La boîte de Pandore
L'odeur de la peinture flottait dans l'air, familière, presque réconfortante. Pourtant, ce soir-là, elle n'avait rien de rassurante.
Megan était là, debout devant la toile blanche, depuis des heures. Son pinceau tremblait légèrement entre ses doigts, suspendu comme un soupir qui ne voulait pas sortir. Elle avait préparé les couleurs, ajusté la lumière, même mis de la musique en fond, en espérant que quelque chose naîtrait. Mais rien ne venait. Le vide.
Ses yeux fixaient la toile, mais dans son esprit, ce n'était pas du blanc qu'elle voyait. C'était Éris. Son regard insondable, son dos nu quand elle se levait pour aller prendre l'air, ses silences plus lourds que n'importe quel cri.
Megan la revoyait encore cette nuit-là. Le cauchemar. Le cri. Le tremblement de tout son corps. Et elle, impuissante. Comme à chaque fois que les ombres du passé d'Éris revenaient la hanter.
Elle avait voulu lui parler. Lui dire qu'elle était là. Qu'elle ne partirait pas. Qu'elle tiendrait bon même si Éris la rejetait parfois du regard. Mais elle n'avait rien su dire. Rien su faire. Juste tendre une main qui n'avait pas été prise.
Un soupir s'échappa de ses lèvres, brisant le silence cotonneux de l'atelier. Elle posa le pinceau, s'adossa au mur, les bras croisés, la mâchoire serrée.
Elle voulait l'aider. Dieu, qu'elle voulait l'aider. Mais comment tend la main à quelqu'un qui garde les poings fermés ? Comment rassurer une âme qui ne se sent jamais en sécurité, même dans les bras qu'elle aime ?
Elle baissa les yeux vers la toile encore blanche.
— C'est elle, murmura-t-elle. C'est elle que je veux peindre. Mais je ne sais plus comment la voir. Pas quand elle s'éteint de cette manière.
Ses doigts effleurèrent les tubes de peinture étalés devant elle. Une envie lui traversa l'esprit — peindre Éris, telle qu'elle la voit. Pas forte. Pas invincible. Juste... humaine. Fragile. Tremblante. Aimée.
Peut-être que c'était ça, la réponse. Aimer sans comprendre. Aimer sans condition. Même dans le silence. Même dans l'ombre.
Elle releva les yeux, un peu plus déterminée.
Si Éris ne pouvait pas parler, alors elle, elle peindrait. Même si ce n'était que des fragments. Même si c'était maladroit. Peut-être qu'un jour, Éris y verrait quelque chose. Un reflet. Un écho. Un "je t'aime" silencieux.
Le froid du soir mordait les rues de la ville, mais Megan ne le sentait presque pas. Elle marchait lentement, les mains dans les poches, la tête noyée dans ses pensées. Chaque pas la rapprochait de l'appartement d'Éris, et pourtant, une part d'elle hésitait. Pas à rentrer — non, elle n'avait jamais douté de sa place là-bas à ces côtés — mais à savoir comment leur soirée allait se dérouler.
Le mois avait été long. Silencieux. Chargé. Éris dormait à ses côtés, oui, mais leurs corps ne se cherchaient plus. Leurs regards se croisaient à peine, ou trop brièvement. Une distance s'était installée. Douloureuse, mais compréhensible. Megan n'en voulait pas à Éris. Elle comprenait. Mais comprendre n'effaçait pas le manque.
Elle releva la tête en approchant de l'immeuble. Une lumière filtrait par les rideaux de l'appartement d'Éris. Une ombre bougeait à l'intérieur. Son cœur accéléra légèrement.
Est-ce qu'elle allait parler ce soir ? Est-ce qu'elle allait se laisser approcher ?
Elle monta les escaliers sans se presser. Son souffle se calma alors qu'elle atteignait la porte. Et dès qu'elle l'ouvrit, un parfum familier l'enveloppa.
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Elle ~ une obsession dévorante ~
RandomDans l'immense New York vibrante et chaotique, Éris, une femme énigmatique et discrète, croise pour la première fois Megan, une jeune femme à l'énergie solaire et au charme désarmant. Subjuguée par cette rencontre, Éris développe une fascination obs...
