La corneille et la colombe, ainsi que d'autres histoires...

Illusion - Cinquième partie

Tout est fini. La vie reprend son cours, continue envers et contre tout. Elle ne sourit plus, ne pleure plus. Son visage est redevenu neutre, comme avant, comme s'il ne s'était rien passé. Comme si tout n'avait jamais existé. Comme si elle avait tout inventé. Parfois, il lui arrive même de douter, de penser qu'effectivement, rien n'est arrivé. Que tout n'était qu'un rêve, le plus beau rêve de toute sa vie, mais rien de plus qu'un simple rêve.

Son monde a repris vie tandis que la sienne s'est arrêtée. Elle passe de nouveau ses journées protégée à l'intérieur de sa tête, dans cet univers qui lui était si cher, qui l'est toujours. Mais ses personnages sont désormais désespérément gris, les paysages ternes. Tous continuent à suivre leurs objectifs mais leurs buts lui paraissent désormais dénué de sens.

Tout est redevenu comme avant, mais tout est si différent. Même la musique semble fausse, fade, sans harmonie, sans tonalité. Le monde a perdu ses couleurs, ses saveurs, la terre n'est plus rien, rien de plus que la dure et triste réalité. Rien ne va plus, elle ne voit plus que le mal, présent partout, dans la rue, à la télévision, sur internet, tout n'est plus que guerres, terrorisme et attentats.

Rien n'est plus comme avant. Elle est seule, plus seule que jamais, plus triste et désespérée qu'elle ne l'avait jamais été. Le gouffre s'élargit au-dessous d'elle. Elle est au bord du vide, ce vide qui l'attire inexorablement, ce vide qui ne fait que l'appeler, encore et encore, de plus en plus fort.

Elle sent qu'elle ne tiendra plus longtemps. Qu'elle n'a plus la force, ni la volonté de résister à cet appel. Elle n'essaye même pas. Elle se laisse entraîner. 

Elle perd pied. S'enfonce dans l'abîme. Toujours plus loin de la réalité, cette réalité qui lui donne envie de vomir, cette réalité si sordide qu'elle ne souhaite plus que s'en éloigner, la fuir à n'importe quel prix. Le noir et le silence l'entourent, l'enveloppent, effaçant jusqu'aux marques sur ses bras, jusqu'au rouge à ses pieds.

Elle rouvre les yeux. Ailleurs. Au milieu d'un univers coloré, écoutant une mélodie des plus belles et justes. Elle n'est pas seule. Elle n'est plus seule. Des chiffres dansent dans le ciel, aux côtés d'éclats de magie. Sa main cherche la sienne. Leurs doigts se trouvent. L'harmonie est retrouvée.

Elle n'est plus seule. Elle ne le sera plus jamais.  

Fin