Chapitre 10 : Béa

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Béa sentit la présence de Dante sans même avoir besoin de se retourner, alors même qu'elle parlait avec Stéphanie et qu'elle aurait dû ne se concentrer que sur elle. Elle sut instinctivement qu'il n'était pas seul et elle entendit clairement Jennie l'accaparer, attirer son attention, visiblement sans succès. Béa ne s'expliquait pas le bond que venait de produire son cœur au moment où elle avait perçu la présence du garçon et encore moins pourquoi elle se sentait agacée, irritée, même, d'entendre la voix de Jennie l'accompagner.

Elle se tourna discrètement, dans l'espoir de pouvoir le voir sans être vue elle-même. Pas question qu'il la surprenne en train de le dévisager alors qu'elle s'était lâchement enfuie la veille. Elle n'avait aucune autre explication à donner sinon qu'il lui faisait un effet monstre et qu'elle redoutait de la réciprocité du phénomène. Elle refusait clairement de craquer pour un mec qui ne voyait en elle qu'une source d'information ambulante.

C'était bien Dante et Jennie qui s'avançaient vers les deux cousines mais autant pour la discrétion, quel que soit le mouvement, même le plus infime qui soit, elle aurait été démasquée. Dante l'avait vue, lui aussi et ne la quittait pas du regard, comme aimanté. Béa se détourna très rapidement, non sans avoir ressenti un pincement de plaisir ET de jalousie, et fixa Stéphanie avec des yeux implorants pour qu'elle trouve un sujet de conversation idéal et hilarant. Heureusement pour elle, sa cousine semblait avoir compris ce qui se tramait et se chargea de faire illusion.

- Je suis enfin allée au Lac Damné, annonça Stéphanie, jouant à l'idiote. Et figure-toi que je n'y ai vu aucun fantôme comme je m'y attendais !

- Pourquoi des fantômes ? Il est damné pas hanté. Grimaça Béa.

- J'en sais rien, mais c'est ce qu'on en dit, sache-le. Il y a eu une morte, dans ces eaux, après tout !

- Vous parlez du lac Damné ?

Béa ferma les yeux et respira un grand coup avant de se tourner face à Dante qui venait de les accoster, Jennie toujours accrochée à son bras, la mine boudeuse. Mais Béa ne voyait que les yeux marron de Dante fixés sur elle et qui lui donnaient l'envie de se pendre à son cou et de ne plus le lâcher.

- Oui, répondit Stéphanie, voyant que Béa ne faisait pas mine de parler. Vous y êtes déjà allés ?

- Une fois, un vrai repère à amoureux. Répondit Dante en lançant un regard équivoque à Béa. Béa, je peux te parler, une minute ?

- Qu'est-ce qu'il y a ? Répondit la jeune fille.

- Viens, s'il te plait.

Béa lança un regard éloquent vers Jennie mais celle-ci était bien trop concentrée sur ses ongles vernis pour s'en rendre compte. Au moment où elle se disait qu'elle allait attirer son attention, elle sentit qu'on lui attrapait le poignet et qu'on l'entraînait à l'écart, hors de portée de voix.

Béa redressa la tête et fusilla Dante du regard.

- Qu'est-ce qui te prend ? Gronda-t-elle, outrée. Sais-tu seulement ce que les gens pourraient penser en te voyant, toi, m'entrainer, moi, de la sorte ?

- Qu'est-ce qu'on en a à faire ? Avec les livres que tu lis, j'aurais cru que tu serais la dernière à te préoccuper de savoir si ce que tu fais est répréhensible ou non. Mais je me suis visiblement trompé.

Sur cette dernière tirade, le cerveau de Béa traita l'information d'une façon atypique, inhabituelle. Elle ne se préoccupa pas de savoir que Dante avait surpris l'objet de ses lectures mais s'inquiéta de voir qu'il semblait être déçu, qu'il allait se détourner et ne plus jamais la regarder.

Retour aux Origines (Tome 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant