Sombre Héritages-3

Epilogue

                  

Deux semaines s'étaient écoulées après le départ d'Aydan et l'angoisse d'Enora n'avait pas diminué d'un cran. Durant ces interminables journées, elle avait prié pour qu'il revienne sain et sauf avec leur fils, sans cesser d'attendre devant la fenêtre de sa chambre. Elle avait eu beaucoup de temps pour comprendre la relation les unissant.

Aydan était un Drakion avant d'être un homme, il se comportait trop souvent en seigneur et maître, ordonné et entendait bien être obéi. Nonobstant, en agissant de cette manière, il se protégeait de toutes formes de souffrance.

Au fond de lui resterait toujours l'enfant privé de l'amour de sa mère, même s'il avait mûri en devenant père. Il n'était pas doué pour exprimer ses sentiments sans s'emmêler les pinceaux ou jouer de l'ironie lorsqu'il se sentait acculé. Cependant, il lui avait prouvé qu'en dehors de ses faiblesses, se cachait un mâle prêt à tout pour protéger les siens, quitte à y laisser sa vie.

C'était cette facette de sa personnalité qui l'avait tant séduite le jour de leur rencontre. Elle avait lu en lui, aspiré ses émotions sans le lui dire, par peur du rejet, par peur d'être considéré comme le monstre qu'elle redoutait d'être.

Si seulement, ils avaient été honnêtes l'un envers l'autre, ces dix-huit mois de doute, de souffrance et de solitude n'auraient jamais existé. Dans la vie était loin d'être un conte de fée, elle était jalonnée d'épreuve et si au bout du compte, l'on arrivait à les surmonter, l'on accédait enfin au véritable bonheur.

Elle était presque désormais, à entamer une nouvelle vie aux cotés d'Aydan et de leur fils. Dès son retour, elle lui avouerait enfin tout ce qu'elle avait sur le cœur et se délesterait de ses casseroles.

-             La dernière fois où je t'ai quitté, tu méditais comme si tu portais le poids du monde sur tes épaules, cela n'a manifestement pas changer.

Son cœur battant la chamade, elle se tourna vers la porte et sentit ses yeux s'embuer de larmes. Aydan tenait tendrement Awen endormi dans ses bras et lui souriait exactement comme le soir où il l'avait abordé sans tact au Sùil Beatha.

-             Tu l'as sauvé....

Il s'approcha lentement, son sourire radieux toujours accroché au coin de ses lèvres.

-             Je t'avais fait une promesse...D'accord, je n'ai pas tenu toutes les autres, mais celle-ci...Merde, ce n'est pas facile pour moi...

-             Aydan, nous avons tous les deux commis des erreurs, toutefois, elles appartiennent au passé. Ce qui compte vraiment est ici, murmura-t-elle en posant sa main sur sa poitrine.

-             Dès le début, j'aurai dû te dire que je voulais que tu reviennes dans ma vie, non parce que tu était ma femme légitime, enfin si un peu...Mais parce que jamais, je n'ai cessé de t'aimer, pas même une seule seconde. J'ai longuement pensé à nous, à toutes ces choses que je t'ai dite ce soir là et ces mots, je les ai regretté un million de fois. Ce n'était que mon satané égo....

-             Nous formons une belle paire de tête de mule, toi et moi, ria Enora en essayant ses joues d'une main tremblante.

-             Un duo extraordinairement bien assorti, je préfère.

-             Si tu veux...En fait, si je ne t'ai pas dit la vérité sur moi cette nuit-là, c'était à cause de la promesse que j'avais faite à ma mère...Elle a souffert chaque jours de sa vie en pensant que mon père l'aimait. Elle désespérait de trouver son affection....Seulement, il ne l'a jamais comprise et la battait sans relâche dans le but de l'endurcir. Je l'ai haï...Je les ai haï tous les deux....

-             Nous avons tous nos démons mo ghrà, il suffit simplement de les combattre pour s'en libérer.

Elle acquiesça et se pencha afin de regarder son précieux petit bébé. Au cœur du sommeil, il souriait, heureux et apaisé. Le cœur d'Enora se serra et pour la première fois depuis des siècles, ce n'était pas de souffrance, mais de bonheur.

-             T'ai-je déjà dit combien je t'aime Aydan St James ?

-             Pas assez souvent selon mes critères.

-             Qui sont ?

-             Chaque minutes de chaque heures.

Elle se mit à rire.

-             Oublie ça, ça créerait une surtension et ton égo colossal exploserait.

-             D'accord, alors disons au minimum cinq fois par jour, c'est ma dernière offre.

Enora se haussa sur la pointe des pieds, effleura les lèvres de son mari d'un baiser et murmura :

-             Je n'en trouverai pas de meilleure. Is breá liom tú le mo chroí go léir agus go léir m'anam, Aydan St James.

Il tendit la main, caressa son visage avec tendresse et lui sourit.

-             Quand je te disais ce soir là, que j'étais ta moitié d'orange, s'exclama-t-il en bombant le torse.

-             Pour une tactique de drague, elle était vraiment nulle, mais cela m'a fait bien rire sur le coup.

-             Tu es la seule que j'ai jamais considéré comme ma moitié, maintenant mon orange est entière.

-             Et ?

Un éclair malicieux s'imposa dans les iris émeraude d'Aydan.

-             Quoi donc ?

-             Tu n'aurais pas oublié juste un petit détail ?

-             Attends, laisse-moi réfléchir, rigola-t-il.

Elle roula des yeux. Aydan resterait toujours le pitre qu'elle avait connu et elle ne l'en aimait que plus.

-             Je l'ai sur le bout de la langue, mo ghrà, vient le chercher.

-             Andouille, notre fils dort dans tes bras et je n'ai pas envie que tu le lâches pour assouvir ta lubricité ! Ria-t-elle en lui décochant un clin d'oeil.

-             Tu ne perds rien pour attendre ! J'ai dix-huit mois de lubricité à rattraper et crois-moi chérie, tu ne dormiras pas durant des jours.

-             Vantard va !

Il l'attira vers lui avec son bras valide et serra contre son coeur, sa femme et son fils, sa famille, plus heureusement qu'il ne l'avait jamais été.

-             Is breá liom grá agat de mo shaol.