Chapitre 18 : Hugo

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La neige qui était tombée durant toute la nuit finit par réveiller Hugo, emmitouflé dans sa couette. Malgré les épaisseurs qui le recouvraient, il sentait que le froid s'immisçait en lui et il se retourna sur le dos, s'obligeant à ouvrir les yeux. Il resta un moment immobile, le regard fixé sur le plafond, sans rien dire, sans même penser à rien. Ne pas penser au fait qu'aujourd'hui, dans deux heures exactement, il se retrouverait devant l'hôtel, face à Stéphanie et qu'il y aurait Mia aux premières loges. Le visage de la jeune femme lui revint tel qu'il l'avait vu pour la dernière fois, triste mais résigné, doux mais ferme. Il s'étonnait lui-même de sa ténacité à l'aimer, son refus instinctif de l'oublier alors que beaucoup de choses dépendaient de ça, justement. Lui, si égoïste et si paresseux avant, avait trouvé le seul être auquel il ne pouvait renoncer.

Hugo secoua la tête et bascula les jambes en avant avec détermination. Il n'était plus temps de ressasser ce genre de pensées. S'il voulait sauver Mia, tout dépendait de sa capacité à garder la tête froide et à agir rapidement. La veille, sous ordre de Matthieu qu'il avait croisé alors qu'il marchait avec sa mère, il s'était rendu chez les Marcedo pour la deuxième fois depuis leur arrivée. Il avait d'abord eu du mal à extraire les souvenirs de la première fois de sa tête tant il faisait partie des pires qu'il ait connus, et il avait bien vu que les autres n'étaient pas très à l'aise avec lui. Après tout, il était celui qui était à l'origine de toutes les déconvenues de Mia. Celui à cause de qui Mia se trouvait actuellement seule, dans une cellule glaciale. Hugo avait vu Kellan assis aux côtés de Katarina. Les deux se tenaient la main et de là où il s'était trouvé, Hugo avait senti l'alchimie étrange qui émanait d'eux deux. Tous les autres semblaient serrés les uns contre les autres. Il y avait même Dante, un bras sur l'épaule de Béa et Marc, très proche de Paul. Hugo s'était demandait s'ils allaient un jour officialiser la nature de leur relation car les œillades en continu et les caresses furtives, ça allait un moment, mais un moment seulement. Quant à Olivia, elle était bien la seule à ne pas l'observer avec méfiance. Elle savait jusqu'où Hector était capable d'aller pour obtenir satisfaction et elle était consciente qu'Hugo n'avait jamais été qu'un pion dans un jeu qui le dépassait. Et puis, la séance avait débuté et Hugo s'était concentré sur le plan de Matthieu. Un plan qui lui semblait bien fragile, apte à vite être refoulé, mais qu'il pensait toutefois envisageable. Tout se jouerait sur le nombre d'habitants qui se rangeraient de leur côté.

Hugo se passa une main distraite dans les cheveux et se dirigea mollement vers sa salle de bain, juste au moment où sa mère toquait à la porte.

- Hugo, tu es levé ?

Diana passa la tête par la porte et son regard vers se posa sur le visage fatigué de son fils. Un instant, de l'inquiétude mêlée à de la compassion se lut à travers son regard, mais tout disparut en un éclair et elle retrouva son visage guindé. Hugo soupira et s'arrêta sur le seuil de la porte de sa salle d'eau. Pourquoi sa mère ne pouvait pas oublier le rôle qu'elle jouait une minute ? Il aurait eu grand besoin de ses conseils et de son soutien.

Diana entra et posa une housse de costume sur le lit défait de Hugo. Ce dernier n'avait pas pris part aux préparatifs, si bien qu'il verrait pour la première fois sa tenue seulement à la sortie de la douche.

- Fais attention à ne pas abîmer ton costume et tout ira bien. Déclara Diana d'une voix légèrement tremblante. Ce sera un magnifique mariage.

- Pourquoi tu fais comme si tout allait bien, maman ? L'interrompit Hugo d'une voix cassante. Je sais que tu aimes toujours Mia comme ta fille et tu sais qu'elle aura le cœur brisé, tout à l'heure. Et à moi, tu as pensé à moi ? Tu sais que je ne veux pas de ce mariage.

