Chapitre 12

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Narita International Airport.

Alex

Est-ce ça la Déferlante ?

La partie microscopique de mon cerveau qui fonctionne encore, essaie de comprendre pourquoi j'ai pris la décision la plus extravagante de ma vie. Pour faire court, je pars vivre et travailler sur un autre continent, loin des miens, avec l'homme qui me menace et ne veut rien révéler de son passé, alors que tout laisse penser qu'il pourrait être dangereux. De bien des façons.

Est-ce que je deviens folle ?

Je m'assois dans le lit et j'examine l'endroit. Son Jet est plus que silencieux, on flotte sans résistance. Comme moi. Du blanc, des hublots panoramiques, et un éclairage naturel. Tout est lumineux. Assez chouette, en fait. Secoue-toi, Alex ! Après quelques ablutions dans la salle d'eau, je rejoins la cabine principale. Pile au moment où le bruit du percolateur et l'odeur du café annoncent le petit déjeuner. Matt est confortablement assis dans le canapé de l'espace repos, face à un écran HD. Il semble absorbé par le journal de Christiane Amanpour.

– Ah, Alex, dit-il en relevant la tête. Venez vous asseoir.

– Bonjour, fais-je en me penchant pour l'embrasser.

Qu'est-ce qu'il sent bon !

Je m'assieds dans l'angle opposé en ramenant mes jambes sous moi. Sur la table basse, son ordinateur, quelques dossiers et deux quotidiens mal repliés près d'une tasse à café vide, indiquent qu'il a déjà commencé sa journée. Du coup, je m'en veux d'avoir autant dormi. Un instant, je me demande ce que le patron en lui pensera de moi. Un article du Business Week abandonné sur le côté, attire mon attention. On parle justement de lui et d'un groupe pharmaceutique en difficulté dans une des trois OPA qu'il aurait lancées contre des laboratoires similaires. Mais je n'ai pas le temps de finir ma lecture que Marion surgit inopinément avec un grand plateau de petit déjeuner pour deux. Tout sourires, elle se penche assez bas en surplomb de la table, découvrant très nettement une corbeille de dentelle noire.

Pile dans sa ligne de mire.

– Bon appétit, monsieur, susurre-t-elle en rosissant.

– Merci Marion, la gratifie Matt toujours absorbé par son écran.

En clair, elle le vampe, il s'en fout. J'examine le plateau pour évacuer le petit pincement dans mes côtes : un expresso noir et une cloche en argent devant lui, une théière blanche brûlante et un muesli croustillant aux framboises, devant moi.

– Ce sera tout, Marion, dit-il en la voyant plantée devant lui.

Je fais infuser mon thé tandis que Garrett avale tranquillement son omelette en continuant de suivre l'actualité sur l'écran.

– On parle de vous dans le Business Week.

– Hum...

Apparemment, il ne tient pas à bavasser sur le sujet. Comme j'ai faim, j'attaque le muesli. Bio encore. Beurk. C'est quoi cette manie du bio ? Je regrette mes Chocapic.

– Au fait, j'ai établi ma liste de Noël.

– Quoi ?

Quand il a débité sa liste, tout était en désordre dans ma tête. Aujourd'hui, tout est clair.

– Vous devrez la valider pour que j'accepte de cohabiter avec vous. Ou alors, je prendrai le ferry afin de me rendre dans vos bureaux.

– Pardon ?

Garrett coupe le sifflet à CNN et se cale confortablement dans le canapé, comme s'il allait entrer en réunion quelque part. Pas facile. Affronter Matt Garrett dans les yeux est comme affronter un énorme incendie sans grosse lance à eau. On a toutes les chances de cramer. Dans ma tête, j'entends la voix de Nina Simone : «  It's a new dawn. It's a new day. It's a new life. For me. »

Effet de VagueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant