Doutes...

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Lundi, Dix-neuf heures et vingt-sept minutes

J'ai un récital dans quinze jours. J'ai raté ma répétition de cet après-midi. J'avais trop mal à la tête. Tout cela est un peu trop pour moi en ce moment. Avoir un concert deux semaines après la rentrée des classes est à mon sens la pire chose qui me soit arrivé en ce moment.

Je me laisse une nouvelle fois tomber sous le lit. Je repense à ma première journée de classe. Elle aurait pu être pire. Je n'ai ressenti aucun enthousiasme en foulant le sol de mon établissement scolaire ce matin. C'est la première fois que je me sens ainsi, c'est la première fois que je me sens autant confuse. J'ignore quoi faire. J'ignore ce qui ne va pas avec ma personne. Peut-être ai-je merdé quelque part...

Ma mère m'invite pour la énième fois à venir manger. Elle a fait des boulettes. Je les aime bien. Je n'ai pas faim, et je ne vais rien manger. Je veux rester dans ma chambre pour ne plus en sortir. Je veux qu'on me laisse en paix !

J'attrape mon téléphone et je consulte mes messages. Sanon vient tout juste de m'écrire. Il veut savoir comment s'est déroulée ma première journée de classe.

« Bien... »

Ma mère frappe à ma porte. Je fais semblant de dormir. Je voudrais bien lui dire que je ne vais pas bien, que j'ignore ce qui ne va pas et que j'aimerais bien qu'elle m'aide à trouver la voie. Mais je préfère me cacher.

« Tu en es certaine ? »

Sanon est à mon sens le seul ami que j'ai. Peut-être comprendra-t-il si je lui explique mes craintes.

« Ma journée n'a pas été des meilleures, Sanon... »

Ma tête continue à me faire souffrir. Je me lève du lit et part m'asseoir près de la fenêtre.

« La mienne non plus... Qu'est-ce qui ne va pas Théa ? Tu es malade ? »

Sa question m'invite à me questionner. Suis-je malade ? Je suis anxieuse, Je m'énerve pour un rien, rien ne m'intéresse, et je n'ai plus l'envie de sourire.

Mon cœur palpite. Mes mains tremblent tout en répondant au message de mon ami :

« Ça t'est déjà arrivé de ne plus te reconnaître, et d'avoir l'impression que tu es étranger à toi-même. Ça t'est déjà arrivé d'avoir l'intime conviction que tu portes un masque ? »

J'ai envie de vomir. J'ouvre grandement la fenêtre pour laisser entrer l'air dans la chambre.

« Tous les jours de ma sainte vie... J'ai peur de tout ce qui m'entoure. J'ai peur des taches que l'on me confie. J'ai peur de passer à côté du vrai sens de la vie... J'ai beau hériter de judicieux conseils, mais je peine à savoir qui je suis vraiment. »

« Je ne suis pas la seule alors... »

J'ai envie de pleurer

« C'est peut-être notre âge Althéa. C'est peut-être une étape... »

Le vent frais me fait grand bien. Je m'y abandonne totalement.

« J'ai peur Sanon... »

Je ressens un grand creux dans le ventre. Je me résigne à sortir de ma chambre. Je retrouve ma mère en train de faire la vaisselle dans la cuisine. Elle me toise sèchement. Je ne dis rien, je le mérite amplement.

Je m'assois doucement, j'enlève le couvercle. Je contemple pendant un temps mon assiette puis me mets à manger. Au bout d'un instant, j'écris un nouveau message à Sanon :

« Viendras-tu à mon récital la semaine prochaine ? »

« Je ne manquerai ça pour rien au monde ! »

Je souris en lisant sa réponse. Je mords à pleines dents dans une des boulettes. Je tourne mon regard vers maman, elle me toise une nouvelle fois.

Sanon IIIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant