Chapitre 10

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Cette question résonne dans ma tête, comme un murmure dans une grotte profonde et sombre, encore et encore. Que puis-je bien répondre ? Que puis-je répondre à un homme, qui je croyais, me détestait ? Je commence seulement à comprendre mes sentiments et il semble si contradictoire ou est-ce moi qui me complique les choses... La tête basse, les yeux fermés, je n'ose pas le regarder.

Je sais que je ne pourrais sortir tant que je n'aurais pas formulé une réponse. Je suis en colère, pas contre lui, contre moi, d'avoir l'air si faible... Je me remémore, ces nombreuses fois où j'ai entendu des rumeurs courant sur ma naissance, ma famille, moi... Je ne voulais pas qu'il voit que cela m'affectait et j'ai créé une carapace autour de moi, j'ai fait croire que ces histoires ne m'affectaient pas et j'ai cru être passée au dessus de tout ça, être devenue forte.

Legolas et Dis sont sans doute les seuls qui ont déjà vu ruisseler des larmes sur mes joues, et peut-être pour cela que nous sommes si proches. Ce sont les seuls jusqu'à présent qui ont réussi à passer au travers du mur que je me suis forgée. Et là, je me sens craquée, je sens mes émotions explosées. Oh oui, oui je l'aime, depuis la première fois. Et j'ai peur, peur de ce sentiment nouveau. Etre amoureuse. Pourquoi m'a t-il posé cette question ? Ressent-il ce que je ressens pour lui ? Ou est-ce le choc de cette révélation qui me fait penser et ressentir tout cela ?

-Ne me laissez pas dans l'ignorance, je respecterai votre réponse quelle qu'elle soit. Dit-il d'une voix douce que je ne lui connaissais pas.
-Pourquoi voulez-vous savoir cela ? Dis-je en essayant de contenir mes émotions.
-Parce que je...

Thorin n'a pas le temps de finir sa phrase que la porte vole en éclats, laissant apparaître Balin et Dwalin. Tout deux sont vêtus de leurs armures scintillantes et semblent avoir couru jusqu'ici.

-Que se passe-t-il ?! demande Thorin.
-Le roi a ordonné une exécution ! Dit Dwalin.
-On est venu vous prévenir dès qu'on a su ! Poursuivit Balin.

Apprenant cette horrible nouvelle, mon sang ne fait qu'un tour et je demande sans détour :

-OU ? QUI ?
-Suivez-nous! Crièrent les deux frères en sortant déjà de la pièce.

Nous suivons les deux nains jusqu'à la salle du trône dans laquelle est rendue ce genre de sentence. Pendant le chemin, jusque là, j'essaie de savoir qui peut bien être la personne condamnée, mais personne ne semble savoir. Je pense alors à la mère de la pauvre petite Sifna et espère de tout coeur de ne pas voir sa tête rouler sur le sol. J'avais entendu parler de ce genre de pratique, mais les elfes n'exercent pas ce type de...barbaries. Et j'en suis bien heureuse.

Mon coeur bat à une vitesse folle, de stress et d'effort, mes jambes me font mal, j'ai l'impression d'avoir deux poids accrochés aux chevilles. Je suis douée sur les courtes distances pas les longues! Mais pensant à la petite Sifna, et sa mère qui est peut-être là en bas prête à se faire guillotiner, je redouble d'énergie et arrive à dépasser les garçons. Dans d'autres circonstances j'en aurais probablement rit. Mais la peur me submerge et je ne pense même plus à la question de Thorin.

Nous arrivons alors dans le "grand hall", partie basse de la salle du trône. Il y a des nains par centaines, éparpillés dans toute la salle, nous barrant le passage. J'essaie tant bien que mal de me frayer un chemin, criant de me laisser passer, mais je ne réussis qu'à être poussée vers l'arrière. Atterrissant dans les bras de Balin, je lui adresse un bref merci de la tête qu'il me rend. Thorin arrive à son tour suivi de près par Dwalin. Et il ordonne à tous les nains de se pousser, ceux-ci obéissent sans sourciller à leur prince. Alors que nous nous approchons, une boule se forme dans mon ventre. Je me répète en boucle dans ma tête : "Pourvu que nous ne soyons pas arrivés trop tard !".

Je m'arrête net, lorsque j'aperçois Dis en larme aux côtés de Niniel et Sifna la tête collée contre son épaule détournant les yeux du corps au sol. Je m'approche alors, du corps inerte sur le sol couvert de sang. La tête, elle, repose quelques mètres plus loin et est recouverte de cheveux bruns. Une vague de sentiments m'envahit : la terreur, le dégout, la tristesse... Comment le roi a-t-il pu faire ça ?!

Je me sens juste un peu soulagée de ne pas avoir trouvé le corps de la mère de Sifna, dans cet état.
Je détourne aussitôt mon regard pausé sur ce crime, ma tête tourne, je me sens mal, je me sens tanguée.
Thorin se précipite vers moi pour me soutenir, il me jette un regard inquiet.

