Chapitre 6: On passe le temps comme on peut.

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   Le lendemain, je n'avais qu'une idée en tête. J'avais hâte de découvrir ce qui m'attendait de ce séjour. Une fois arrivée devant mon lycée, après avoir failli rater mon bus à cause de mon réveil qui n'avait pas sonné, j'aperçus au loin Anita. Je précipitai donc le pas pour la rejoindre. Un sourire était figé sur mon visage. J'étais pressée de tout lui raconter et je ne pouvais ôter ce stupide sourire ! J'avais vraiment l'air actuellement d'une abrutie heureuse. D'ailleurs, j'avais honte de moi d'être un peu joyeuse. Ma mère et ma sœur étaient mortes de ma faute, mon père avait le cancer et se noyait dans sa mélancolie et moi, je ne savais pas quoi faire pour l'aider. Donc, je ne faisais rien d'autre, à part le fuir le plus possible. Alors que mon monde s'écroulait autour de moi et que je faisais souffrir ceux que j'aimais, que j'étais la cause de leurs trépas, je m'autorisais à être heureuse. J'étais pathétique. Mon sourire s'effaça faisant briller mes yeux. Je ne devais pas craquer ici, pas devant tous ces gens. Pour me calmer, je me répétais inlassablement :

« Règle numéro deux : ne jamais montrer ses sentiments ou ses faiblesses. Rester forte qu'importe les circonstances et toujours rester calme. »



   Ma respiration se calma, les larmes se dissipèrent et mes muscles tétanisés se détendirent. Je fis signe de la main à Anita en l'apostrophant avec un faux sourire aux lèvres:

« - Hé Anita !

- Salut Ana !

- Viens on va s'asseoir, j'ai trop un truc à te raconter, mais genre un truc de dingue ! »


  Une fois assise, je lui contais mon incroyable histoire, dans le moindre détail, n'oubliant rien. Elle fut tout aussi excitée que moi et s'exclama un peu fort :

« - Mais c'est génial ! Enfin, je veux dire, même grandiose ! C'est un truc de dingue Ana ! Par contre... Je sais que là, je vais jouer les rabat-joie, mais c'est plus fort que moi. Fais attention à toi, parce que ça a beau être un événement exceptionnel, ça reste tout de même bizarre. Très bizarre. Donc promet moi de le dire à ton père, et de faire confiance à personne d'autre que toi. Si tu sens que toute cette histoire ça pue, et bien pars tout de suite, d'accord ?

-Oh ne t'en fais pas pour moi, et puis, tu connais mes règles, ce n'est pas mon genre. Ne t'inquiète pas Madame la rabat-joie.

-Je sais, mais je veux quand même que tu me le promettes. Je me sentirai plus rassurée, tu sais, Madame naïve.

-D'accord, d'accord. Je te le promets Anita Wallach.

-Merci. Et aussi, tu m'appelleras tous les soirs hein ?

-Bien sûr. Ça me paraît évident ! »


  Ma semaine de cours me parut durer une éternité. Des fois, j'en venais même à me demander si le temps ne jouait pas un peu avec moi en prolongeant les minutes en heures. C'était une vraie torture, à attendre que celui-ci passe. Je voulais tellement accéder à un bonheur éphémère. Vous savez, cette impression que l'horloge qui dirige ce monde avec ses aiguilles de fer avance le plus lentement qu'elle peut, juste pour nous sortir un minable petit « tic-tac ». Je ne sais pas vous, mais moi, ça me rend dingue. Alors, je m'occupais comme je le pouvais.


  Pour être honnête avec vous, si j'avais su ce que ce séjour cachait, je n'aurais pas été impatiente d'y aller. Mais alors vraiment pas. Je ne le savais pas encore, mais je venais de prendre la pire décision de toute ma vie dans un certain sens et dans un autre point de vue, j'avais pris la meilleure. C'est ça qui est fou avec un être humain je trouve, il est pétri de contradictions. Le bien, le mal, en proportion égale. Et parfois, on s'y perd en voulant être une bonne personne. Mais ce que je n'avais pas compris alors, c'était que les bonnes personnes n'existaient pas réellement. Que nous sommes juste tous, des individus perdus entre deux mondes bien distincts.

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