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Le déjeuner s'annonce compliqué. Mais j'ai un plan. Je grignote un peu à chaque interclasse, en cachette. J'ai planqué mes casse-croûte dans mon casier. J'avale quelques mini-carottes, la moitié d'un sandwich, un peu de céleri avec du beurre de cacahuète et, pendant la pause de midi, je vais à la bibliothèque. Je trouve une grille de mots croisés dans le journal du jour, je l'emporte à la table du fond, je l'étale à côté de mon livre d'histoire et je fais semblant de faire mes devoirs.

C'est une manière agréable de passer quarante minutes.

Malheureusement, la situation se corse juste après, quand Laura Brantley me repère dans le passage couvert entre les bâtiments.

- Hé ! Sortie de désintox ? Hurle-t-elle.

Je feins de ne pas savoir à qui elle s'adresse et j'accélère le pas. Mais elle me court après.

- Ne fais pas la sourde oreille !

Je continue mon chemin. Laura est une fille populaire au lycée. On n'a jamais été amies, même si on traînait avec les mêmes personnes. On nous considère plutôt comme des rivales.

- Hé ! S'écrie-t-elle en me rattrapant. Alors, c'était comment ?

- De quoi tu parles ? Demandais-je agacée.

- Bah, tu sais, la cure.

- Qu'est-ce que ça peut te faire ?

- Je suis juste curieuse. Pas la peine de t'énerver.

- Pas la peine de crier sur tout les toits que je sors de désintox !

- Tout le monde s'en fout. Et puis tu crois peut-être que c'est un secret ?

Je marche vite mais elle reste accrochées à mes basques.

- Alors, tu vas y arriver, à ton avis ? Me demande-t-elle.

- À quoi ?

- À rester dans le droit chemin ?

- Je ne sais pas. On verra bien.

- Bonne chance, en tout cas. Ce ne sera pas facile.

Je la regarde. Elle a l'air sincère, ce qui me surprend.

- Par contre, si tu décides de te remettre à picoler, tu sais où te procurer ce qu'il faut. Dit-elle en tapotant la poche de sa veste.

- Merci beaucoup.

Elle éclate de rire.

- Mais non ! Je plaisante ! Sérieux, je te souhaite bonne chance. Je le pense. Je finirai sans doute là-bas, moi aussi, un de ces quatre.

Pourtant, question de sociabilité, Laura ne représente pas non plus gros défi.
Non, ceux qui vont vraiment mettre ma détermination à l'épreuve, ce sont mes trois meilleurs amis : Jake, Raj et Alex.

Juste avant la sixième heure de cours, j'aperçois Jake, qui m'attend à côté de mon casier. Je prend une grande inspiration.

- Hé, t'es de retour, me dit Jake de sa voix détachée, tellement craquante.

- Ouais.

- Alors, reprend Jake, c'était comment ?

- Moisi.

- Oui, je m'en doutais.

Je me sens très nerveuse. Mes mains tremblent, ma gorge se noue.

Jake ne remarque rien. Il est totalement décontracté, comme d'habitude. Il s'appuie contre un casier.

- Donne-moi des détails.

- Il n'y a pas grand-chose à raconter. Tu reçois des tas d'ordres, tu les exécutes, voilà.

- Ah ? S'exclame-t-il en promenant son regard vide dans le hall. Et sinon... C'est fini pour toi maintenant, tout ça ? Pour de bon ?

- Je n'aurai pas besoin d'y retourner, si c'est ce que tu veux dire.

- Hmm... Alors tu peux venir te défoncer avec nous, après les cours ?

- Ben non.

- T'es sérieuse ? Tu vas vraiment décrocher ?

Je pousse un soupir.

- Oui. Je crois. Je vais essayer.

Jake hoche la tête.

- Dommage. Raj vient d'acheter de la colombienne. Elle déchire. Il était trop content à l'idée de te faire fumer. Il voyait ça comme un cadeau de retrouvailles, en quelque sorte.

Pendant qu'il prononçait ces mots, il se penche vers moi en prenant un air sexy. Il me fait son numéro. Jake dans toute sa splendeur !

- Il vaut mieux que je passe mon tour. Désolée.

Jake hausse les épaules.

- Alors tu vas t'occuper à quoi si tu ne peux pas sortir ?

- Je sais pas. Je vais me terrer un trou, j'imagine.

- Ça craint.

- À qui le dis-tu..

- Hmm.

À cet instant, Marisa Petrovich passe à côté de nous. Elle porte une jupe très courte.

- Salut Marisa.

- Salut Jake, ronronne-t-elle.

- Bon, ok, Kaylee. On se revoit plus tard ?

- Ouaip. Tu remercieras Raj d'avoir pensé à moi.

- Pas de problème.

Jake est maintenant en train de lorgner le décolleté plongeant d'une allumeuse de seconde qui montre ses seins à tout le monde - au sens propre. Il manque de trébucher en les suivant des yeux.

Ah ! Le lycée... Ça me manquait.

Addiction [TERMINÉE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant