XIV. Camille

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Camille tendit la feuille à Kara. Cette dernière la remplit, puis s'éloigna. Camille et elle avaient rompu il y a quelques jours. D'un commun accord, elles avaient décidé qu'elles avaient vu ce qu'elles voulaient voir, et avaient donc mis un terme à leur relation. Elles avaient repris leurs vies à présent, à tel point que leur relation paraissait n'avoir jamais eu lieue. Mais ça ne les dérangeait pas.

Le lendemain midi, Camille avait quelque chose de prévu. Elle se regarda dans le miroir, ayant décidé de paraître plus attirante que d'habitude – et elle ne se trouvait pas attirante d'habitude. D'où le jean slim, le chemisier légèrement ouvert, le maquillage, les bijoux et les cheveux détachés. Elle poussa un soupir, sortit de la salle de bain et attrapa son portable qu'elle rangea dans sa poche arrière gauche. Quelqu'un toqua à sa porte, et elle prit les clés avant d'ouvrir : « Salut. Deux secondes, je ferme... Allons-y. »

A côté d'elle, Leslie paraissait somptueuse. Une robe, comme toujours, différente, comme à chaque fois. La flic prit le volant, emmenant la barmaid sans rien lui dire.

Camille avait glissé subtilement à Leslie qu'elle lui devait toujours un restaurant, et Leslie avait fini par l'inviter. Elle n'était pas au courant pour la rupture de Camille et Kara, et Camille ne comptait pas le lui dire.

Durant le déjeuner, Camille fit comme si de rien n'était, comme si elle n'avait jamais dit à Leslie qu'elle se battrait pour l'avoir. Elle agit comme une amie, à la fois taquine et sérieuse. Elle savait pertinemment que Leslie avait mordu à l'hameçon, sinon elle ne lui aurait pas demandé qui était Kara, ni n'aurait été jalouse en les voyant ensemble. Mais à présent qu'elle avait ferré le poisson, elle laissait du mou. Soit elle le perdait, soit le poisson avait trop bien engamé le leurre, et elle le remonterait quoi qu'il arrive. Elle pariait sur la deuxième option.

A la fin du repas, Leslie la raccompagna. Dans la voiture, avant de la laisser partir, elle lui dit : « Quand est-ce qu'on peut se revoir ?

-Quand tu veux. Et tu n'as qu'à passer au bar pour me voir. » répondit nonchalamment Camille en désignant la porte du bar en question. Puis elle sortit et remonta chez elle, sans oublier le petit signe de main pour saluer Leslie. Dès qu'elle fut chez elle, elle se servit un grand verre de whisky-coca et grogna : « OK, note pour moi-même : me renseigner sur qui est le barman de ce resto, et ne jamais l'engager ! » Elle cracha dans le lavabo. La Marguarita qu'elle avait prise était extrêmement acide. Elle n'avait jamais vu – bu – ça.

Camille passa toute l'après-midi à se saoûler au whisky-coca pour débarrasser ses papilles gustatives de ce goût atroce. Le soir, elle changea de vêtements, enfilant un pantalon cargo gris, avec des chaussures montantes grises et un débardeur tout aussi gris avec des traces argentées. Puis, cédant à une de ses dernières folies de jeunesse, elle enfila une casquette, la mettant à l'envers. Elle paraissait avoir 16 ans, habillée comme ça, alors qu'elle en avait 19. Mais même à cet âge-là, paraître plus jeune faisait déjà plaisir.

Camille alla prendre son poste et commença à servir. Pour une fois, elle ne se força pas à sourire. Elle n'en avait pas besoin. Elle avait déjà un motif de réjouissance, alors... En parlant de motif de réjouissance, quelqu'un l'interpella alors qu'elle servait à boire. Elle se tourna vers ce nouveau client – pardon, vers cette nouvelle cliente – et réprima un sursaut. Accoudée à quelques personnes d'elle, Leslie lui fit signe. Elle aussi s'était changée. Camille sourit et lui servit un verre, et lui demanda en le posant devant elle : « Tu m'imites ?

-Quoi ?

-Pour la tenue. Chemisier et jean. C'est ce que je portais ce midi.

-Ah ? Oh, oui, c'est vrai... Ca t'allait très bien d'ailleurs.

DIVISION - DominationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant