Robin

Chapitre 18

Kacey se réveilla ce matin-là avec un léger sourire aux lèvres, impatiente d'aller au lycée. Robin lui avait promis que les jumeaux se seraient pardonnés, et l'adolescente avait envie d'avoir une bonne discussion avec Elonie.

Motivée, elle se leva rapidement et enfila ses pantoufles avant de descendre à la cuisine. Elle se servit un bol de céréale en quatrième vitesse et grommela des obscénités lorsque le lait déborda du bol.
Toutefois, cela ne suffit pas à faire envoler sa bonne humeur, et elle se contenta de danser à moitié en regardant son cacao tourner sur la plaque du micro-onde. Pour le fun, et parce qu'elle était heureuse, elle rajouta même une grosse cuillère de Nutella et une petite pincée de sucre.

Ce serait calorique, bon Dieu, Robin ne devrait réellement plus la porter après ça.

Repensant à la veille, elle se sentit rougir parce que, ouais, elle avait encore trouvé le moyen de les embarrasser tous les deux. Sauf que cette fois-là, le garçon lui avait semblé plus gêné qu'elle, et c'était une véritable petite victoire personnelle dont elle pourrait s'en vanter encore quelques temps.

Son père entra dans la cuisine à cet instant, et Kacey sursauta comme jamais. Monsieur Froy lui lança un regard amusé avant de s'appuyer contre le plan de travail.

-Tu n'es pas à l'entreprise?
-Non, j'ai décidé de commencer plus tard pour aller réserver les billets de ta représentation, répondit-il en jetant machinalement un coup d'œil au journal du matin.

La jeune-fille en laissa tomber sa cuillère, et son père se pencha en souriant pour la ramasser.

-Tu avais oublié, n'est-ce pas?
-Je... Oh mon Dieu, je suis pas prête! Merde, merde, merde! Mon costume!
-Ta professeur l'a commandé, il faudra que tu ailles le chercher mercredi, la rassura calmement son père.
-Les chorées!
-Tu les connais par coeur, Kacey, arrêtes.
-Il faut à tout prix que je revois la chorée finale! Il faut que je m'entraîne plus! Oh mon Dieu, il faut que je vire Robin de...», commença-t-elle avant de se taire brutalement.

Elle jeta un regard inquiet vers son paternel et celui-ci lui adressa un regard sévère avant d'éclater de rire.

-Tu crois que notre bonne vieille Madame Raws ne m'aurait pas téléphoné dès qu'il est venu au premier cours?», s'exclama-t-il en riant de plus belle.
-Mais... Mais....
-Et bien, il faut bien que jeunesse se fasse, n'est-ce pas? Et, s'il te permet de rentrer sans encombre le soir, pourquoi pas?», continua-t-il plus calmement alors que Kacey ouvrait grand la bouche sans rien dire pour autant.

Monsieur Froy lui déposa un baiser sur le front en essayant d'ignorer la petite pointe d'inquiétude dans son coeur. Son petit bébé grandissait, il commençait à vouloir faire ses propres expériences. Ce n'était pas bon, de vouloir découvrir le monde, surtout comme on avait été protégé comme Kacey l'avait été. On finissait incroyablement écorché.

Lui, ne croyait plus en l'amour. Ou plutôt, il trouvait que celui-ci s'accompagnait toujours de dangereuses souffrances, et aurait beaucoup aimé pouvoir expliqué ça à sa petite fille. Il aurait aimé lui dire que les garçons n'avaient pas toujours les bonnes pensées, ni les bons sentiments. Il avait envie de lui dire qu'aucun d'eux ne la méritait, et surtout pas un petit con qui passait deux heures à fixer le plafond.

Seulement, il ne pouvait pas nier que de ce risque douloureux pouvait résulter de magnifiques conséquences.

Alors, puisqu'il jugea que sans ceci, Kacey ne l'aurait jamais accompagné à travers sa vie, qu'elle n'aurait pas défendu ses opinions, qu'elle n'aurait pas ri à s'en faire mal à la mâchoire face à l'océan, il se tut. Ce garçon avait beau avoir quelques mauvais côtés et, selon la prof, une aura de racaille totalement insolent, il apportait à Kacey une chose qu'elle ne connaissait pas. Une chose tentante, qui lui donnait envie d'y goûter.