de mon Ice Tea pêche, sentant le froid familier apaiser ma gorge.

— Commence pas à me casser les couilles, toi, cracha Alana, comme si le simple fait de me parler lui retirait un peu plus de son humanité déjà inexistante. Putain, j'ai vraiment hâte de retourner à Los Angeles pour plus voir ta sale gueule.

Toujours un plaisir de passer quelques jours avec elle.

— T'es toujours pas partie, toi ?

La voix agressive de mon autre sœur, l'aînée, me parvint aux oreilles. Sky.

Ah, la famille. Quelle histoire.

— La ratée est partie ?

Sienna. Ma troisième sœur. Mon cœur se serra en l'entendant. La plus cruelle des trois, la préférée de ma mère.

Parce que, si Sky et Alana étaient des connasses, Sienna avait atteint le niveau supérieur le jour même de sa naissance. Elle, la fille parfaite selon Laure Caldwell. La fille qui, à seulement 27 ans, était déjà fiancée à un homme de bonne famille qui lui avait offert un poste dans l'entreprise de ses putains de parents. Il était riche et ne s'en cachait pas. L'argent. Le seul truc qui intéressait ma mère. Après elle, évidemment. Laure Caldwell n'aimait qu'elle et elle seule. Et l'argent.

J'ignorais la brune malgré mon envie de m'enterrer vivante. Un week-end avec elles et elles étaient toujours aussi insupportables. J'avais beau être la plus jeune, j'avais l'impression d'être la plus mâture. Et Sienna, la plus vieille derrière Sky, la plus stupide.

Les insultes fusaient à mon égard à longueur de journée. Mais après 18 ans passés à leur côté, j'avais appris à faire avec. C'était presque comme respirer au final.

Mes trois sœurs étaient toutes plus âgées que moi et les "chouchoutes" de la famille. Je n'avais jamais vraiment compris ce que j'avais fait pour être la victime de la famille. Peut-être était-ce à cause de mes yeux ? Ma mère avait les yeux verts, mon père les avait bleus. Sky et Alana avaient hérité des yeux ciels de notre père et Sienna avait les iris de notre mère. Mais les miennes étaient... noires. Comme mes cheveux.

Pourtant, personne dans ma famille n'avait aucun des deux de cette couleur. Ils étaient tous blonds ou bruns, leurs yeux bleus ou verts...

Je me souvenais parfaitement d'une question, une seule question que j'avais osé poser à ma mère lorsque j'avais 9 ans. Je lui avais demandé pourquoi mes cheveux n'étaient pas bruns comme ceux de mon père ou des yeux verts comme elle. Elle m'avait rétorqué que c'était justement parce que je n'étais pas comme eux, pas jolie, pas intelligente. Pas... Que je ne méritais pas d'être une "Caldwell." Je ne méritais ce "titre" que si je prouvais que j'étais capable de devenir riche. Je rêvais de devenir astronome à cet époque.

Mon père me répétait souvent cette phrase de son vivant :

<< Tu es belle, mon ange. Ne laisse personne te faire croire le contraire. >>

THROUGH YOUR EYESOù les histoires vivent. Découvrez maintenant