Le garçon... Qui est-il ? Quelle est sa personnalité ? Voyons voir comment il verrait la scène s'il était :
01. Crapule
Stef regarda les autres élèves du lycée. Ils étaient tous si fades, si insipides, si stupides. De vrais pantins. Il les examina attentivement, regardant avec quelle fille il pourrait passer un peu de bon temps, illusionner le temps d'un moment, avant de passer à une autre.
La jeune qui rigolait auprès de ses copines. Un peu trop facile, peut-être ? La brunette, dans un coin. Stef savait lire les visages comme le Maître lui avait appris. Elle avait l'air perdue. Une nouvelle. Elle était influençable, comme le prouvait le paquet de clopes mentholées qu'elle tenait dans une de ses mains. Une proie trop banale. Le Maître aurait eu honte de lui.
Toujours se surpasser, il avait très tôt appris ça. Quand il était entré dans la racaille de rues et qu'il avait dû vite se surpasser. Quand il avait commencé à vendre de la drogue et qu'il fallait vite apprendre les prix pour pouvoir grossir les poches des fournisseurs. Quand on se battait, c'était l'autre qu'il fallait surpasser, reprendre sa tactique quand il ne s'y attendait pas tout en trouvant un moyen de faire mieux que lui.
C'est alors qu'une jeune fille aux cheveux noirs et aux yeux marrons franchit les grilles de l'établissement scolaire essentiellement de par son nom. Elle avait l'air de s'être sérieusement ennuyée. Elle avait en revanche ce genre de regard qu'on trouvait chez les filles qui n'aimaient pas se laisser faire, qui voulaient à tout prix prouver aux masculins la supériorité des personnes qui possédaient un bout de chromosome en plus. Et en même temps, elle semblait calme, posée, donc certainement bonne élève.
Stef sourit. C'était exactement ce qu'il voulait.
Ââââhhh, ÇA, c'est un bad boy ! C'est un séducteur, un dealer, un tueur peut-être même. On peut tout imaginer sur lui, si Laurine va tomber amoureuse, feindre de l'être, s'il va la tuer ou que ça va être l'inverse, si ce morceau de l'histoire occupera cinq pages ou toute une trilogie. Ça peut aussi bien être un roman d'amour que du policier, de la gaslamp fantasy qu'un prélude à la suite comme on en trouve dans La Forêt des captifs, de Pierre Bottero... Examinons donc ce que nous réserve la suite.
02. Un "intello"
Stef marchait en lisant, comme toujours. Il ne faisait pas cinq mètres sans prendre un bon bouquin, que ce soit un best-seller comme un traité de psychologie. À peu près tout ce qui sortait de l'ordinaire lui plaisait. Il avait lui-même écrit quelques livres, restés à l'état de brouillon, mais qui lui conféreraient sans problème un franc succès. Après tout, dans deux ans, c'était la majorité, peut-être l'occasion de commencer une nouvelle vie et faire romancier...
Le lycée ne l'intéressait pas. Il hésitait encore sur les études supérieures, étant donnée la faible moyenne face à ses capacités surprenantes. Il n'avait pas envie de bosser. L'école, c'est le meilleur moyen de vous dégoûter d'une chose qui aurait pu vous passionner si vous l'aviez découverte par vous-même.
Il se souvint d'il y avait à présent plus de dix ans. Diagnostiqué "Asperger léger" par la psy, il avait réussi à entrer un peu en contact avec les autres, mais il n'arrivait jamais à se mémoriser un visage, si bien qu'il y avait une cinquantaine d'élèves qui le connaissaient et que lui ne connaissait pas. Le matin, il lui lançaient "Salut, Stef ? Quoi de neuf ?". Il leur serrait la main, arrivait un peu à papoter, mais ne parvenait jamais à mettre un nom sur un visage. Il pensait qu'il n'y arriverait jamais.
Il leva ses yeux vert profond de sa lecture et s'aperçut que quelqu'unE le fixait. Une angoisse le prit : et s'il s'agissait d'une fille qui était tombée amoureuse de lui ? Ça n'avait aucun sens ! On ne tombait pas amoureux dès le premier regard ! À moins qu'elle ne le connaissait depuis longtemps ?
La fille était belle. Ce genre de filles qu'il aimait beaucoup regarder, mais qu'il n'accostait jamais. Tomber amoureux, il en rêvait, mais pour bâtir une relation durable, il lui aurait fallu du temps, et du temps, il n'en avait jamais. Mais elle s'avança vers lui. Stef se sentit d'un coup désemparé. Sa bulle de sûreté éclatait. Calme-toi. Il y a une probabilité de 50 % que cette fille ne soit pas amoureuse de toi, n'envisage pas que les hypothèses pessimistes. Sois réaliste. Il se raffermit. Il fallait faire comme s'il savait qui elle était.
"Salut ! Moi, c'est Laurine, et toi ?"
Elle s'était présentée. Ce qui signifiait qu'elle ne le connaissait pas encore. Et du même coup, il savait à présent son prénom. Bien. Cela ferait au moins une personne qu'il pourrait gérer. Détends-toi. Nous sommes deux inconnus, donc il n'y a aucun risque de boulette. Ne fais pas les choses comme le fait un Asperger, fais-les comme les autres font. Parle de ce qui ne t'intéresse pas, ou très peu. Qu'est-ce que ça peut aimer, une fille ?
D'un coup, il eut le mauvais pressentiment que sa vie tranquille allait en prendre un coup.
03. Un poète
Le lycée. Beau mot que le lycée : ça englobait tout ce que Stef n'aimait pas. Tout ce qu'il demandait, c'était qu'on le laisse tranquille, chez lui, vaquer à ses occupations ou inviter des amis. À vrai dire, il avait peu d'amis. Et très peu qui le comprenaient.
Stef aimait la poésie, ce qui lui avait valu une réputation d'homo chez les abrutis de Terminale. Lui essayait de se tenir à l'écart, dessinant, essayant d'écrire quelque chose de nouveau, mais c'était toujours la même chose qui revenait : les femmes. Ou plus exactement, les filles.
Il n'avait jamais vraiment vécu de relation amoureuse. Il en aurait voulu une qui tienne la route, pas une amourette débile à peine digne d'un poète moderne adepte des vers de mirliton. Une belle fille avec des cheveux noirs, ou bien bruns, qui l'enserrerait de ses bras, qu'il aimerait de tout son cœur... Qui le comprendrait surtout.
Ça n'arriverait jamais.
Il tourna sa tête vers l'entrée du lycée. Une fille venait d'entrer. Plutôt jolie, enfin, pour lui. Il s'en détourna et regarda ses vieilles baskets, songeant à un poème qu'il pourrait faire sur l'automne. Un haïku, c'était trop bref. Un sonnet, trop compliqué.
C'est alors que la fille vint à lui.
Un instant leurs regards se croisèrent. Elle resta immobile un instant, puis se décida à aller vers lui. Stef se sentit soudain mal à l'aise. Comme s'il avait déjà vécu cette scène quelque part...
Voilà, c'est tout pour ce soir. En attendant, envoyez-moi des suggestions de ce que vous auriez envie que je fasse comme personnage dans la même situation, ce petit jeu d'exercices de style commence à bien m'amuser. N'hésitez surtout pas à faire comme moi !
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Exercices de style
AcakQuelques essayages de différents styles afin de vous montrer un peu comment on peut écrire une histoire.