Chapitre 41 : Ne rien dire était la moindre des choses

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- Son père est mort ? S'exclama Ron.
Harry jeta des coups d'œil inquiets autour de lui tandis que je fronçais les sourcils. Nous étions dans notre sale commune non d'un hippogriffe ! Ne pouvait-il pas se montrer plus discret ?!
- Mais je ne comprends pas, finit par dire Harry. Pourquoi tu n'es pas restée avec lui ? Il doit avoir besoin de soutient ou...
- Je pense qu'il a besoin d'être seul, répliquai-je.
Harry approuva d'un simple hochement de tête.
Je ne pouvais pas leur en dire plus, je ne pouvais pas leur dire à quel point la relation entre Drago et moi s'était dégradée. Je ne pouvais pas leur dire qu'il me faisait peur... Après tout, Tonks se chargeait déjà d'étudier mes craintes.

La salle commune se vida peu à peu, tandis que Ron et Harry essayaient de déterminer qui avait pu s'en prendre au père de Drago. Ils étaient du même avis que Rogue. C'était probablement un mangemort qui avait voulu faire payer à Lucius Malefoy sa trahison. Ce que je trouvais cependant étrange dans tout ça, c'était la disparition de Narcissa. Pourquoi n'avait-on pas retrouvé son corps au côté de celui de son époux. L'avait-on enlevé ou tout simplement épargné ? Et s'il s'agissait vraiment de Bellatrix ? Peut-être avait-elle finalement un cœur pour épargner ainsi sa sœur. C'était la seule solution plausible à ce stade.

Durant toute la semaine, un nouveau comportement attira mon attention. La semaine précédente, j'avais surpris d'étranges lueurs dans les regards des Serpentard, comme s'ils avaient discrètement voulu me témoigner leur soutien. Cependant, cette semaine n'avait rien à voir. Ils semblaient être redevenus aussi froids et détestables qu'auparavant. Avaient-ils finalement rejeté les espérances de Drago de les voir rejoindre notre camps ? Ce dernier avait-il trop insisté ? Etait-il allé trop loin et trop vite ? Ou pire, m'avait-il finalement mentis au sujet de ces fameuses lettres ? Après tout, peut-être que j'avais juste imaginé le discret changement de comportement des Serpentards. Peut-être qu'ils n'avaient échangé aucunes lettres avec Drago. Pourtant... Les lettres utilisées pouvaient être les leurs : D pour Daphné ou encore B pour Blaise. Ce fut donc la peur au ventre que je rejoignis les quartiers de l'Ordre le vendredi soir.
Comme je m'y étais attendu, Drago ne vint pas m'accueillir. Je le trouvai au salon, plongé dans un livre. Il ne leva même pas les yeux vers moi. L'époque où je m'inquiétais seulement de ses intentions à mon égard était tellement loin... L'époque où j'avais eu peur de m'attacher à lui, de lui témoigner mon affection... Je regrettais tous ces instants, je les regrettais amèrement ! Que s'était-il passé depuis ? La réponse était claire et nette, il avait changé de camps pour moi et il avait dû rapidement le regretter.

Face à la totale ignorance de Drago à mon égard, j'avais finis par monter dans « notre » chambre pour commencer ma dissertation de botanique. Au bout d'un moment, après une heure d'intense lutte contre moi-même, j'avais finis par ouvrir le fameux tiroir où j'avais découvert les lettres, mais je n'y avais rien trouvé. Je retins un rire mauvais. Drago ne me faisait pas confiance et les avais caché à un autre endroit. Pourquoi ? Parce qu'il me dissimulait quelque chose ! Pourtant si Drago était encore là, entre ses quatre murs, en sécurité, c'est que Tonks n'avait encore rien découvert à son sujet. Peut-être était-il particulièrement discret, mais il cachait quelque chose, je pouvais en mettre ma main à couper.
Lorsqu'il fut l'heure de dîner, je descendis en bas, sans avoir réellement avancé ma dissertation, tant j'étais préoccupée. Je m'étais attendue à dîner seule, mais Drago était là, assis sur l'une des chaises de la salle à manger, la mine sombre. Une nouvelle fois, il ne sembla pas remarquer ma présence. Où peut-être qu'il souhaitait juste m'ignorer. C'était sûrement ça. Kreattur nous servit nos plats et nous commençâmes à manger dans le silence le plus complet. Drago ne mâchait pas spécialement fort, mais le silence mortel de la salle à manger, amplifiait le moindre bruit. Il attrapa son verre d'eau qu'il but d'un trait, planta sa fourchette dans un morceau de pomme de terre et la porta à sa bouche. Ce son de mastication me crispait au plus haut point.
- Drago... tentai-je, ni tenant plus.
- Tais-toi, le son de ta voix m'horripile, me répliqua-t-il sèchement sans quitter son assiette des yeux.
Sa réponse, si froide, si soudaine, si dure, me fit lâcher ma propre fourchette qui tomba dans mon assiette dans un tintement aiguë.
- Qu'est-ce que tu as ? Demandai-je en prenant sur moi.
Si je voulais obtenir des réponses il fallait que je m'y prenne correctement. Drago releva le menton, lentement et finit par planter son regard dans le mien. Pourtant il ne répondit rien, se contentant de me fixer de ses yeux d'aciers. J'avais connu le Drago prétentieux, doux, peureux, drôle, idiot, amoureux, lâche, inventif ou encore méchant. Mais le Drago effrayant, je ne le connaissais que depuis deux semaines. Je voulus insister de nouveau, mais ma bouche s'ouvrit sans laisser passer le moindre son. J'avais une horrible boule de tristesse coincée dans ma gorge. Mes yeux se mirent également à me picoter et une discrète larme finit par glisser lentement le long de ma joue, sans que je puisse la retenir. Le regard de Drago, qui me fixait toujours, se transforma en une haine sans nom. Je voulus de nouveau parler, mais je restai toujours aussi stupidement muette. Drago se leva alors brusquement se chaise, la retournant sur le sol au passage et se précipita vers moi. Il me tira par le col de mon pull pour me forcer à me lever et me colla violement contre le mur.
- NE T'AVISE PAS DE LAISSER LA MOINDRE AUTRE LARME SORTIR !
- Drago... parvins-je à sangloter.
- FERME-LA ! Hurla-t-il de plus belle. Comment oses-tu pleurer ? Comment oses-tu te comporter comme ça devant moi ?
- Tu me fais peur, marmonnai-je terrifiée en tentant de me dégager de son étreinte.
- Je t'ai fais peur ? Répéta-t-il d'une voix aiguë. Je te fais peur ?
Il me tira quelque peu vers lui, avant de me plaquer de nouveau avec force contre le mur. Ma tête s'y cogna et je laissai échapper un petit gémissement de douleur.
- Et là ? Tu as peur ? Me lança-t-il.
J'avais l'impression que ses yeux allaient sortir de leur orbite.
- Tu as peur Granger ? Ajouta-t-il en insistant sur l'emploi de mon nom de famille.
Voilà plus de trois mois qu'il ne m'avait pas appelé ainsi et bizarrement, même après tout ce qu'il m'avait fait enduré depuis deux semaines, j'eu l'impression que nous étions enfin arrivés au point de non retour. Il m'avait appelé Granger.
- Si tu savais à quel point je te hais Granger, poursuivit-il. Et en plus tu oses pleurer devant moi ! N'as-tu pas la moindre dignité ? N'as-tu pas honte de te comporter ainsi alors que ton monde est si rose ? Tu ne mérites même pas que je touche ou que je t'adresse la parole ! S'exclama-t-il en me relâchant brusquement, comme s'il s'était brûlé. Elle ose pleurer, poursuivit-il en explosant d'un rire froid tout en me tournant le dos pour rejoindre sa chaise.
Il l'a ramassa mais ne s'assit pas dessus pour autant. Au lieu de ça, il se tourna de nouveau vers moins, un regard haineux déformant les traits de son visage. Quant à moi, j'étais figée, totalement figée.
- J'ai tout fait pour toi ! J'ai quitté mon camp, j'ai quitté mon foyer, mes amis, j'ai rejoins l'Ordre, j'ai demandé à ma mère de trahir Voldemort et de se mettre en danger ! Et qu'est-ce que j'ai en échange ? Une sale gamine qui pleure parce que je lui fais peur ?
Il explosa d'un nouveau rire froid.
- MON PERE EST MORT ! Hurla-t-il. Mon père est mort et c'est à cause de toi ! UNIQUEMENT A CAUSE DE TOI !
- Je comprends que tu ais besoin de blâmer quelqu'un Drago, dis-je tout de même. Mais...
- Mon père est mort Hermione, mais j'imagine que tu ne sais pas ce que ça fait hein ? De savoir qu'on ne sera jamais vengé, qu'on ne serait plus jamais en paix avec soi-même !
- Nous retrouverons le coupable et il sera puni. Je te le promets Drago, parvins-je à dire d'une voix mesurée.
- Puni ? Répéta-t-il en s'étranglant. Pourquoi puni ? Nous sommes débarrassés de mon père, débarrassé de l'homme qui a quitté les rangs de Voldemort seulement pour sauver ses petites fesses ! Débarrassé de l'homme qui n'était plus dans ses bonnes grâces et qui voulait coûte que coûte mettre à exécution ses projets : tuer chaque sorcier qui avait le moindre sang de moldu dans les veines pour ne laisser qu'une race pure et noble. Et tu veux punir cette personne ? Toi, tu veux la punir, fille de moldue ?
Je fixai Drago sans savoir quoi répondre.
- VAS-Y ALORS ! Hurla-t-il de nouveau. PUNI-MOI HERMIONE ! Grande justicière ! C'est vrai que je n'ai pas assez souffert !
Je lui adressai un regard horrifiée. Voulait-il dire que...
- Oui, j'ai tué mon père, poursuivit-il. Parce que mine de rien, il aurait pu être une bien plus grande menace que Voldemort lui-même ! Je l'ai tué parce que c'était la seule solution, je l'ai tué parce que je croyais t'aimer. Ah l'amour... La plus belle farce de l'histoire ! Voldemort avait tout compris dès le départ ! L'amour n'existe pas réellement, l'amour n'est qu'un envoutement destiné à précipiter notre déchéance.
Je sentis de nouveau les larmes me monter aux yeux, accablée par tout ce que j'apprenais.
- Si tu oses pleurer Hermione, je t'assure que je te tue, déclara-t-il en pointant sa baguette sur moi. Tu es un monstre, ajouta-t-il.
Je ravalai prestement mes larmes, tandis qu'un silence pesant s'insinuait entre nous. J'aurais dû parler, dire quelque chose, mais j'en étais incapable. Une foule de sentiments me submergeait et je n'aurais su dire lequel était le plus fort. L'horreur ? La culpabilité ? La tristesse ? La colère ? L'incompréhension de son acte ? J'entendis la porte d'entrée s'ouvrir et se refermer doucement. Des pas avancèrent dans notre direction et Drago sembla enfin sortir de son mutisme. Il rangea sa baguette, se rassit à table et planta sa fourchette dans un morceau de viande. Lupin apparu finalement et Drago semblait ne jamais s'être levé de son siège. Rien ne s'emblait s'être passé finalement.
- Quelque chose ne va pas ? Me demanda Lupin en fronçant les sourcils tandis que Drago mangeait presque paisiblement.
- Je... c'est les... je crois que les pommes de terre ne passent pas bien, finis-je par dire. Je crois que je vais monter me coucher.
Lupin me regarda quitter la salle à manger sans rien dire et je filai à l'étage supérieur.

Après un bref passage aux toilettes, expulsant le peu que j'avais mangé, j'étais allée m'allonger dans la chambre adjacente à celle que je partageais autrefois avec Drago. Il avait tué son père et me prenait pour principale responsable de son acte. J'étais coupable, plus que coupable. Si je n'avais pas été là, si je n'avais jamais existée, rien de tout cela ne serait arrivé. Drago serait en famille sans la moindre mort sur sa conscience. J'avais mutilé son âme. Finalement Drago, ne m'avait pas uniquement choisi moi, il avait choisi l'Ordre. Il avait choisi le camp juste et bon. Il avait choisi d'acter au nom d'Harry Potter, mettant son propre bonheur de côté. Ainsi sa colère à mon encontre venait de là. Son comportement avait certainement changé à partir du moment où il avait pleinement décidé de mettre fin aux jours de son père, pour finir par le tuer et me haïr. Drago avait raison, je ne méritais pas de pleurer devant lui, il fallait donc que je le fasse maintenant, en silence, loin de son regard, loin de sa présence.


Le lendemain, à onze heures, je n'étais toujours pas sorti de ma chambre. Après tout, comment aurais-je pu affronter son regard ? Comment aurais-je pu me tenir près de lui après tout ça ? Il n'avait pas à supporter la présence de celle qui avait indirectement tué son père. Je ne fus pas dérangée une seule fois, jusqu'à seize heures. Tonks, après avoir frappé plusieurs fois à ma porte, finit par entrer, visiblement inquiète. Lorsqu'elle me vit lever les yeux vers elle, elle sembla aussitôt soulagée de voir que j'allais « bien ». Elle vint s'asseoir sur mon lit dans un petit soupire d'aise.
- Les pommes de terre ? Me lança-t-elle. Lupin m'a dit.
Je me contentai d'hocher la tête.
- Je viens au sujet de Drago, poursuivit-elle. Je n'ai rien constaté d'étrange et...
- Il n'y a rien Tonks, répondis-je aussitôt. Je suis... stupide.
Elle arqua un sourcil interrogateur.
- Drago était juste... Il ne voulait plus être avec moi. Nous en avons parlé hier.
- Oh, fis Tonks mal à l'aise.
- Tu peux donc tout cesser, Drago est plus que des nôtres, je peux t'en assurer.
Tonks sembla vouloir dire quelque chose, mais se ravisa. Elle se leva finalement de mon lit, toujours mal à l'aise, lissa les pans de sa robe pourtant parfaitement droits et finit par sortir de la chambre, non sans m'adresser un regard compatissant.
Ne rien dire concernant l'acte de Drago était la moindre des choses. La moindre des choses...

La visite suivante fut à dix-huit heures. Ron me rejoignit et j'en conclus que Tonks n'avait pas réussis à tenir sa langue, à en juger par l'air réjouit mal dissimulé de mon ami. J'eu aussitôt envie de l'envoyer se faire voir. Après m'avoir salué, il se balança d'un pied à l'autre, d'un air pataud, comme s'il essayait de trouver quelque chose d'intelligent à dire.
- Ca va les pommes de terre ?
Ce n'était pas intelligent, mais cela ne m'étonna pas. Ron n'avait jamais su trouver les mots que l'on voulait entendre. De toute façon, rien n'aurait pu me remonter le moral.
- Ca va mieux, finis-je par répondre le plus poliment possible.
Il se balança de nouveau d'un pied à l'autre et j'avais envie de lui hurler de sortir lorsqu'il finit par ouvrir la bouche et la porte en même temps.
- Je vais chercher Harry !
Je laissai échapper un profond grognement. S'ils pensaient tous que j'avais eu une indigestion, ne pouvaient-ils pas me laisser tranquille ? Harry arriva seulement quelques minutes plus tard.
- Les membres de l'Ordre seront presque tous là à dix-neuf heures, dit-il. Tu voudras te joindre à nous ou tu n'as pas envie de... manger de pommes de terre ?
Je toisai Harry d'un œil scrutateur. « Pommes de terre » était-il en réalité le terme pour désigner Drago ? Comme Tonks et Ron en avait fait usage avant Harry. Certainement et cela m'agaça au plus au point. Ce n'était pas moi qui était à plaindre mais Drago ! Ce dernier devait d'ailleurs trouver leur manège jusqu'à ma chambre insupportable.
- Non, je vais venir, finis-je par répondre.
Je n'allais en effet pas me cacher éternellement derrière la porte de la chambre et je ne pouvais pas infliger ça à Drago. Je ne pouvais pas, tous autant qu'ils étaient, les laisser me plaindre.
- Il faut que vous soyez gentil avec Drago, dis-je en me levant de mon lit. Son père est mort après tout, il a besoin du soutien de tout le monde. Fais passer le mot à tes frères, ajoutai-je à l'attention de Ron.
- Oui, bien sûr, répliqua vivement ce dernier comme si l'état de Drago l'inquiétait réellement.
J'eu encore plus envie de l'étrangler, parce qu'il se réjouissait de notre « séparation » avec un enthousiasme à peine dissimulé. Harry le remarqua également, puisqu'il lança un regard réprobateur à son meilleur ami.

Lorsque nous rejoignîmes la salle à manger pour le dîner. Tout le monde était déjà là. Ils m'adressèrent tous un accueil chaleureux ce qui acheva de me miner. Sans que ce soit réellement intentionnel, j'adressai un rapide coup d'œil à Drago. Il semblait bouillonner de rage de les voir tous aussi prévenants avec moi.


- On a déjà dit qu'il fallait abandonner l'idée des géants ! S'exclama Lupin en levant les yeux au ciel.
- Ah oui et qu'est-ce que tu proposes d'autre ? Lui lança Rogue d'une voix glaciale. Tes amis loups-garous peut-être ?
- Ca pourrait être une bonne idée ! Intervint Ron.
- Non ! Répliquèrent Rogue et Lupin d'une même voix.
Tonks se tourna vers lui pour lui expliquer que les loups-garous étaient totalement hors de contrôle durant une transformation et qu'il était impossible de les avoir comme allier, puisqu'ils ne feraient aucune différence entres les deux camps. Lorsque Ron, demanda s'il était tout de même possible de les dresser, je vis Lupin se retourner vers lui pour lui jeter un regard courroucé. Cela m'aurait peut-être fait rire dans d'autres circonstances. Oui, dans d'autres circonstances.  



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