Le garçon se tenait accroupi dans l'escalier de secours. Ses grands yeux verts fixaient l'entrée de la ruelle avec un intérêt certain. Il guettait, comme toujours, le signe de ses coéquipiers.
Celui-ci vint quelques instants plus tard, lorsqu'une jolie blondinette s'enfonça dans la ruelle en traînant un homme d'une quarantaine d'années par la main. Robin grimaça en voyant ce vieux pervers saliver comme un chiot face à l'appétissante jeune-fille. Il devait se retenir de ne pas descendre maintenant pour mettre quelques poings à ce gars, histoire de lui apprendre à regarder correctement une fille.
Oh mais c'est vrai. Les gens comme lui n'en avait rien à faire. Ces hommes incroyablement riches se pensaient tout permis. Ils consommaient l'alcool, l'argent et les filles à volonté. Ils pensaient avoir tout les droits.
Robin les haïssait, tellement. Il détestait tout ce qu'ils étaient, tout ce qu'ils représentaient. Il aurait aimé les voir crever un à un. Ou pire, les voir se ruiner lentement. Il voulait que ceux-ci comprennent ce que c'était que de n'avoir même pas de quoi se payer un bout de pain pour le déjeuner. Avoir le ventre qui se serre douloureusement en observant la nourriture gaspillée dans la poubelle et hésiter entre une fierté rapiécée et une faim tenaillante qui déchire les entrailles.
Ses pensées lui firent serrer le petit canif qu'il tenait entre les doigts. La lame, fine et usée, ne coupait plus grand-chose, mais elle effrayait les proies.
La fille était arrivée au bout de la ruelle maintenant. Elle avança jusqu'à coller le dos de l'homme contre le mur et alors qu'il s'humectait les lèvres, se préparant à embrasser la sombre créature devant lui, cette dernière le surprit. D'un geste aussi vif que gracieux, elle glissa une main derrière son cou. L'homme ne comprit pas ce qu'il lui était arrivé lorsque son visage rencontra le genou de la demoiselle.
L'étonnement passé, il chercha à se défendre. Sa grosse main partait déjà en direction du visage de la fille, sans aucun scrupule. Mais c'était trop tard. Le piège était refermé, la proie n'aurait plus aucune chance de s'y échapper.
Robin se laissa tomber de l'escalier dans un bruit sourd, intimidant. Il entendit trois autres sons similaires derrière lui et eut un sourire carnassier en direction de la proie. Celle-ci déglutit, cherchant précipitamment dans ses poches après un quelconque moyen de défense.
Robin aimait cette instant, il le savourait. Il aimait voir les pupilles de leur victimes s'agrandir sous la frayeur. Ces grand bonhommes si puissants devenaient alors petits, si petits face à eux. Leurs mains se mettaient à trembler et leurs regards faisaient des allées-retours entre les différentes possibilités de s'en sortir. Ils cherchaient à fuir ou, dans le plus honorable des cas, retrousser leurs manches comme de vrais bûcherons.
Il y eut cette odeur rance de transpiration qui lui faisait froncer le nez à chaque fois. Ces businessman puaient la peur à des kilomètres.-Qu'est-ce que vous me voulez? Qui êtes-vous?», s'énerva l'homme en se collant un peu plus contre le mur.
Robin avança, jusqu'à se placer devant la jolie blondinette. Il vit le moment précis où les yeux de l'homme rencontrèrent son canif.
-Qu'est-ce que vous voulez...», murmura-t-il en palissant à vue d'œil, et toute son assurance s'était volatilisé.
Puis, il le vit. Il vit la petite hirondelle qui voletait sur le cou de chacun des membres présents. Et alors, il sut. Il sut précisément ce que Robin et les autres, voulaient. Il sut alors que lorsqu'il sortirait de cette ruelle, il n'aurait plus rien.
Il serait vide, vide de toute richesse.
Et Robin savoura l'éclat de défaite qui traversa les yeux bruns de l'homme. Il apprécia la vue de ses épaules voûtés, de la légère pellicule de sueur sur son front.
Il le trouva pathétique, tellement pathétique. Il craignait tant la mort qu'il se ridiculisait devant une bande de gamin qui aurait pu être ses fils.
Lui, ne serait jamais comme ça. Il ne serait jamais ainsi, à courber l'échine pour une poignée de métal et de papier. Il ne craignait pas la mort. Car pour être effrayé de partir, il fallait avoir quelque chose à perdre.
Et Robin n'avait strictement rien auquel s'accrocher.
Rien, hormis la vengeance.
VOUS LISEZ
Robin
RomanceVous connaissez la haine? Celle qui vous consume, qui vous ronge, qui vous blesse? Celle qui vous tient éveillé la nuit, vous invitant à la vengeance? Robin la côtoyait tous les jours de sa vie. Vous connaissez l'angoisse? Celle qui vous consume...