In slow motion.

vingt.

- C'est dingue.

Carson avait répété ces trois mots une bonne vingtaine de fois depuis qu'on avait pris la route pour la périphérie de Londres, une heure plus tôt, et je sentais que si elle les redisait une fois de plus, j'ouvrirai la portière côté passager pour la jeter dehors. J'étais déjà tellement nerveux à l'idée d'enfreindre la Loi que je n'avais pas besoin de l'entendre répéter en boucle que c'était dingue. Bien sûr, que ça l'était ! Mais c'était également stupide, complètement idiot et illégal qui plus est ! Jusqu'alors, j'étudiais le droit, les lois, la notion de propriété privée et ce que cela impliquait mais aujourd'hui, cette nuit, je comptais braquer une école d'art.

Mais alors que je me garais sur le parking de l'école, je tentai de me rassurer. Techniquement, je ne volais rien. J'allais ouvrir la porte de l'établissement grâce à une paire de clés obtenu par Carson et on ne ferait que reprendre des oeuvres qu'elle avait laissé dans son école avant d'être renvoyée. Mais si c'était si légal que ça, pourquoi est-ce qu'on avait conçu ce plan tard le soir, quand personne ne serait dans l'établissement ? Et pourquoi mon coeur tambourinait aussi fort dans ma poitrine ? J'avais l'impression qu'il allait sortir de mon abdomen, rompre ma cage thoracique et me laisser pour mort sur le parking. Et c'était pire depuis que Carson jouait nerveusement avec ses doigts, les faisant craquer de temps en temps. Elle était aussi nerveuse que moi mais pas pour les mêmes raisons. Elle, elle avait peur de retrouver ses tableaux, d'être à nouveau confrontée à cette ancienne part d'elle-même qu'elle avait laissé entre ces murs et qui la terrifiait.

- Prête ? Je lui demandai.

Hochement de tête. Elle ouvrit la portière côté passager pour extraire son corps de l'auto. Moi, je restai assis sur mon siège à prendre doucement une inspiration que j'expirai après. J'étais nerveux. Jamais je n'avais eu aussi peur de ma vie alors que cette idée, ça avait toujours été la mienne. Pourtant, je savais que je ne risquais pas grand-chose. Jusqu'à présent, j'avais été un étudiant plutôt bon, un gamin qui n'avait été arrêté qu'une fois et mis en prison le temps d'une nuit, de quelques heures, avant qu'on me relâche sans rien noter sur mon casier judiciaire. Je n'allais pas passer ma vie en prison si je me faisais prendre la main dans le sac ce soir mais le doute persistait, sans que je comprenne pourquoi. Sans doute parce que je me rapprochai de Carson et de cette intimité avec une femme que je n'avais pas eu depuis la mort de Maura.

- Tu te bouges !

Je sursautai en entendant la voix de Carson à travers la vitre. Elle tambourina contre la portière de ma voiture jusqu'à ce que je me décide à me détacher pour quitter à mon tour mon 4x4.

Je respirai calmement un bon moment et réajustai le col de ma veste. Je pris les clés que Carson me tendit et après avoir fermé ma voiture, on se dirigea jusqu'à l'entrée du bâtiment. La porte principale étant filmée en permanence, on préféra se glisser jusqu'à la porte derrière que je réussis à ouvrir sans difficulté. On entra alors dans l'enceinte de l'école et immédiatement, les lumière s'éclairèrent, ce qui surprit Carson.

- Foutu éclairage automatique ! Pesta-t-elle entre ses dents alors qu'on avançait calmement dans les couloirs.

C'est étrange comme cet endroit me semblait familier, comme si j'avais déjà mis les pieds ici et que j'y trouvais un certain réconfort. Les couleurs sur les murs étaient neutres mais apportait une certaine douceur qui manquait décidément dans l'enceinte de mon ancienne université. Partout, il y avait des tableaux, la plupart étant ceux des étudiants. Il y en avait pour tous les goûts - des oeuvres contemporaines, d'autres plus modernes mais tous avaient un point commun : La technique. Tous ces artistes avaient une maîtrise parfaite qui m'impressionna. Je n'avais jamais compris grand-chose à l'art mais je savais reconnaître une belle chose quand j'en voyais une et là, je me trouvai au coeur d'une galerie géante.