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Le lendemain, je reçois une visite de mon père. Il débarque dans sa GMC neuve et m'emmène au Carlton.

On déjeune dans le seul restaurant sympa de la ville. Nous voilà assis à table avec nos serviettes sur les genoux. Mon père est bronzé, beau et porte un chouette costume. Les gens du coin le dévisagent, bouche bée. Lui s'en fiche. Les regards admiratifs ne l'ont jamais dérangé, bien au contraire. Évidemment il réclame de mes nouvelles, mais il ne peut pas résister à l'envie de me parler de son nouveau projet et de me raconter comment il a réussi à convaincre les Japonais - ceux qui ont inventé les petits animaux de compagnie robotisés - de le financer.

Ensuite, il joue au papa. Il prend une mine inquiète et demande comment je vais.

Le truc avec mon père, c'est qu'il est stricte. Donc de son point de vue, je dois arrêter d'aller à des soirées alcoolisées et à traîner dehors, à 4 heures du matin. Et c'est sûr que ma mère et lui, vont me "surveiller". Il pense aussi que mon problème vient d'un manque de contrôle.

On avale notre repas. Papa n'en finit pas de vanter son poulet délicieux, il drague la serveuse et lui laisse un gros pourboire.

De retour au pavillon, il se gare dans la rue. Il veut rentrer voir l'intérieur, mais je lui dis qu'il ne vaudrait mieux pas, que c'est déprimant, alors il n'insiste pas.

- Ta mère et moi, nous avons discuté avec ton proviseur à Evergreen. Déclare-t-il. Tu pourras y retourner après Noël. Il a parlé des session auxquelles tu pourrais t'inscrire pour rattraper ce que tu a manqué cette année. Enfin, tout dépendra de la façon dont les chose évoluent, bien-sûr. Et de ce que dira le docteur Bernstein.

Je ne réponds pas. Je n'ai aucune envie de retourner au lycée.

- Je pourrais peut-être suivre un programme par correspondance ?

- Pour quoi cela ? Il n'y aucune raison que tu rates tes derniers mois de lycée.

- À quoi ça va me servir, le lycée ?

- Ça fait parti du parcours normal, c'est une étape importante dans la vie.

- Mais qu'est-ce que je vais y faire ? Je n'ai même plus d'amis là-bas.

- Tu vas t'en faire de nouveaux.

- Je les déteste tous.

- Kaylee, ne commence pas.

Je détache ma ceinture.

- En tout cas, je sais que je ne veux pas retourner à Evergreen. Tu as une idée du nombre de cons que je vais retrouver là-bas ??

Il soupire.

Ma mère me téléphone le soir même. Il fallait s'y attendre. Je suis obligée de la prendre sur la ligne du pavillon, devant tout le monde. Notre conversation se déroule exactement comme d'habitude.

- Ton père m'a dit que vous aviez passé un bon moment au restaurant.

- Ouais. Dis-je sans enthousiasme.

Je sais à l'avance que la dispute ne va pas tarder.

- Il paraît que vous avez eu une discussion très constructive.

- Oui, je réponds sur le même ton.

- Cependant, il y a une chose qui m'a embêtée. Il m'a appris que tu envisageais de prendre des cours par correspondance et que tu ne voulais pas retourner à Evergreen ?

- Oui, c'est vrai.

- Mais Kaylee, pourquoi ?

- Parce que, maman. C'est ce que font les gens dans ma situation.

- Pourtant tu aimais bien l'école, avant.

- J'ai un peu brûlé les ponts, maman. Alors, maintenant, j'ai plus cinquante options. Suivre un programme par correspondance me semble être le choix le plus sensé.

- Mais pourquoi ?

Je me tourne face au mur.

- Pour ne pas revoir ces cons qui sont dans ce lycée de merde, maman.

- Kaylee, c'est faux. Ce que tu dis est faux.

- C'est la vérité, maman.

- C'est absurde. Ton père est très optimiste au sujet de ton avenir. Il fait tout ce qu'il peut pour t'aider, Kaylee.

- Tout ce qu'il peut ? Tu plaisantes ? Tu sais où je suis, là ? Tu sais où je dors ?

- Je sais, chérie, mais..

- Je dors dans des lits avec des femmes qui ont commis des meurtres à l'arme à feu !

- Ma chérie, je sais. Mais il faut que tu comprennes que ce n'est pas facile, pour nous non plus. Ton père se ronge les sangs. Tu sais combien coûtent les consultations chez le docteur Bernstein ? Et tout n'est pas couvert par la mutuelle, figure-toi.

- D'accord, maman. Ok. Je suis une mauvaise fille et vous êtes des victimes.

- Ne déforme pas mes propos. Tout ce que je veux dire, c'est que tu pourrais au moins prendre ses conseils au sérieux. Ton père est considéré, par beaucoup de gens, comme un homme très intelligent.

Je soupire.

- Ok. Bon, maman, faut que j'y aille là.

- D'accord. Mais n'oublie pas ; je parle avec le docteur Bernstein presque tous les jours Kaylee. Et on a consacré beaucoup de temps à cette histoire, ton père et moi.

- Ok. D'accord, j'y réfléchirai.

- C'est tout ce qu'on te demande.

Je suis pressée parce que Margarita vient juste de mettre America's Next Top Model à la télé, ma nouvelle émissions préférée.

- Ok, je file.

Je raccroche et je file m'installer devant le poste.

Addiction [TERMINÉE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant