Le Professeur se réveilla dans l'obscurité. Il se sentait fourbu et une migraine sourde résonnait entre ses oreilles. Il bredouilla quelques paroles incohérentes, les restes d'un cauchemar dont il ne se souvenait déjà plus. Les souvenirs de ce qu'il s'était passé la veille – la terreur, la mémoire qu'il avait gardée longtemps enfouie, le contact de la main d'Alpha sur son dos...
- A... A... Alpha ! s'exclama le scientifique qui commençait à paniquer.
Il l'avait laissé seul. Après l'avoir électrochoqué. L'humain était peut-être même mort... La respiration et le rythme cardiaque de l'Akaïa s'accélérèrent brusquement.
- Alpha !
- Je suis là...
La voix endormie de l'humain était montée juste devant son nez. L'humain était allongé tout près de lui... Songeant à ce qu'il avait fait avant de perdre conscience, le scientifique se mit à trembler sans pouvoir se relever :
- Alpha... Je... je...
- Venez là... grinça le prisonnier.
Frissonnant de terreur, des larmes jaillissant de ses paupières, l'Akaïa sentit l'humain s'emparer de lui.
- S'il... s'il vous plaît, je... je... je regrette... je... j'ai eu...
- Silence.
Le Professeur sentit les longues jambes d'Alpha enserrer les siennes, ses bras l'entourer et l'une de ses mains le forcer à poser la tête contre son cou.
- Pourquoi...
- Essayez de vous rendormir, ordonna sèchement le prisonnier. Je suis moi-même fatigué à cause de vos petites simagrées. Alors respirez, détendez-vous, et dormez, ou je vous brise les os.
Et le Professeur était si bien emprisonné entre les bras du grand humain qu'il ne pouvait que le croire sur parole quant à cette dernière menace. L'odeur étrange du bois de Siam envahit les narines du scientifique.
- Vous... vous n'allez pas vous venger de moi ? murmura le pauvre Akaïa en fermant les yeux, craignant d'entendre la réponse.
- Bien sûr que si, rétorqua la voix mauvaise d'Alpha, son souffle brûlant tombant sur le visage du Professeur. Avec les intérêts, bien évidemment. À présent, si j'entends une fois encore le son de votre voix, je mets ma menace à exécution !
Aussi étonnant que cela puisse paraître, le Professeur s'endormit en quelques minutes...
Le lendemain matin, l'Akaïa s'éveilla allongé sur un matelas, dans son bureau. Une odeur terriblement appétissante flottait dans les airs. Ça sentait le bacon aux œufs. Le scientifique saliva presque aussitôt : il réalisa seulement alors qu'il mourait de faim. Lorsqu'il se releva, son bandage à la tête glissa au sol. Il vit avec stupeur le prisonnier préparer deux assiettes sur le bureau – qu'il avait débarrassé – dans lesquels deux petits déjeuners attendaient. L'humain leva les yeux vers l'humanoïde et sourit :
- Pas trop tôt. Il est midi. Je commençais à avoir bien trop faim, et j'ai improvisé avec vos réserves et votre petite cuisinière. Ingénieux, ceci dit, d'installer une cuisine dans un messinwall, nota Alpha en pointant du doigt le mur, habituellement lisse et sans aspérité, mais où on discernait maintenant une sorte d'immense tiroir où fumaient encore une poêle et deux casseroles.
Le Professeur déglutit. Il ne comprenait pas.
- Vous... vous...
- Je meurs de faim, oui !
- Non, je... Je ne comprends pas, Alpha, fit le scientifique d'une voix douce. Vous aviez dit que vous vous vengeriez...
- La vengeance est un plat qui se mange froid. En revanche, cet excellent bacon et ces œufs reconstitués seront meilleurs chauds, alors asseyez-vous.
VOUS LISEZ
Alpha - Inoculation
Science FictionSci-Fi. Le peuple des Akaïas a écrasé l'humanité et un homme rebelle est tenu captif dans un laboratoire pour y subir des expérimentations. Un jeune scientifique apitoyé accepte de le faire sortir de sa cage, mais il ignore qu'il vient de libérer un...