Shadows

XIII - T'as besoin de moi

PDV Ava

« Tout ce que je veux c'est une vie sans problèmes, c'est pas tant demandé, si ? »

Alors que je prononce ces mots, une terrible sensation de brûlure emplit mes poumons. Je gémis de douleur et me recroqueville sur moi-même, me défaisant de l'emprise de Thomas sur mes poignets et enlaçant mes genoux avec mes bras. Ma respiration se fait haletante et irrégulière, je ne la contrôle plus. Je sais ce qu'est une crise de panique, j'en ai fait pas mal après la mort de mon frère, mais je ne pensais pas que ça recommencerait maintenant. Des points noirs commencent à brouiller ma vision, et là, arrive la chose la plus inattendue au monde : Thomas se penche vers moi et m'embrasse. J'écarquille les yeux, le rythme des battements de mon cœur quadruple d'un seul coup, et il se lève. Je respire normalement.

« Comment t'as su ce qu'il fallait faire ? » je demande.

« J'ai lu ça quelque part. » répond-il avec un sourire.

Je marmonne un « merci », et tente de raisonner mon cœur pour qu'il reprenne son rythme normal.

Je me retiens de rougir. J'ai honte de m'être troublée pour quelque chose qui ne voulait rien dire. Il s'assied en tailleur en face de moi.

« Tu vas me dire ce qu'il se passe ? » demande-t-il, une expression d'inquiétude prenant forme sur son visage.

Je secoue la tête négativement et il soupire.

« Ça a un rapport avec Marie O'Brien ? »

Je tressaille à l'entente de ce nom. Je me demande comment il a fait pour l'apprendre. Ah, si ça me revient. Le cimetière. Je décide de répondre à sa question.

« Oui. Non. Peut-être. Je sais pas. Je sais plus. »

C'est con comme réponse, mais je suis perdue, complètement perdue. J'ai plus de repères dans ma vie. L'expression de son visage s'adoucit.

« C'était qui au téléphone ? » questionne-t-il gentiment.

« Karen Clarke. » je réponds.

Bien entendu, il ne comprend pas.

« Une avocate. » j'ajoute rapidement.

Il hoche la tête en signe de compréhension.

« Qu'est-ce qui se passe ? » interroge-t-il, avant de me prendre la main et de m'encourager à continuer.

J'inspire et expire profondément. Je sens de nouvelles larmes couler sur mes joues, et j'essaye d'ignorer les mouvements circulaires que fait son pouce sur la paume de ma main, et de donner une réponse cohérente.

« Ils vont l'exhumer » est la seule chose que je réussis à sortir.

Je lis la surprise dans son regard, visiblement, il ne s'attendait pas à ça.

« Ils vont exhumer ma mère et je peux rien faire contre ça ! » je m'exclame en tirant sur mes cheveux.

Il me prend alors dans ses bras, toujours sans me lâcher la main, et je me mets à sangloter comme une idiote de petite fille. Je déteste être aussi faible, mais ça ne parait pas déranger Thomas, et je lui en suis vraiment reconnaissante pour ça.

« Continue » murmure-t-il.

Je décide de prendre sur moi, et je lui raconte. Je ne sais pas pourquoi d'ailleurs, j'ai juste l'impression que je peux lui faire une totale confiance.

« Mon père adorait mon frère. On ne peut pas dire qu'il ne m'aimait pas, mais c'était son fils aîné, son héritier en quelque sorte. Après l'accident d'Arthur, il a changé. Il s'est mis à boire. Tout le temps. Il a commencé à battre ma mère. Et il abusait d'elle. Le soir je les entendais depuis ma chambre. Lui je l'entendais gueuler sur ma mère, et elle, elle le suppliait d'arrêter, mais il continuait, encore et encore. Mon père nous menaçait toutes les deux, il disait qu'il nous tuerait si on disait quoi que ce soit à qui que ce soit. Alors on se taisait parce qu'on avait peur. Ma mère est devenue une épave, et un jour, je suis rentrée du lycée et je l'ai retrouvée dans le salon... »