Chapitre 23

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NATHANAËL

— Éloïse a rencontré quelqu'un ! nous balance de suite Emma.

La principale concernée lui fait les gros yeux en cachant sa tête dans ses mains. Si elle comptait garder cette histoire pour elle, c'est raté.

— Je veux tout savoir, poursuit Alex en prenant place autour de la large table.

Pire qu'une gonzesse ! Ce mec une véritable commère.

J'écoute d'une oreille détachée tout en réchauffant mon plat de pâtes au micro-ondes.

— Pas de quoi en faire toute une histoire, commence cette dernière. On s'est juste retrouvé coincé ensemble dans l'ascenseur pendant deux heures. Donc, on a été forcé de discuter un peu, voilà tout...

— Ils ont tellement bien discuté qu'elle lui a filé son numéro de téléphone, crache Emma en bousculant l'épaule de son amie.

Mon poing se serre, une boule stagne dans ma gorge.

Elle rencontre un gars et à peine deux heures plus tard, elle lui file déjà son numéro de téléphone... Moi-même, je ne l'avais pas avant ce matin.

Et ce n'est même pas elle qui te l'a filé !

— C'est juste un voisin...

— Qui veut t'inviter à prendre un verre ! renchérit son amie tout excitée, en tapant dans ses mains.

— C'est sa chemise que tu portais ce matin ? lui demande alors Alex.

Je les rejoins pile-poil à ce moment précis et observe le visage d'Éloïse se décomposer. Je la fixe en attendant patiemment sa réponse, tout comme les deux autres.

Éloïse entortille ses mains en avouant timidement :

— Il faisait froid dans la cage d'ascenseur. Il me l'a juste prêtée, mais... j'ai oublié de lui rendre en partant, s'explique-t-elle, le rouge lui montant aux joues.

Mon sang boue dans mes veines, je mâche mes aliments avec violence. Ma fourchette tape le fond de mon tupperware avec brutalité à chaque nouvelle prise.

Tout à coup, les regards convergent vers moi.

— Et toi, tu en penses quoi ? m'interroge Emma, un sourire narquois pendu à ses lèvres rouges.

Quelle saleté !

Je reprends une bouchée de mon repas avant d'exprimer le fond de ma pensée, qui, je le sais d'avance, ne fera pas l'unanimité.

Les coudes bien à plat sur la table, les couverts encore en main, je me redresse et prends une brève inspiration avant de répondre.

— Je pense que c'est précipité.

Éloïse focalise toute son attention sur moi, attendant la suite de ma tirade.

— C'est irresponsable, tu ne connais même pas ce type, tu ne sais pas ce qu'il a en tête.

Emma pouffe de rire, alors qu'Éloïse fronce les sourcils. Je crois que ce que je viens de lui dire ne lui plaît pas beaucoup.

— Il a en tête la même chose que vous tous, hommes, ajoute Emma hilare en rejetant sa longue chevelure rousse par-dessus son épaule.

Le visage de son amie rougit davantage, mais la colère commence à déformer ses traits. Ses taches de rousseur se confondent les unes avec les autres.

Alex se contente de se marrer en suivant la discussion tout en sirotant son soda tranquillement.

— Et pourquoi n'aurait-on pas le droit de juste vouloir tirer un coup nous aussi ?! crache Éloïse furieuse en me regardant droit dans les yeux.

Ses iris prennent une teinte orageuse.

J'avale de travers, tout comme Alex qui recrache le liquide qu'il était en train de boire. Elle est vraiment sérieuse là ?

Elle me défie silencieusement, attendant la réponse que je ne vais pas tarder à lui servir.

— Je ne te croyais pas comme ça, c'est tout, lui dis-je d'une voix détachée.

Un petit rictus déforme sa bouche avant qu'elle ne revienne à la charge.

— Ah ouais ? Et comment suis-je censée être d'après toi ?

Plus personne ne parle. J'ai l'impression que cette discussion ne concerne plus que nous deux. Un duel de regard débute.

Je repose mon dos sur le fond de ma chaise et me mords la lèvre avant de répliquer d'un ton piquant :

— Mature, réfléchie. Je ne te pensais pas aussi naïve, aussi imprudente. Quoiqu'à bien y repenser, ton irresponsabilité t'a déjà attiré des problèmes similaires.

Alex inspire bruyamment. Je crois qu'il a pris tout l'air que contenait cette pièce, tant elle devient chargée en tension.

Éloïse semble dégoûtée par mes reproches. J'y suis peut-être allé un peu fort, mais j'ai raison. Il y a bien trop de détraqués dans ce monde pour qu'elle continue d'agir de la sorte sans réfléchir aux éventuelles conséquences de ses actes.

— Laisse-moi te dire que tu n'es personne pour te permettre de me dire ce genre de chose. Tu sais qui est le plus naïf de nous deux ? me demande-t-elle en se levant, ses paumes de main fermement campées sur la table. Je vais te le dire moi.

— Loulou... tente de l'arrêter, Emma.

— Ne fais pas ça Em, la menace-t-elle en lui intimant de se taire.

Son amie n'ose pas aller contre sa décision et se contente de baisser le regard, ne sachant plus où se mettre. Ce qui est une première pour elle.

— C'est toi, m'accable-t-elle en me pointant du doigt. Assez naïf pour croire que tu pourrais être mon ami, alors que la seule chose que tu m'inspires, c'est de la pitié !

Son dernier mot me laisse pantois. Je ne la pensais pas aussi cruelle, il faut croire que je me suis bien trompé sur elle.

Après la fin de sa tirade, elle ramasse ses affaires et quitte la salle d'un pas rageur.

Emma entreprend de la suivre juste avant de faire demi-tour pour me prévenir :

— Elle ne le pense pas vraiment... c'est sa colère qui parle. Tu l'as blessée donc elle a voulu te blesser à son tour, tente-t-elle de la défendre.

Mais c'est trop tard.

Voilà ce qui arrive lorsque vous baissez vos barrières. Voilà ce que vous y gagnez.

Le pire, c'est que ses mots ont réussi à me toucher.

Beaucoup plus que je ne l'aurais pensé.

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⏰ Dernière mise à jour : Nov 06 ⏰

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Nos cœurs fusillés ( SOUS CONTRAT D'ÉDITION CHEZ ELIXYRIA) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant