Chapitre IV

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Assise sur le comptoir, face à mon bel inconnu, une petite moue fixée sur mon visage, je faisais semblant de me limer les ongles, seulement pour avoir l'air occupé, et non de m'être ennuyée pendant trois heures à cause de clients inexistants ! C'était une technique comme une autre de draguer un garçon. J'ai toujours été douée pour cerner les gars ; ceux qui préfèrent qu'on soit collée à eux, ceux qui nous veulent admiratives de leur talent dans n'importe quel activité, ou encore ceux, qui sont attirés par celles qui adopte la philosophie "fuis-moi, je te suis". Mon bel inconnu était un de ceux-là.


Alors évidemment que j'étais heureuse de le voir. Si je pouvais me souvenir de mon rêve, je suis presque sûre qu'il a passé la nuit dans mes pensées. Sa petite visite d'hier a redistribué les cartes de mon été : peut-être que ce ne serait pas si mauvais de travailler à quelques mètres de l'endroit où il passait ses journées de juillet.


- Qui t'as dit de m'appeler beauté ? demandai-je enfin.

- Tes yeux ?

- Ah oui ? je relevai la tête pour le fixer, il semblerait que tu n'aies pas bien lu.

- Regarde-moi dans les yeux ma belle.


Je m'exécutai, avec un sourire en coin. Il avait un regard profond, et pas un de ces bleus traditionnels chez les surfeurs, non, lui ses yeux étaient colorés d'un marron puissant, et il était brun, plutôt foncé, presque noir. Mes yeux ne pouvaient quitter les siens, c'est comme s'il avait pris mon regard en otage. Je crois bien que c'était mon point faible, mes yeux allaient me trahir. Il avait l'air très doué en matière de drague lui aussi.


- Désolée de te contredire beauté, mais tes yeux sont presque en train de m'appeler. Ils hurlent, je les vois !

- Et qu'est-ce qu'ils veulent, si tu les connais si bien ?

- Que je m'approche, doucement pour commencer. Comme ça, tu vois ?


Il se dirigea lentement vers moi. Il faisait tout ce qu'il disait et j'avais grande peine à ne pas laisser paraître mon envie qu'il ne s'arrête pas, sur mon visage. Ma bouche se crispait dans un sourire enjôleur, de moins en moins crédible à mesure qu'il s'approchait.

Heureusement, la sonnette de la porte retentit alors qu'il n'était plus qu'à moins d'un mètre de moi.

Sauvée par le gong!


- Dommage, ça aurait pu être sympa, murmura-t-il, son souffle effleurant mes lèvres, je reviendrai pour terminer ce qu'on a commencé ma belle.

- Reviens ou ne reviens pas, ça m'est égal ! lançai-je ayant l'air le plus sûr de moi que possible.

- N'oublie pas que je lis en toi et que je sais ce que tu penses ! dit-il avant de passer la porte de la supérette pour rejoindre la plage.


Je le regardais s'éloigner ; cette fois, mes yeux n'essayaient pas de paraître autre chose. Je savais très bien ce dont j'avais envie, et ce n'est pas lui dire le contraire qui me fera oublier ça. Je crois bien que j'avais besoin de lui dans mes longues journées de travail de cet été.


- Il est mignon le petit !


Je sortis brusquement de mes pensées. L'homme qui avait passé la porte au moment crucial me regardait avec un sourire en coin.

Juste un été. (terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant