Retour aux Origines (Tome 2)

Chapitre 13 : Mia

- Mia, tu as de la visite.

Mia était allongée sur sa couchette, seule puisque Kellan était parti s'aérer dans la cour, quand Vitto toqua et parla à travers la porte. Sa voix d'ordinaire enjouée était distante et elle sentit qu'elle n'allait pas particulièrement apprécié la visite. Qui cela pouvait-il être ? Hector venu la féliciter pour son excellent travail de persuasion ? Stéphanie, folle de jalousie, venue lui mettre les points sur les « i » quant à son fiancé ET à son ex-amant ? Ou bien Hugo ? Non, ce ne pouvait être Hugo. Elle s'était montrée très claire, la dernière fois, quand elle lui avait dit qu'elle n'éprouvait pas l'envie de le voir, il devait avoir saisi qu'elle était sincère.

Mia se redressa et demanda à Vitto d'ouvrir. La tête du garçon apparut, sombre comme elle l'avait imaginé, et il s'effaça pour laisser passer l'invité. Hugo avait une sale mine, les cheveux bruns en bataille, des cernes sous ses yeux verts et un teint encore plus pâle que d'ordinaire. Même ses vêtements étaient dépareillés. Dès qu'il entra, il la chercha du regard et la trouva à l'instant, la scruta un long moment en silence avant de s'avancer dans la pièce et de venir se poster entre les deux couchettes. Mia le vit jeter un coup d'œil à celle de Kellan avec un air suspicieux mais soupirer de soulagement quand il comprit que les lits étaient fixés aux murs. Il n'y avait donc aucune possibilité pour qu'ils dorment ensemble.

Du coin de l'œil, Mia aperçut Vitto qui ne faisait pas mine de bouger. Il restait droit dans l'embrasure de la porte et fixait la nuque d'Hugo d'un regard ombrageux. D'un signe de tête encourageant, Mia lui indiqua de se retirer. La porte se referma durement derrière lui, ce qui fit sursauter Hugo. Celui-ci se recentra de nouveau sur Mia mais toujours sans mot dire. La jeune fille commençait à perdre patience, elle ne lui avait nullement demandé de venir ici, elle l'en avait même fortement dissuadé et la voilà à devoir souffrir de le voir si près d'elle sans qu'il ne pipe mot. N'était-ce pas totalement inouï ? Indécent, de sa part d'attendre d'elle de faire les premiers pas alors que c'était lui la source de toutes leurs déchéances ?

Que cherchait-il, en venant ici ? Il ne pouvait ignorer combien elle avait souffert de ne pas recevoir de ses nouvelles, son désespoir quand la lettre de son grand-père lui était parvenue et qu'elle avait appris non seulement qu'il allait se marier avec une autre mais qu'en plus, il lui mentait depuis le début, son errance et sa folie qui s'était ensuivie. Il ne pouvait ignorer la peur qu'elle avait ressentie quand elle et ses deux amis s'étaient retrouvés pris en chasse par ses semblables, quand ils avaient été jetés dans une camionnette puis poussés à travers un Portail. Il ne pouvait ne pas savoir qu'elle avait été morte de trouille quand on l'avait séparée de ses amis et qu'on l'avait mise dans une cellule avec un garçon si beau qu'il l'en terrifiait. Il ne pouvait ignorer tout cela, c'était inconcevable et même s'il l'ignorait réellement, cela ne démontrait qu'une chose : il se fichait pas mal d'elle. Ô combien elle avait souffert en le voyant offrir à Stéphanie tout ce qu'il lui avait refusé du temps où il était supposé l'aimer. De le voir embrasser sa cousine avec plus de passion qu'il n'y avait jamais eu dans leurs propres étreintes, de le voir la toucher plus intimement qu'il ne l'avait fait avec elle. Et désormais, elle devait tirer un trait sur lui car il allait se marier et elle aussi.

Depuis qu'elle avait été officiellement annoncée comme la fiancée de Kellan, ils s'étaient mis d'accord sur le fait qu'il n'y aurait aucun sentiment amoureux entre eux, qu'ils resteraient strictement amis mais qu'ils partageraient de réels moments de tendresse et d'amour car cette promiscuité leur manquait à tous les deux. À plusieurs reprises, durant la semaine qui avait suivi l'annonce de leurs fiançailles, ils avaient exploré cette relation charnelle et s'il n'y avait pas l'excitation, l'envie primitive qui les animait quand ils se trouvaient chacun à proximité du véritable élu de leur cœur, ils trouvaient un certain réconfort dans leurs étreintes. Et si cela pouvait aider Mia à oublier Hugo, ou, tout du moins, à lui faire perdre l'emprise qu'il avait sur elle, elle était preneuse.