- Dépêches-toi d'aller à la douche, tu vas être en retard. On se retrouve en bas.

Hugo serra les poings mais s'abstint de répliquer une nouvelle fois. C'était comme de tourner une manivelle dans le vide : il n'y avait pas de prise. Tout ce qu'il disait entrait par une oreille et sortait de l'autre. Il attendit que sa mère soit sortie avant de s'enfermer dans la salle de bain et de prendre une profonde inspiration. Si cela ne tenait qu'à lui, il ne se laverait pas, ni s'habillerait comme pour un jour de fête. Il serait venu en t-shirt et en jean, aurait prononcé ses vœux sans vraiment penser ce qu'il disait et serait reparti aussi sec. Cependant, il ne contrôlait rien et n'avait pas voix au chapitre. Comme d'habitude.

D'une main agitée, il commença à faire couler l'eau de la douche et attendit à l'extérieur que la chaleur se diffuse dans la pièce. Pas question de se rendre dans le bassin. Ce serait sa petite touche de rébellion. Dès qu'il fit assez chaud, il entra sous le jet et se savonna en vitesse, sans prendre vraiment le temps de se récurer. Et puis, une idée l'effleura et il changea d'avis. Si le plan fonctionnait, et aussi peu convaincu fût-il, il se pourrait qu'à la fin de la journée, au lieu d'être marié à Stéphanie, il retrouve Mia. Et s'il s'avérait que tel soit son destin, il lui faudrait être divinement beau. Alors, il fit de son mieux pour se débarrasser de toute la saleté qui aurait pu se déposer sur son corps durant la nuit et la journée de la veille et se shampouina méticuleusement les cheveux pour qu'ils soient brillants. Quand enfin il sortit de la douche, il se contempla dans le miroir et décida que Mia pourrait le trouver craquant. Du moins, il l'espéra. Il sécha ses cheveux et les ébouriffa exactement comme il savait qu'elle les aimait puis il revêtit le costume de la mort.

- Tu es magnifique, grand-frère. Sourit Béa en apparaissant à sa droite, légèrement en retrait.

- Ouais, c'est vrai que tu n'es pas trop mal. Approuva Marc, bourru, à sa gauche. Tu fais presque crédible en futur marié.

- Si seulement la future mariée savait ce qu'on lui réservait...Avança mystérieusement Béa.

- Attendez, rien n'est encore fait. Protesta fébrilement Hugo. Si ça se trouve, rien de tout ça ne marchera.

- Ça marchera. Forcément. L'assura Béa avec conviction. Mia et toi méritez d'être ensemble. Marc mérite de pouvoir aimer Paul sans honte. (L'intéressé rougit, ce qui fit rire ses frangins) Et je mérite de pouvoir imaginer mon mariage avec Dante. Ce plan, s'il fonctionne, ne sauvera pas seulement tes fesses, mais celles de tous ceux qui aspirent à la liberté.

Hugo hocha la tête. Sa sœur, une fois encore, avait raison.

- Maintenant, il faut que l'on descende. J'entends maman qui s'impatiente. Fit remarquer Marc en faisant apparaître un nœud papillon. Tiens, tu l'as oublié.

- Oh, merci...

Hugo noua le petit agrément autour de son col et coula un regard vers eux. Béa était vêtue d'une jolie robe verte, cintrée au niveau de la taille et de chaussures à talons aiguilles assorties. Quant à Marc, ce n'était pas très original. Costume blanc, cravate. Il avait l'air très guindé, très homme d'affaires. Ça lui allait bien.

Quant à lui, il avait l'air d'un pingouin dans son costume noir.

- Allons-y. Déclara-t-il. Je suis prêt.

Béa lui sourit et s'empressa de lui prendre la main et de la serrer fort dans la sienne. Quoi qu'il arrive, ils étaient ensemble et même s'il se retrouvait marié à sa cousine, il aurait au moins son frère et sa sœur pour lui réchauffer le cœur.     

Retour aux Origines (Tome 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant