— Éteignez ce feu, réclame Deneb, en me tournant le dos.
Les filles ne tardent pas à lui obéir et la pièce se plonge dans la semi-obscurité. Seul le rougeoiement des cendres éclairent les murs ternes de la maison. De petites lueurs apparaissent et prennent vie alors qu'Emmy allume quelques bougies qu'elle dépose ici et là.
J'observe Deneb gravir les escaliers, une fille accrochée à chaque bras. Il ne me quitte pas du regard, un sourire narquois placardé sur les lèvres. Son visage reste le même, diaboliquement angélique. Je plisse les paupières pour voir autre chose et y mets toute ma volonté, mais que devrais-je voir de plus ? Rien ne change son aspect, même en me forçant à m'ouvrir au pire. Parvenu en haut des escaliers, il éclate de rire.
— Ne sois pas jalouse, divine création. Tu la verras une prochaine fois, raille-t-il avant de disparaître à l'étage.
Quoi ?!
Les filles, qui sont restées dans le salon, se retournent toutes sur moi. J'ai envie de le tuer. À l'évidence, nous pensions à la même chose : sa véritable apparence, mais me mettre dans l'embarras en supposant que j'aimerais voir la chose l'amuse vraisemblablement.
— Ou jamais, murmuré-je en fusillant les curieuses du regard.
Je tourne la tête vers la porte à gauche. En quelques secondes, je pourrais être sur elle, l'ouvrir et m'enfoncer dans les bois. Il faut absolument que je m'échappe, mais la nuit est déjà tombée. J'ai besoin de savoir comment va ma mère. Si rien ne lui est arrivé. C'est une nécessité. Et puis, je ne laisserai plus personne me retenir en cage, ni dicter mes actes, néanmoins je ne vais pas être stupide ; patienter jusqu'à l'aube est bien plus sûr.
Les filles s'affairent à débarrasser les couverts sur la longue table, pendant que d'autres nettoient les plats dans une bassine d'eau. Il est absolument hors de question que je me rende utile pour quoi que ce soit. Je n'ai pas demandé à être là. Le tintement familier de la vaisselle pourrait me calmer si je n'étais pas autant sur les nerfs.
La nuit va être interminable...
Je fais passer les tissus déchirés de ma combinaison sous l'élastique de mon soutien-gorge, tout en pestant intérieurement contre Aden. Je le hais. De manière si forte maintenant. À un point tel que je ne veux plus jamais croiser son chemin.
Où est-il, d'ailleurs ? Avec une femme, au premier étage ? Pourquoi je m'en soucie ?
Peut-être parce qu'Aden est tout l'opposé de Deneb. Il n'est pas dans la démonstration. Il n'a pas besoin de l'être. Son absence suffit à éveiller les interrogations, à susciter l'inquiétude à te rendre folle d'essayer de savoir ce qu'il fait, où et avec qui !
C'est ce que j'ai toujours ressenti au manoir. Je voulais passer mon temps avec lui, le suivre partout où il allait. Son attitude, sa manière de parler, les expressions de son visage, tout me fascinait.
Là où Deneb incarne une perfection froide, Aden est d'une beauté imparfaite. Ses longs sourcils sont le plus souvent froncés ce qui lui confère un regard dur. Certains hommes beaux ont des traits féminins. Il n'en dispose d'aucun. Même ses lèvres pleines et galbées sont fabuleusement masculines. Sa beauté dépasse les standards habituels. Il a ce quelque chose en plus, ce magnétisme brut que je n'ai jamais rencontré chez personne d'autre. Il est obsédant, menaçant, attirant, précisément parce qu'il ne cherche pas à séduire.
Aden n'a pas besoin de sourire, ni de plaire. Il s'impose. Mystérieux. Parfois dangereux. Et pourtant, paradoxalement... sa présence rassure.
Ces contradictions sont tellement insupportables.
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Mysterious Eyes - En cours de réécriture (Dispo en Broché et Ebook sur Amazon)
Romance⚠️ POUR PUBLIC AVERTI ⚠️ Certaines scènes de cet ouvrage peuvent être choquantes (Sexe, meurtre, torture, viol) Aussi, les références religieuses présentes dans ce texte ne relèvent ni du prosélytisme ni d'une critique ou d'un éloge envers une relig...