Deadly Waves

25. Une naufragée

♬ : Say it right - Nelly Furtado

" I can't say that i'm not lost"

25. Une naufragée

Suki Riviera,
Présent, Sur les vagues.

-          Tiens, il en reste encore plein dans la cuisine. Gloria me tend un carambar à la pêche.

Je la remercie et déballe le bonbon pour le fourrer dans ma bouche. La saveur fruitée et acide de la pêche s'invite rapidement dans mes papilles.

Subitement, une vibration parcourt mon téléphone sur la petite table en acacia devant nous. Je le mets en sourdine et le place dans la poche de mon short en jean.

-          Tu comptes l'ignorer encore longtemps ?

L'inquiétude traverse les lèvres de ma meilleure amie tandis que je hausse les épaules de manière détachée.

Il faut croire que je suis comme toi Zeio, l'art de l'illusion pulse dans mes veines.

-          Sérieusement Suki, c'est ta mère.

Je reste muette et tente un sourire rassurant. Ma mère me harcèle depuis notre altercation. Quoi qu'il en soit, j'ai choisi de faire abstraction de ses appels. Peut-être par peur de revenir sur ma décision, ou peut-être par aigreur de lire la déception dans sa voix autoritaire.

Je n'ai pas la foi d'écouter ses plaintes et ses déboires. Dorénavant, ma seule préoccupation est d'échapper à Zeio pour mon cours de natation.

L'angoisse s'immisce dans mes cellules rien qu'à l'idée de mettre un pied dans cette eau salée. Les traumatismes de ma noyade me reviennent en mémoire, il est hors de question que je revive la terreur de me faire engloutir sous les vagues, de sentir mes poumons se remplir de liquide amer, m'empêchant de prendre une nouvelle inspiration.

Soudain, le bateau met les voiles.

-          On se rend à la crique où tu t'étais déjà rendu. m'annonce Gloria.

-          Ça devient impératif que tu cesses de collaborer avec cet individu peu recommandable ! M'agacé-je en faisant référence au cretino.

Me voilà prise au piège sur l'Arrache Cœur.  Heureusement, ce navire est grand. J'abandonne mon acolyte rusé, et pars me cacher dans un coin inconnu. Je ne rejoins pas la proue, mais la poupe (=arrière du navire).

Je me faufile à travers les matelots en action, le chant de l'aventure s'entend dans leur dur labeur. Les visages luisants, rougis par le soleil, et les murmures indéchiffrables se joignent à ce spectacle. Je reste dans l'ombre de cet amas de travailleurs. Ils nettoient, réparent les mâts et les voiles. Chacun d'entre eux est occupé par une tâche précise, d'autres sont en pause et trinquent avec une bière fraîche sous la chaleur éternelle de cette journée. On peut entendre des chansons camouflées par des coups de visseuses, des grommellements remplacés par des rires sincères.

Je navigue parmi tous ces types de profils, allant de jeunes gens à des personnes âgées, issus de diverses origines. Des femmes et des hommes sont vêtus élégamment, tandis que d'autres portent des vêtements simples pour braver les extrêmes températures. Cependant, je n'oublie pas que parmi eux se cachent des traîtres qui m'épient attentivement.

J'arrive près du bord, et m'assois sur un tonneau. Le soleil tape sur mes cheveux noirs, je sors de ma poche un bandana blanc. Il est bien connu que cette couleur n'absorbe pas la lumière, contrairement aux pigments sombres. Je viens faire un nœud à l'arrière de ma tête et laisse quelques mèches retomber sur mon front.