-ça va aller... lui dis-je.
Le prince ne semble pas me croire et lève les yeux vers son grand-père qui regarde l'homme à ses pieds avec satisfaction.
-Je croyais que cette pratique était abolie depuis longtemps ! Comment, pourquoi ?! Cracha-t-il à l'homme qui se tenait fièrement assis devant lui.
-Peuple rentrez chez vous ! Dit le roi, comme si la remarque de Thorin n'avait pas atteint ses oreilles.

Le peuple ne se fit pas prier et partit presque en courant chez eux. Ma vue se brouille de plus en plus. Sentant mon état se détériorer, Thorin me confie à Dis et Niniel.

-Elle doit se reposer, conduisez-la dans sa chambre. Restez-là jusqu'à ce que je revienne ... J'ai à faire...

Elles ne discutèrent pas, bien contentes de quitter cet endroit. J'essaie tant bien que mal de marcher, soutenue par Niniel. Dis, elle, tenait la petite qui n'avait sans doute pas compris ce qui venait de se passer sous ses yeux. J'atteins finalement mon lit et m'assied sur le bord de celui-ci. Niniel pause sa main sur mon front, je la repousse violemment.

-Laissez-moi ! Criais-je.

Niniel me regarde alors avec un regard mi-terrifié, mi-triste. Je comprends alors mon erreur et reprends une voix calme.

-Asseyez-vous, vous êtes toute pale, même chose pour vous, Dame Dis.

Dis jette un regard vers la petite qui s'est endormie et elle l'a dépose dans son lit de fortune, un tas de couverture qui trainait là, où la petite ne risquerait pas de tomber. Elles s'affalent alors à mes cotés, Dis à ma droite et Niniel à la sienne.

La petite naine brune se met alors à pleurer, laissant sa tête se déposer sur mes cuisses. Je lui murmure des paroles réconfortantes, tout en lui caressant la tête.

-ça va aller...

Que puis-je dire d'autre ? Les mots ne me venant pas plus, j'attrape les mains de mes deux amies. Elles lèvent les yeux vers moi et me remercie par un petit sourire forcé. Je me sens tellement mal, pour Dis, qui a déjà vu sa mère mourir quelques années auparavant. Et pour Niniel, pour l'avoir laissée venir ici avec moi, dans cet endroit dont elle ne connait rien, qui n'a aucune importance dans son cœur...

La porte s'ouvrent sur Thorin et Kargun, à la vue de cet homme, Dis se lève pour se remettre à pleurer dans ses bras. Kargun l'entoure alors de ses bras et dépose son menton sur la tête de celle-ci. Me faisant penser à la façon dont Legolas me prenait dans ses bras. La naine jette un regard vers son frère, qui s'approche pour lui déposer un petit baiser sur le front. Et lui demander si elle se sent bien et si elle n'a besoin de rien. Elle hoche la tête, avec un petit sourire, rassurant un tout petit peu Thorin.

-Ramène-la dans sa chambre, s'il te plait.

Thorin se retourne vers moi, et nous restons plusieurs instants à nous regarder sans bouger. Ma nourrice consciente d'être de trop, quitte la chambre, balbutiant quelques excuses comme : « Désolée, je suis fatiguée, je vais m'en aller, désolée... »

Celle-ci a à peine refermé la porte, que mon promis se précipite vers moi, pour m'attraper les mains. Il scrute la moindre partie de mon visage.

-Vous n'avez rien ?
-Juste...un peu sonnée...
-Ne dites pas de bêtises ! Personne n'est juste un peu « sonné » après avoir vu une telle scène ! Vous êtes bien comme ma sœur, je suppose que c'est pour cela que vous vous entendez si bien.

Je soupire.

-Je vais demander à ce qu'on prépare des chevaux, vous rentrez chez vous... Dit-il à d'une voix triste, à contrecœur ?
Mon cœur s'emballe, non, je ne veux pas ! Je ne peux pas !
-Je refuse de partir ! Dis-je déterminée d'une voix ferme.

Sans m'en être rendue compte, je lui ai attrapé le visage avec mes mains, il semble aussi surpris que moi, et délicatement, il dépose ses mains sur les miennes, les nouant ensemble.
Voyant son visage si proche du mien, ses yeux dans lesquels on pourrait se noyer. Je ressens une forte envie que je n'ai jamais ressentie avant... J'ai envie de me sentir aimée, épaulée, soutenue, consolée...

Je me jette alors sur ses lèvres, d'abord surpris, nous y prenons vite goût et Thorin approfondit notre baiser, le rendant plus agréable et envoutant.
Nos lèvres se séparent et front contre front je murmure :

-Je refuse de partir...

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Voilààà ! J'espère que ça vous a plu ;) Encore désolé pour le temps entre chaque chapitre, c'est long et j'en suis désolée... Vous me pardonnez ? *w*

Que pensez-vous de ce petit baiser ? *w*
De l'exécution ?

Bisous !

Enchaînée, partie 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant