Selinda

77 8 0
                                    

L'air frais de la station de service me fouette le visage. Je repère une poubelle et j'y jette le morceau de verre que je tiens encore entre mes mains. La morceau qui m'a permit de tuer la grosse femme et la gardienne de l'entrée afin de sortir de l'enfer de cette prison. Le morceau qui m'a aussi permit d'ouvrir la cellule de Aelie. On se déteste peut-être mais j'ai pas eu la force de la laisser seule. Je regrette pas ma décision. Et de toute façon, j'aurais pas survécu dehors toute seule. Hors de cette prison, on repart à zéro. On va se soutenir.


Je vais la chercher, elle est cachée dans un gros buisson à 20 pas de la station, c'est à son tour d'aller chercher à manger et de quoi nous loger. On a décidé de faire en sorte de ne pas être vues ensemble pour brouiller nos pistes :
- J'ai trouvé une poubelle dans une station de service avec un petit magasin à côté, tu devrais aller y jeter un coup d'il, l'informais-je une fois à côté de sa cachette.
- Ok, j'y vais. Si je suis pas revenue dans 15 min, repars sans moi et ne cherche pas à savoir ce qui m'est arrivé, me demanda-t-elle.
- Mais...
- S'il te plaît.
- Bon, promis, fis-je à contre cur.
-Merci.
Elle prit une grande inspiration et se dirigea avec une démarche assurée vers le petit magasin.

Je la vois ressortir en courant, deux sacs de couchages, un sac à dos et des pots de nourriture entre les mains. Je fronce les sourcils, on avait convenu qu'il ne fallait pas courir sous peine de se faire remarquer. Elle s'accroupit près du buisson et me chuchote :
- Le vendeur a pas voulu me vendre ses articles sous prétexte que j'étais "sale".
- T'aurais dû lui répondre que lorsqu'on s'échappe d'une prison et qu'on emprunte les vêtements des gardiennes qu'on vient de tuer , on fait pas trop attention à notre apparence... fis-je ironiquement.
- Arrête, c'est pas drôle ! Enfin, bon, je l'ai assommé avec la caisse enregistreuse et je suis partie en emportant ce que je pouvais.
- C'est bien. J'ai repéré un petit bois à environ 2 km, je dirais. On y sera avant midi si on part maintenant, je suppose.


Nous fîmes donc l'inventaire de ce qu'avait rapporté Aelie : trois boîtes de pois chiches et deux boîtes de maïs. Nous fourrâmes le tout dans le sac à dos et nous mîmes alors en route vers le petit bois, notre "matériel" sur le dos, en nous relayant pour le porter. Nous y arrivâmes vers 13 heures de l'après midi, en sueur et épuisée. Nous installâmes un petit abris avec des branches et des morceaux de tissus mouillés retrouvés sus des tapis de feuilles mortes, nous stockâmes les boîtes de conserves et dépliâmes les sacs de couchages. A la tombée de la nuit, épuisées après la descente d'adrénaline, nous nous endormîmes collées l'une contre l'autre pour nous rassurer, aussi improbable fut cette situation, en priant pour que demain soit un autre jour.

Passé et regretsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant