Dans le pâté. L'idée débile est de le revoir tout à l'heure. Vraiment c'est stupide. Dernière chose que je devrai envisager. Mai c'est trop tard. Je ne contrôle plus rien. Nous avons passé des heures hier à échanger des SMS particulièrement déplacés lorsqu'on est dans ma situation. Mes doigts écrivaient tout seuls, le relançaient tout seuls. Jusqu'à ce que je m'écroule. Et ce message qui tourne en boucle dans ma tête.
[J'aurai dû te prendre contre le mur dans le hall du lycée]
Bloquer les images qui montent, vite. Le bloquer avant qu'elles ne me submergent et prennent le contrôle total de mes pensées. Je me frotte les yeux, épuisée. Je n'ai quasiment pas dormi une fois de plus.
- Si, si, je vous écoute.
Je bâille en m'éloignant du téléphone. La négociation avec l'agent littéraire pour signer ce nouveau texte est particulièrement ardue. Le type le prend la tête. J'aime bien ce manuscrit, mais pas au point de rajouter des intermédiaires. Et je ne suis en aucun cas prête à allonger la somme qu'il réclame pour en obtenir les droits. Nous avons reçu le texte d'un primo-romancier il a quelques jours qui m'enthousiasme bien plus. Malgré tout, j'écoute, patiente. Sait-on jamais ce qui débouche des conversations.
En l'occurrence rien. Je fini par promettre de réfléchir alors que de mon côté c'est tout vu. Juste envie de raccrocher et avaler un café pour me remettre d'aplomb. Je suis vidée.
J'ai reçu plusieurs SMS pendant mon appel.
Ethan :
[Alors ? Je t'attends.]
Paul :
[Est-ce que tout se passe bien à Paris ? Contente d'avoir prolongé ton séjour ?]
Merde. Frisson d'excitation immédiatement suivi d'un pincement de culpabilité. Désagréable. Mon cerveau occulte le deuxième message, étouffe toute révolte et c'est à Ethan que je réponds :
[Suis libre. Dans 20 minutes. Devant le lycée ?]
J'aime bien ce point de chute. Parcourir à nouveau ces rues, retrouver les sensations... Le temps est splendide aujourd'hui. J'aimerai suivre le même chemin qu'à l'époque pour rentrer chez moi après les cours. Je remontais vers le métro aérien au bout de la rue du commerce, débouchais sur les invalides, traversais la Seine par le pont de l'Alma. Puis la Madeleine, direction les galeries Lafayette, l'opéra Garnier, magnifique avec sa coupole dorée et enfin cet appartement au fond d'une cour ou Georges Sand avait vécu quelques années. Une chance d'y habiter. Mais un loyer honteux et j'avais dû y renoncer.
Mon banquier se plaignait souvent à l'époque, mais elle est remplie de bons souvenirs. Et il y avait Ethan...
[Suis en moto avec un pote. 30 minutes ?]
Ok. Café.
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The way she falls
RomanceJe suis congelée. Qu'est-ce que je fiche là ? Je n'aurai jamais dû venir. J'allonge le pas pour me maintenir à sa hauteur. - Ethan, ralentis, je n'arrive pas à te suivre.