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Je me réveille dans un lit inconnu le lendemain matin, seulement vêtue de ma culotte et de mon haut.

Je me redresse en regardant autour de moi et je reconnais l'appartement sale de Nathan et Kirsten.

Je ne le vois pas, lui. Mais Kirsten est assise sur le canapé, emmitouflée dans une couverture.

Elle a dû s'endormir là puisque j'ai piqué leur lit.

J'aperçois par terre un sac de couchage récupéré dans les surplus de l'armée, dans lequel Nathan a passé la nuit.

La premier chose qui me vient à l'esprit, c'est que mes parents vont me tuer. Pourquoi Nathan ne m'a-t-il pas ramenée chez moi ?

- Salut, me dit Kirsten d'une petite voix.

- Où est Nathan ?

Une douleur sourde explose dans mon crâne. Ma bouche est sèche et pâteuse. Je me sens déshydratée.

- Il est parti chercher du café.

- Quelqu'un a appelé mes parents ?

Elle hoche la tête.

- Nathan s'en est chargé.

Je suis soulagée. Je jette un coup vers la kitchenette. J'ai l'impression d'avoir les tempes serrées dans un étau.

- Vous n'avez pas de café ici ?

- Il voulait en prendre au Starbucks. Il a dit que tu appréciais le bon café.

- Oh.

Elle me sourit poliment. C'est une fille douce, un peu étrange, aussi timide qu'une souris.

- En tout cas, merci de.. de m'avoir accueillie...

Je contemple leur studio. Kirsten ne bouge pas. Je me mets à sa place, ça ne doit pas être drôle de voir l'ex de son amoureux débarquer à la maison.

Sait-elle que Nathan et moi, on s'aime encore ? Elle doit s'en douter, c'est obligé.

La porte s'ouvre et Nathan fait irruption. Il porte trois gobelets de Starbucks empilés les uns sur les autres.

Il m'en donne un, le deuxième à Kirsten et garde le dernier pour lui. Puis il s'assoit en tailleur sur le sol et attaque son café.

- Vous n'avez pas de table ici ?

Non, ils n'ont ni table ni rien qui puisse servir de table.

- J'ai téléphoné à tes parents, m'informe Nathan.

- Qu'est-ce qu'ils ont dit ?

- Rien. Je les ai informé que tu passais la nuit ici.

- Tu as précisé que j'étais bourrée ?

- Non, j'ai juste dit que tu t'étais endormie. Je crois qu'ils étaient un peu inquiets.

Pile à ce moment-là, mon portable sonne. Nathan le sort de sa poche et me le tend. C'est ma mère.

- Salut, maman.

- Chérie ! Dieu merci. Où étais-tu ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Paul a appelé à la maison la nuit dernière. Il ne savait plus où tu étais.

- Oui. On s'est perdu de vue à la fête.

- Ensuite, on a eu Nathan, qui nous a dit que tu ne te sentais pas bien.

- Oui. J'ai trop bu.

- Tu as quoi ?

- J'ai bu. J'ai trop bu. J'ai.. je ne sais pas pourquoi, j'ai picolé. Nathan est venu me chercher.

- Oh, Kaylee ! C'est terrible ! Où es-tu ?

- Chez Nathan.

- On arrive tout de suite. Ne bouge pas. Quelle est l'adresse ?

- Ça va aller, maman. Il n'y a pas urgence. Je suis très bien où je suis pour le moment.

- On vient te récupérer.

- Nathan n'a rien bu, lui. Il est avec moi. Ne vous inquiétez pas. Je serai rentrée d'ici une heure.

- Chérie, s'il te plait.

- Non, maman. Nathan peut me déposer. Je suis parfaitement en sécurité. Attendez-moi.

- Oh, Kaylee ! Ne bois plus. On peut te renvoyer à Spring Meadow. J'appellerai le docteur Bernstein !

- Maman, arrête ! C'est bon, je vais bien. Je suis là dans une heure.

- Qu'est-ce que tu foutais toute seule chez ces étudiants, pour commencer ? Me dit Nathan lorsque nous quittions l'immeuble.

Kirsten marche un peu derrière nous, pour nous laisser discuter.

- C'était juste une soirée. Il n'y a rien de mal à aller à une soirée. Je pars à la fac dans six semaines. Je ne vais pas rester cloîtrée.

On monte en voiture et on traverse la ville en silence. Il fait chaud. Kirsten baisse sa vitre pour laisser le courant d'air rafraîchir la banquette arrière.

Nathan est en colère. Plusieurs fois, il commence une phrase puis se ravise. Il s'éclaircit la gorge et se lance enfin :

- Tu sais ce qu'il te reste à faire, hein ?

- Non, quoi ?

- Il faut que tu ailles aux réunions des AA.

Je ne réponds pas. Je n'ai jamais été ne grande fan des Alcooliques Anonymes.

- Je sais que tu penses que ça craint, continue-t-il.

- Je n'ai jamais dit ça.

- Tu dois y aller. Et suivre leurs conseils, même si tu as l'impression que c'est n'importe quoi. Tu dois te lier avec des gens, prendre un parrain, faire du bénévolat.. participer aux soirées Bowling Sans Alcool.

- Des soirées bowling ? Tu plaisantes ?

- Et alors ? Tu faisais bien des soirées ciné à Spring Meadow. Tu n'étais pas trop snob pour ce genre de truc à l'époque.

- Si. D'ailleurs, j'y allais uniquement par provocation.

- Eh ben va au bowling par provocation. Et aux réunions aussi. Ça n'a aucune importance. Tant que tu y vas. Deux fois par jours.

- Impossible.

Il tourne la tête vers moi.

- Si tu ne m'écoutes pas, tu risques de tout perdre. Et tu en as, des choses à perdre.

- Oh non.

Il ne réagit pas. Il sait très bien qu'il a raison. Évidemment qu'il a raison.

Addiction [TERMINÉE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant