VIII

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« Il lut tout comme elle le seul mot en grec ancien griffonné dans une écriture élaborée en haut de la page. Ça disait : Erchomai — J'arrive. »

-Cassandra Clare, La cité du feu sacré.

Elias

-Je n'en reviens pas qu'on soit occupés de faire ça ! Je viens de finir tout mon travail pour la fac et je voudrais enfin pouvoir profiter de mes vacances. Mais non, tu m'embarques dans tes conneries !

Cléa pousse une énième plainte et me fusille du regard. J'ai de la chance qu'on soit au café et pas chez moi sinon elle m'aurait déjà frappé, c'est sûr.

Hier, en sortant de chez sa grand-mère je lui ai tout répété, mot à mot. Elle a explosé de rire au passage sur son destin vis-à-vis des forces du mal mais le reste du temps, elle s'est contentée de lever les yeux au ciel.

-Elle est tarée de toute façon, m'avait-elle dit.

A la fin, je l'avais supplié de m'aider à faire des recherches. Je lui avais dit que je n'aurais pas une bonne note à mon devoir si je ne parlais pas de cette partie (ce qui est partiellement faux) et avais fini par lui faire ma tête irrésistible de chaton en détresse. Elle avait accepté, à contre cœur certes. Je lui avais demandé où était passé son enthousiasme pour ce projet et elle s'était contenté de grogner. Prévisible.

Je l'ai donc traîné ce matin, jusqu'ici, son portable sous le bras. Mais, à l'heure actuelle, cela fait des heures que nous passons Internet au peigne fin, en vain et je suspecte Cléa de mal supporter toute la caféine qu'elle a ingurgitée.

Elle agite son gobelet vide devant mes yeux et me dit :

-Va me chercher un café, Elias.

-Tu as dû en boire quatre en une heure, tu vas finir complètement excitée.

-Je n'aurais qu'à regarder ta tête et mon excitation se calmera, ne t'inquiète pas pour moi. Va me chercher ce café.

Je ne peux pas m'empêcher de sourire parce que, soyons honnêtes, je sais bien qu'elle me trouve irrésistible. Laissant ses soupirs derrière moi, je traverse la masse de personnes venues chercher leurs doses de caféine. Je les connais presque tous mais je ne salue personne, m'évertuant à ne pas croiser leurs regards.

Derrière le bar se trouve une jeune fille dont le visage m'est inconnu. Je passe ma commande (un café avec du lait bio et deux sucres, évidemment) puis interroge la serveuse :

-Est-ce que Max est là ?

Cela fait des années qu'il travaille ici et je ne l'ai jamais vu rater un seul jour de travail.

-Il est malade, il a pris sa journée, me répond-elle.

Je prends le café qu'elle me tend, règle la note, lui laisse un petit pourboire puis, retourne à notre table.

Cléa a le regard fixé sur son écran, ses sourcils sont froncés, donnant à son visage une expression sérieuse. Je profite de ce moment pour la regarder avec attention : yeux cernés, ongles rongés, cheveux rassemblés en un chignon difforme. Soit l'entretien avec sa grand-mère la tourmente encore, soit une autre source de stress lui est tombée dessus.

Ça me fait du mal de la voir comme ça, épuisée et stressée. Dans ces moments-là, je peine à revoir la petite fille qui grimpait aux arbres à une vitesse surhumaine et dévorait des tonnes de gâteaux au chocolat. Parfois, elle me manque.

Je décide de ne pas l'interroger sur ce qui la met dans cet état pour le moment, je ne veux pas la pousser à bout. Je préfère m'aventurer sur un terrain moins délicat :

NoxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant