Book of Love

Chapitre 15

Trois chapitres, voilà ce qui me reste à lire. À mon plus grand étonnement, je suis complètement dévasté par ce qui vient de défiler sous mes yeux. Je pose le manuscrit avec un soupir qui décrit amplement tout le mal-être que je peux ressentir à cet instant.

La perte de quelqu'un est toujours un moment difficile à passer. Mais ces mots, ces phrases et leurs sens uniques, m'émeuvent outre mesure. Je sais que je ne suis plus vraiment très objective, et que ma pseudo relation avec Tyler affecte certainement mon jugement. Mais ce qu'il a écrit, dépasse l'entendement. On ne tombe jamais dans le mélo, chaque mot est posé avec une pureté désarmante.

Je l'avoue, je suis touché. Ce livre n'est pas simplement une mine d'or pour moi, c'est aussi une preuve incontestée que Tyler est un homme merveilleux et profond.

Le chapitre, où il décrit le moment le plus douloureux de sa vie, est tout simplement époustouflant. À aucun moment il n'explique les circonstances de la mort de sa femme. Non, il se contente simplement de décrire ce qui se passe dans son esprit et ce que cette perte lui enlève au fond de lui. Il n'y a pas de voyeurisme, simplement un ressenti intense et profond.

Les derniers chapitres traiteront certainement de ce qui le pousse à poursuivre sa vie sans elle, sans l'amour de sa vie. Mais pour aujourd'hui, je préfère m'arrêter là. Je n'ai pas le coeur à continuer. Et puis cela me permet de repousser encore un peu la fin de mon séjour ici. Pourquoi me direz-vous? Je ne sais toujours pas.

J'avais peur de venir, et maintenant j'ai peur de repartir. C'est évidemment complètement absurde, car je ne vais pas pouvoir rester ici indéfiniment. Robert m'a peut-être donné des congés, mais il doit commencer à se demander ce que j'attends pour revenir. Mais par chance, il est tellement fier, qu'il n'osera jamais m'appeler pour me faire rentrer.

Je regarde l'heure sur mon téléphone, et m'aperçois qu'il est tout juste 17h. Je n'ai pas mangé, et une petite collation ne me fera pas de mal.

Une fois arrivé au rez-de-chaussée, je prends la direction de la cuisine. Il n'y a apparemment personne dans la maison, et je me retrouve donc à fouiner comme une voleuse dans les placards à la recherche de quelque chose qui pourrait me remplir l'estomac. Malheureusement, rien de tout ce qu'il se trouve ne m'attire vraiment.

Soudain, une idée me traverse l'esprit. Et si j'allais me rassasier dans la pâtisserie de Sydney. Cela doit être à seulement une trentaine de minutes à pied, je devrais donc y arriver avant la fermeture. Et puis, tant exaspérante soit-elle Sydney a le don de me faire rire.

J'enfile alors une paire de chaussures moins vertigineuse, et écris un mot pour signaler que je me rends au village.

Une fois le pas de la porte passé, je me dirige sur la seule et unique route qui mène à Granger. J'ai peut-être mis des talons moins haut, il n'empêche qu'il devrait sérieusement penser à goudronner leur route.

Cela fait maintenant une quinzaine de minutes que je marche, quand j'entends une voiture arriver derrière moi. Je me mets alors sur le bas-côté afin de lui laisser toute la place nécessaire pour passer. Mais arrivée à mon niveau, elle ralentie, et je reconnais immédiatement le vieux tacot de Tyler.

- Apparemment on a compris la leçon, on ne marche plus en plein milieu de la route.

Je souris intérieurement de cette référence, et le souvenir de notre échange tumultueux ce jour-là me revient en mémoire.

- C'est surtout que je suis raisonnable au point de ne pas prendre le risque de tester les freins de ton antiquité.

- Oh une fille de la ville, je comprends mieux.